Confrontée à des vagues de migrants arrivant d’Italie, la préfecture des Hautes-Alpes improvise alors que les associations se déchirent entre bénévoles et radicaux.
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Les Terrasses solidaires font figure de structure modèle dans le registre de la prise en charge des migrants. Cette bâtisse avec une vue sur la vallée est la propriété d’une association soutenue par le fonds Riace, du nom de ce village de Calabre qui a accueilli des migrants. Le fonds a été créé par Olivier Legrain, un entrepreneur devenu millionnaire par le biais d’une opération de rachat avec effet de levier sur Materis, une filiale de Lafarge.
Retiré des affaires, il s’est fait philanthrope, sans oublier les vertus d’un bon management. « Nous faisons partie d’une chaîne de solidarité qui prend en charge les exilés, détaille Frédéric Meunier, responsable de Riace, mais nous sommes aussi dans un écosystème qui se structure et a dépassé le stade de la gestion de squats. » Avec neuf salariés et plusieurs centaines de bénévoles à l’année, Les Terrasses assument de facto une mission de service public. Pour Frédéric Meunier, il ne fait aucun doute que le refuge va se pérenniser. L’associatif s’offre le luxe d’appeler l’État à sortir de l’improvisation et à faire preuve de « davantage de lucidité ».
En 2017, 1 300 migrants ont transité par Briançon. En 2018, ils étaient 5 800. À l’été 2023, jusqu’à 300 arrivées hebdomadaires ont été enregistrées. Il s’agit d’hommes à 90 %, voire plus. Leur provenance varie en fonction du contexte international. Majoritairement afghans et iraniens en 2020, subsahariens l’année suivante, les migrants arrivaient l’an dernier du Maghreb à près de 50 %.
La sphère caritative, du reste, n’est pas elle-même à l’abri des tensions et des fractures. Yann (pseudonyme), étudiant dans une université du Grand Ouest, a été bénévole aux Terrasses solidaires. Désabusé, il ne compte pas y retourner. « On y casse du flic par principe, mais on appelle le peloton de gendarmerie de haute montagne quand ça devient sérieux en montagne. On déblatère sur le racisme d’État, mais on ne met pas les noirs et les Arabes dans les mêmes dortoirs pour éviter les bagarres… » Le jeune homme se souvient d’avoir entendu une étudiante grenobloise sermonner une bénévole de Briançon en âge d’être sa mère qui avait rappelé à l’ordre un migrant parce qu’il jetait ses ordures à côté de la poubelle. L’étudiante trouvait cette injonction néocoloniale.
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