Viols du 7 octobre: féministes, où êtes-vous?

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Depuis trois mois, des collectifs appellent à ne pas oublier les crimes sexuels commis par le Hamas, le 7 octobre. Mais même face à l’horreur, le néoféminisme a la condamnation à géométrie variable. Pour la gauche woke comme pour une certaine droite villepiniste, toutes les femmes ne se valent pas.


Ce 25 novembre 2023, la « Marche contre les violences faites aux femmes » était sur le point de débuter place de la Nation à Paris. Parmi les manifestants, les collectifs Nous vivrons et 7 Octobre avaient organisé un groupe visant à interpeller les féministes sur les crimes sexuels du Hamas. Quelques-unes d’entre nous portaient un survêtement taché de rouge à l’entrejambe, symbole du viol de Naama Levy, kidnappée le 7 octobre et sortie d’un véhicule du Hamas avec le pantalon ensanglanté et les tendons d’Achille coupés (au moment où j’écris ces lignes, soit soixante-dix jours après, la jeune femme est toujours retenue par les terroristes). Violemment apostrophé par une cinquantaine d’antifas assurant le service d’ordre de Révolution permanente et du NPA, notre groupe n’eut d’autre choix que de renoncer à rejoindre le cortège. Ce jour-là, la rue parisienne appartenait aux militants gauchistes et propalestiniens.

Nous toutes, sauf les juives ?

Les femmes et fillettes juives violées dérangent le narratif, assez répandu dans la gauche woke, tout comme au sein d’une certaine droite villepiniste, dans lequel les Palestiniens sont l’allégorie de la Victime universelle. Impossible de les voir comme des djihadistes sanguinaires, des violeurs de masse. Ils sont des victimes, au pire des « résistants ». Quand une femme est victime de viol, il s’en trouve encore pour lui dire de s’habiller de façon pudique. Quand des femmes israéliennes sont violées par des terroristes palestiniens, le silence des féministes revient à dire que ces victimes-là ont mérité leur sort puisqu’elles appartiennent au peuple bourreau.

Certaines ont toutefois sauvé l’honneur de la gauche, jadis en pointe dans le combat universaliste féministe. Je pense à l’écrivaine Maryam Madjidi, Française d’origine iranienne, qui a publié dans L’Humanité début décembre un texte titré : « Toutes les femmes sauf les juives ? » Elle y parle de cette « solidarité à géométrie variable qui [lui] donnera toujours la nausée » et rappelle que « les pasdaran d’Iran et le Hamas de Gaza […] ont le même sang sur les mains et la même haine des femmes ».

Depuis la nuit des temps, les crimes sexuels entrent dans le cadre systémique des persécutions, des guerres, des conquêtes. Dans l’histoire des violences sexuelles de masse, l’objectif des commanditaires est de souiller la femme du camp adverse pour la rendre salie à sa communauté, si possible enceinte. Il ne s’agit pas de la faire disparaître, mais qu’elle survive comme une morte-vivante. Ce qui revient à un acte de soumission et de terreur infligé à l’ennemi et, surtout, à un acte d’humiliation absolue puisque la femme, source de perpétuation génétique et culturelle de son groupe, est alors rabaissée au rang de chose, au même titre que les bêtes du troupeau.

Mais les crimes sexuels s’inscrivent aussi dans la pratique des génocides contemporains. On sait par des témoignages de survivantes que des femmes arméniennes ont été violées par les génocidaires turcs et leurs supplétifs kurdes. À Birkenau, les femmes subissaient aussi des agressions sexuelles, notamment après la sélection où elles passaient au « sauna », la salle où les déportés étaient déshabillés, rasés et tatoués. Des viols étaient également commis par des SS ou des kapos au sein du camp. Des femmes tutsies ont, elles aussi, témoigné de viols pendant les massacres de 1994.

Au regard de tous ces phénomènes hélas bien connus, on distingue deux spécificités des crimes sexuels commis le 7 octobre dernier lors de la rave party Tribe of Nova et dans les foyers des kibboutzim. D’une part, leur aspect massif indique qu’ils ont été commandités, le viol faisait partie des armes à utiliser contre les juifs ce jour-là. D’autre part, la plupart des femmes violées, mutilées et martyrisées ont été ensuite abattues d’une balle dans la tête (des viols post-mortem ont été signalés), comme lors des génocides. On précisera ici que des cas ont aussi été rapportés de cadavres d’hommes présentant des plaies par balle au niveau des parties génitales.

Souiller les femmes pour les envoyer en enfer

Je suis convaincue que les viols de masse du 7 octobre ont été prévus et commandités probablement depuis Téhéran, où le pouvoir des ayatollahs est aux abois. Même si les médias se désintéressent du mouvement Femme Vie Liberté, il a considérablement ébranlé le pouvoir de ces fanatiques qui redoublent de cruauté dans la répression des hommes et des femmes insurgés. Des femmes sont quotidiennement battues et humiliées en public pour avoir ôté leur hijab, elles sont emprisonnées et violées dans les prisons, les écoles ou chez elles, dans l’indifférence de la communauté internationale.

Ali Khamenei, dont l’autorité politique et morale est absolue dans le régime iranien, a déclaré dans une fatwa que « si une fille est arrêtée, elle ne doit pas quitter ce monde en restant vierge ». En effet, dans l’imaginaire islamique, les femmes qui meurent vierges iront au paradis, donc il faut les souiller pour les envoyer en enfer. Dès le début de la République islamique en 1979, ces pratiques ont été documentées. Les pasdaran ont bien reçu le message en torturant et violant nombre de jeunes femmes, mais aussi de jeunes hommes dont des mineurs. Les djihadistes du Hamas sont alimentés par la même interprétation des textes coraniques, habités par la même haine. Et par la même frustration sexuelle. Reste une question : faut-il redouter que l’arme du viol soit aussi employée par le Hamas sur les otages ?De récurrentes rumeurs circulent à ce sujet, mais il faut attendre le résultat des enquêtes et des auditions conduites par Israël auprès des otages féminines déjà libérées. Pour ma part, je me prépare au pire. Je ne vois pas pourquoi les djihadistes du Hamas, soutiens inconditionnels de l’État islamique, n’imiteraient pas leur pratique systémique du viol, contre les femmes yézidies notamment, en Irak et en Syrie. C’est dans leur interprétation perverse du Coran que ces criminels justifient leurs crimes sexuels. De sorte qu’on peut parler d’une véritable théologie du viol.

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