Ce chaos est une aubaine suffisante pour les ennemis d'Israël, ce n'est pas à notre communauté de l'aggraver encore.
Melanie Phillips
La semaine dernière, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rendu visite à Rishi Sunak à Downing Street. Cette visite était importante. Netanyahu demandait le soutien du Royaume-Uni pour empêcher un Iran de plus en plus dangereux d'acquérir une capacité d'armement nucléaire.
Le Conseil des députés des juifs britanniques a fait peu mention de sa visite. Sur son site Web, elle était presque totalement éclipsée par les événements de la semaine.
Vous n'avez pas besoin d'être d'accord avec les réformes judiciaires de Netanyahu, ni avec quoi que ce soit de ce qu'il fait, pour être consterné par le comportement du Conseil.
Cette façon de le snober n'est pas seulement un manque de courtoisie choquant. Cela n'a pas seulement affaibli son objectif d'obtenir un soutien urgent contre l'Iran. Le Conseil n'a pas seulement ignoré une mission d'une importance capitale pour la défense d'Israël contre une menace inadmissible.
En traitant le Premier ministre démocrate d'Israël comme un paria - comme s'il était un tyran ou un dictateur - le Conseil a également démontré qu'il avait toute la perspicacité d'une pancarte d'agitprop de gauche.
En revanche, Gary Mond, président de l'Assemblée nationale juive, s'est comporté comme l'adulte dans la salle.
L'Assemblée, a-t-il dit, était « ravie » d'accueillir Netanyahu. L'entretien était d'une importance capitale pour empêcher l'Iran de devenir une puissance nucléaire et pour promouvoir le commerce entre le Royaume-Uni et Israël.
Les réformes judiciaires et les manifestations israéliennes contre celles-ci étaient « des problèmes à résoudre par le gouvernement israélien et les citoyens israéliens » et ce n'était pas au Royaume-Uni d'intervenir.
Le comportement du Conseil fait fi également de l'inquiétude déclarée des dirigeants juifs quant au fait que certains politiciens israéliens encouragent la haine et la division. Le grand rabbin Sir Ephraim Mirvis a écrit très justement dans la Jewish Chronicle, à la veille de la visite de Netanyahu, que l'unité juive était une "responsabilité sacrée - pour les politiciens, les dirigeants, les militants" et tous les autres. Pour le Conseil, pourtant, l'unité juive exclut curieusement Netanyahu.
Le spectre de la désunion communautaire fait à juste titre frémir les juifs. L'histoire nous dit que lorsque nous nous retournons les uns contre les autres, nous ouvrons la voie à nos ennemis pour nous détruire.
En Israël, de profondes divisions se sont révélées au grand jour de manière affligeante au cours de trois mois de manifestations de masse.
L'hystérie était alimentée par la peur profonde des Israéliens laïcs d'un gouvernement dirigé par des juifs orthodoxes.
Un manifestant laïc a jeté avec mépris une liasse de billets en shekel sur un groupe de Charedim dansants. Ailleurs, des manifestants aux visages convulsés par la haine ont crié des injures aux Juifs orthodoxes sortant d'une synagogue.
Les manifestants ont défilé à travers l'ultra-orthodoxe Bnei Brak dans ce qui ressemblait à une provocation délibérée – pour se retrouver accueillis avec des gâteaux et des boissons. Un manifestant a été tellement ému par les habitants chantant « shalom aleichem » (bienvenue) qu'il a enlevé son casque de motard et a pleuré.
Les Israéliens sont bouleversés par le gouffre culturel qui s'est ouvert. Les familles et les amis se sont gravement disputés dans une collision de deux visions du monde diamétralement opposées.
Un côté, obsédé par les ultras de la coalition, reproche à Netanyahu d'avoir apparemment ouvert la voie à la dictature et à une théocratie à l'iranienne. Ils citent comme preuve les « héros » d'Israël, les pilotes militaires d'élite qui ont déclaré qu'ils refuseraient de servir un gouvernement « non démocratique » si les réformes étaient adoptées.
L'autre côté perçoit une foule utilisant la perturbation, la violence et l'intimidation pour tenir le pays en otage afin de forcer le gouvernement démocratiquement élu à faire ce que la foule réclame. Ce côté considère la suspension des réformes par Netanyahu comme une capitulation devant cette foule, et les pilotes qui ont menacé de ne pas servir sont considérés comme ayant franchi l'ultime ligne rouge et sapé de manière impensable Israël dans sa lutte existentielle contre ses ennemis mortels.
Je partage cette dernière opinion. Cependant, les craintes concernant les extrémistes au sein du gouvernement et l'absence de freins et contrepoids politiques sont valables.
L'essence du problème est le système politique dysfonctionnel d'Israël. Au lieu de l'unité, il favorise la division. Les premiers ministres sont tenus en otage par de minuscules partis de la coalition.
La Knesset n'est qu'une chambre d'enregistrement pour le gouvernement. Les membres de la Knesset n'ont pas de circonscriptions à la manière britannique pouvant faire pression sur eux pour qu'ils mettent le gouvernement au pied du mur. Il n'y a pas de deuxième chambre parlementaire pour servir de frein.
C'est pourquoi les manifestants considèrent la Cour suprême comme le seul contrôle des excès du gouvernement. Ils refusent de voir que cette conception est en soi profondément anti-démocratique, puisqu'elle revient à remplacer l'état de droit par un système où le pouvoir est aux mains d'avocats politisés.
Le système dysfonctionnel d'Israël a libéré le démon de la « post-démocratie » qui s'est échappé dans tout l'Occident. Ce courant soutient que la représentation parlementaire a échoué et que la manifestation de rue est une forme de démocratie plus légitime. Elle ne l'est pas: c'est une doctrine révolutionnaire qui s'appuie sur la force et donne le pouvoir au fort contre le faible.
La cohésion sociale est essentielle à la survie d'Israël. Au cours des trois derniers mois, les ennemis d'Israël l'ont regardé avec joie s'entredéchirer. Ils ont jubilé lorsque les forces d'élite d'Israël se sont mutinées. Ils se sont réjouis lorsque le Premier ministre autrefois célèbre pour ses talents politiques a dû reculer face à la foule.
Israël a été affaibli alors qu'il avait un besoin urgent d'être fort. Et tous ceux qui ont dit au monde qu'Israël est sur le point de cesser d'être une démocratie et que son Premier ministre est un futur dictateur qu'il fallait traiter en paria politique, ont contribué de manière impardonnable à renforcer les ennemis du peuple juif.
Melanie Phillips est chroniqueuse au Times
traduction: Carla Montet

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