Sur le front Nord, la riposte russe commence mais…

Certains SITREP sont plus difficiles à écrire...

Alors que les regards étaient tournés vers Kherson et l'enlisement sanglant d'une offensive ukrainienne annoncée, pour beaucoup l'annonce de la percée ukrainienne d'environ 50 kilomètres vers Koupiansk, capturant au passage la petite ville de Balaklaïa a été une surprise d'autant plus grande que ce premier succès tactique de Kiev a été accompli en seulement 3 jours, bousculant les lignes de défense russes et républicaines jusqu'aux portes de Koupiansk, ce carrefour stratégique vital pour la tenue et l'approvisionnement du front russe au Nord de Slaviansk.

Hier, tandis que je terminais un 1er SITREP sur cette offensive ukrainienne, la progression des forces de Kiev continuait, menaçant franchement en fin de soirée à la fois Koupiansk  au Nord et Izioum au Sud qui sont les 2 villes stratégiques au Nord du front du Donbass qui assurent la base arrière des forces russes, leur Etat-Major de secteur, les renforts, les rotations d'unités et surtout la logistique vitale pour poursuivre les opérations en direction de Slaviansk et Kramatorsk.

Situation provisoire du secteur de Koupiansk / Izioum au 9 septembre 2022
Sur le front de Kharkov, les combats ont arrivés jusqu'à Koupiansk et Izioum
Les forces ukrainiennes ont lancé le 7 septembre plusieurs attaques terrestres appuyées d'une part par plusieurs appuis d'artillerie mais aussi des groupes de reconnaissance et sabotage qui vont désorganiser l'arrière du front russe en renseignant l'artillerie et détruisant des dépôts logistiques et infrastructures de commandement.
Les forces russes après la destruction de leurs 1ère et 2ème lignes ont opté pour une retraite lointaine afin de réorganiser une nouvelle défense cohérente plutôt que de s'isoler dans des ilots de résistance à court terme encerclés, et pour attendre les renforts de Russie se dirigeant vers Koupiansk et, par la rive gauche de l'Oskol, vers Izioum.
Soldats ukrainiens, littéralement "en troupeau" 
avançant dans le saillant se Koupiansk-Izioum
Pour faire descendre les propagandistes de leurs nuages hallucinés dans la boue des combats réels, je précise :
  • Que la progression des forces ukrainiennes n'est pas consécutive à "un piège tendu par l'Etat-Major russe", mais bien à un enfoncement brutal de la ligne de front ayant causé un nombre sensible de pertes et de capture de Balaklaïa et de villages, sans compter les répressions qui commencent vis à vis des civils pro-russes.
  • Que les forces russes n'ont pas "été anéanties" mais se sont repliées après la rupture du front, pour effectivement en réaction organiser une contre offensive avec les renforts arrivant afin de piéger les forces ukrainiennes (ce qui sera difficile vu la largeur du saillant ukrainien) ou au minimum de les repousser vers la rivière Donets.
Voici une carte animée des opérations
réalisée par le réseau (pro russe) Rybar
Comme aux échecs, on ne gagne pas un combat sans prendre des coups et une guerre sans subir des défaites et probablement les forces alliées sont en train de vivre entre Kharkov et Slaviansk, après l'échec des opérations entre Soumy et Kiev, une nouvelle défaite mais dont on peut aussi annoncer qu'elle sera provisoire car elle va déclencher une nouvelle stratégie offensive russe en Ukraine.
1 / La bataille de Koupiansk
Cette offensive ukrainienne qui a visiblement été misé sur la vitesse (3 jours), dans le but de s'emparer de Koupiansk avant l'arrivée de renforts russes suffisant pour renforcer la ville et lancer une contre offensive et sur des appuis importants de l'artillerie de l'OTAN, pour détruire précisément des objectifs russes (dépôts, concentrations de véhicules, systèmes d'artillerie...) et entraver l'arrivée des renforts sur Koupiansk et Izioum (ponts, voie ferrée, carrefours...)
Le 8 septembre l'avant garde ukrainienne est arrivée au Sud-Ouest de Koupiansk et dès le 9 des premiers assauts blindés ont été lancés contre les premières défenses périphériques.
Au soir du 9 septembre plusieurs sources russes et ukrainiennes signalaient des combats dans la périphérie Sud-Ouest de Koupiansk ainsi qu'une progression ukrainienne vers le Sud, le long de la rive droite de la rivière Oskol (qui est ici très large en raison d'un barrage hydroélectrique en aval, entre Liman et Izioum). Cette progression vers le Sud vise à priori à contrôler les ponts sur l'Oskol comme celui de Borova, mais peut-être aussi à faire la jonction avec une potentielle nouvelle offensive de Kiev partant de Slaviansk vers le Nord, vers Liman et Izioum.
Bombardement ukrainien (probablement avec des munitions guidées de l'OTAN) 
sur un pont au Nord de Koupiansk enjambant l'Oskol 
Dernière minute !
Le régime de Kiev a annoncé, ce 10 septembre matin, avoir pris le contrôle de la ville de Koupiansk, ce qui confirme ici la défaite - provisoire - des forces russes dans ce secteur et, au passage l'idiotie des propagandistes qui soutenaient mordicus que les ukrainiens avaient été attirés dans un "chaudron" par l'Etat-major russe. Si tel avait été le cas les renforts auraient été préalablement déployés pour protéger impérativement Koupiansk (on installe un piège avant l'arrivée de la bête et non après), même si je suis convaincu que les forces ukrainiennes vont être à court terme effectivement écrasées mais au prix de pertes humaines qui auraient selon moi pu être évitées...
 
Cette défaite d'Izioum est surtout la défaite du "trop tard et trop peu", qui est à mon humble avis le talon d'Achille de la stratégie russe en Ukraine qui va devoir enfin regarder la réalité ennemie, ses faiblesses (et ses traitres) ainsi que les moyens nécessaires pour obtenir la Victoire. Ma fonction militaire et le devoir de réserve qui l'accompagne m'empêche ici de développer et mes observations et ma pensée.
2 / La bataille d'Izioum
Plus au Sud, la situation autour d'Izioum (qui est la base arrière des forces russes devant Slaviansk) est devenue très tendue car, si la ville n'est pas atteinte par les forces ukrainiennes, elle subit des bombardements et l'autoroute M 03 qui la relie aux secteurs russes de Vesele et Morozovka semble menacée par une attaque ayant franchi la Donets au Sud Est de Balaklaïa. Cependant, concernant ce secteur d'Izioum, aucune information officielle n'a été publiée (un silence qui confirme le niveau critique de la situation)
Ce qui est certain c'est que le bastion russe d'Izioum est menacé d'encerclement, au Nord depuis le saillant ukrainien, à l'Ouest depuis Balaklaïa, à l'Est depuis une percée le long de l'Oskol et risque de devoir faire face peut-être à une offensive prochaine depuis Slaviansk. ses forces de défense sont dispersées sur plusieurs priorités ainsi que celle de protéger les ponts près du barrage sur l'Oskol par lesquels les renforts, mais aussi une éventuelle retraite passeraient.
Si l'encerclement d'Izioum se précise et devient imminent il est plus que probable que l'Etat Major russe décide d'abandonner provisoirement ce secteur pour sauver sa garnison et réorganiser une défense appuyée sur les rivières Oskol à l'Ouest et Donets au Sud (si cette dernière n'est pas traversée massivement par l'ennemi).
 
Dernière minute !
Dans le nuit du 9 au 10 septembre, les forces russes du secteur d'Izioum ont reçu l'ordre de se replier à l'Est sur le rive gauche de la rivière Oskol pour éviter un encerclement (surtout avec une offensive en provenance de Slaviansk en train de menacer et qui risque d'atteindre, si elle perce les ponts encore utilisables de l'Oskol.
 
C'est regrettable de devoir abandonner une place forte importante et pour laquelle tant d'hommes sont morts en mars dernier pour la libérer, MAIS pour le commandement russe, c'était la meilleure solution pour éviter de nouvelles pertes importantes et en attendant de pouvoir lancer une contre-offensive définitive.
 
3 / La situation dans Balaklaïa
Sur le flanc Sud du saillant ukrainien entre la ville de Balaklaïa et Vesele, la istuation est confuse car, malgré une progression des forces ukrainiennes des combats d'arrière garde russe persistent jusque dans les quartiers Est de Balaklaïa.
Dans le secteur de Balaklaïa les ukrainiens ont déployés plusieurs systèmes d'artillerie longue portée de l'OTAN pour opérer des bombardements à la fois sur Koupiansk et Izioum.
Plusieurs témoignages pro-russes et même ukrainiens rapportent que des unités spéciales ont entamé une "chasse à l'homme" contre les civils pro-russes de la ville mais aussi des villages capturés. Et dans ce domaine, la russophobie criminelle ukrainienne ayant été exacerbée depuis 6 mois, le pire est à craindre  pour les populations d'Izium et de Koupiansk, ville qui a accueilli triomphalement les forces russes le 27 février dernier.
4 / La situation au Sud sur la rivière Donets
Au vu de l'actuelle offensive ukrainienne dans le secteur d'Izioum, les actions ukrainiennes précédemment menées début septembre sur la Donets entre Seversk et Slaviansk transforment les franchissements de la rivière réalisés à Ozerne (Sud Est Liman) et Stari Karavan (Sud Liman) en tête de ponts d'où pourrait partir une potentielle offensive de Kiev en direction de Liman et Izioum, à l'instar de celle réalisée sur le front de Kherson à partir de la tête de pont d'Andrivka sur l'Ingoulets).
Des forces ukrainiennes, estimées à 4 à 5 000 hommes, se sont concentrées au Nord de Slaviansk vers la rivière Donets (Siversky Donets), avec un une artillerie d'appui composée surtout de batteries de l'OTAN.
Aux dernières nouvelles les combats au Sud de Liman se sont intensifiés depuis la tête de pont de Stari Karavan, confirmant mes inquiétudes pour ce flanc Nord de Slaviansk mais qui est aussi le flanc Sud d'Izioum. La stratégie ukrainienne se précise et dans une répétition fractale :
  1. D'abord attaquer sur une direction pour provoquer des mouvements russes dans ce premier secteur jusqu'à sa stabilisation,
  2. Ensuite attaquer à l'opposé dans une autre direction dont les réserves russes ont été dégarnies vers le premier secteur,
Ainsi a t-on pu observer consécutivement : attaque sur le front de Kherson au Sud puis sur celui Kharkov au Nord, puis sur ce même front successivement:
attaque sur Balaklaïa dont une partie des réserves étaient parties vers Kharkov, attaque vers Koupiansk dont une partie des réserves étaient parties vers Balaklaïa, attaque vers Izioum dont une partie des réserves étaient montées vers Balaklaïa
et donc logiquement nous pourrions observer une attaque sur le Sud d'Izioum.
Dans cette nouvelle offensive ukrainienne vers Koupiansk et Izioum on peut observer l'action prépondérante des systèmes d'artillerie de l'OTAN, en particulier les HIMARS & Co (M184, M270, MARS 2) qui font des dégâts sensibles sur les ressources logistiques, de commandement et les voies stratégiques russes. Ne pas oublier que sans l'appui direct et offensif des ressources de guerre électronique de l'OTAN (satellites) les acquisition de leurs objectifs et les guidages de leurs munirions ne pourraient pas être réalisés par ces lance roquettes multiples "officiellement" servis par des ukraiiens.
Le pont de Koupiansk sur l'Oskol (par où devaient
passer les renforts russes) après les tirs HIMARS
La réaction russe 
A défaut de n'avoir pas su évaluer à sa juste menace l'offensive ukrainienne en préparation depuis fin août devant Balaklaïa et surtout de l'anticiper, l'Etat Major russe a en revanche réagi immédiatement dès que le saillant ennemi s'est développé au Nord jusqu'aux portes de Koupiansk ("mieux vaut tard que jamais"). Une dizaine de brigades d'artillerie, de blindés et d'infanterie mécanisée sont en cours de déploiement et des tirs de barrage massifs de l'artillerie ont commencé pour défendre ce secteur stratégique et vital pour la santé logistique du front russe dans le Nord Donbass.
La question est de savoir s'ls arriveront à éviter la capture de la ville...
Lance Roquette Multiple russe de 300 mm
BM 30 "Smerch" en réaction près d'Izioum
sur l'avant des attaques ukrainiennes.
En revanche le secteur d'Izioum est beaucoup plus difficile à renforcer car, plus éloigné des réserves stratégiques, quasi encerclé et menacé par une offensive sortant de Slaviansk. Qui plus est la situation sur Koupiansk où des premiers combats ont commencé dans les faubourgs de la ville à imposé à l'Etat Major russe, dans le déploiement urgent de ces renforts de donner une priorité absolue à la défense de ce carrefour logistique vital au front russe, quitte à abandonner provisoirement la base arrière d'Izioum de ce front russe au Nord de Slaviansk.
Depuis 2 jours ce sont des milliers de véhicules
de combat russes qui convergent vers l'Ukraine 
et le front de Kharkov. Une tempête d'acier est
en mouvement et cette fois elle sera sans pitié. 
En riposte à cette offensive ukrainienne sur le front Nord, les forces aérospatiales russes ont également intensifié leurs bombardements stratégiques sur les bases arrières et les dépôts de l'ennemi.
Double frappe de missiles russes sur un dépôt
ukrainien à Tchougouïev, au Sud Est de Kharkov
En conclusion 
Après février où Moscou a été contraint de choisir l'option militaire pour assurer sa sécurité frontalière occidentale, septembre sera je pense un deuxième tournant stratégique dans cette confrontation entre la Russie et l'OTAN, car la résistance ukro-atlantiste contraint maintenant la Russie à changer de format dans son combat existentiel post soviétique.
En attendant rien ne sert de jouer à la politique de l'autruche et il est important de comprendre pour mieux s'en éloigner que les fantasmes insouciants et narcotiques des propagandistes lorsqu'ils s'évaporent laissent souvent la place à la déprime voire au défaitisme.
Etre réaliste solidifie dans les épreuve la foi et l'optimisme !
La menace d'une guerre mondiale, qui rôde autour de la Russie depuis près de 20 ans, finit aujourd'hui de s'imposer à l'Europe avec ce nouveau tournant du conflit russo-ukrainien tandis que l'Ukraine, dans sa folie suicidaire sans limite vient, entre Koupiansk et Izioum de signer son arrêt de mort.
Reste à savoir si l'OTAN voudra continuer à l'accompagner jusqu'à l'échafaud !
Certes la Russie mène un combat légitime car existentiel et une résistance victorieuse contre un mondialisme amoral dont la volonté de soumettre les peuple à la dictature de sa marchandise n'est plus à prouver, mais la Russie a toujours cette faiblesse qui est le revers de son éthique de vouloir garder toujours ouverte la porte des négociations et par conséquent de subir l'hégémonie de l'OTAN :
  • Depuis 2007, malgré des mises en garde répétées du Kremlin et une première intervention militaire russe en Géorgie, l'OTAN continue de progresser vers la Russie.
  • Depuis 2014, malgré des avertissements de plus en plus explicites, Kiev poursuit des violations des accords de Minsk et sa procédure d'intégration dans l'OTAN.
  • Depuis février, rejetant le traité de sécurité collective proposé, l'OTAN contraint la Russie à choisir l'option militaire et s'engage dans une cobelligérance aux côtés de Kiev,
  • Depuis juin, le pouvoir de Kiev augmente ses bombardements jusqu'au territoire russe avec la participation active des ressources de l'OTAN (armes et appui électronique).
Aujourd'hui la stratégie perverse de l'OTAN qui consiste à provoquer factuellement des conflits (via des proxy ou des false flags) mais à en faire juridiquement porter la responsabilité à leurs adversaires lorsque ce derniers n'ont plus d'autre choix que de réagir violemment, continue sur le front ukrainien.
Sans les aides militaires, financières, politiques et médiatiques des mondialistes, cela fait longtemps que le régime de Kiev serait revenu à la raison en restaurant l'indépendance politique et la neutralité militaire de l'Ukraine. Mais Washington, continuant à contraindre la Russie à une radicalisation de ses relations avec l'Occident a décidé, une fois de plus de forcer l'ours à plus de fermeté en excitant de plus en plus contre lui ses chiens ukrainiens.
Ce bombardement incendiaire russe de positions ukrainiennes sur le front de
Koupiansk préfigure le tempête de feu qui va s'abattre bientôt sur l'Ukraine.
Ce à quoi nous assistons aujourd'hui avec ses offensives suicidaires des forces ukro-atlantistes, c'est à la fin des opérations militaires spéciales russes en Ukraine, non pas avec leur abandon mais au contraire avec une augmentation radicale des effectifs, des moyens et des objectifs russes, ce que voulait éviter initialement le président Poutine pour ne pas répondre au projet de chaos mondial voulu par Washington.
Mais comme les enjeux de ce conflit en Ukraine sont existentiels, à la fois pour la Russie qui défend sa sécurité civilisationnelle mais également la ploutocratie mondialiste qui veut réinitialiser son économie agonisante et l'Ukraine qui est sacrifié sur l'autel de l'OTAN, Moscou n'a malheureusement pas d'autres choix que de suivre cette dynamique mortifère qui, comme en 1914 mène le Monde au seuil d'une nouvelle boucherie européenne !
Et si cette logique, par malheur, couronnait cette confrontation eschatologique, la guerre sera à la mesure de la folie et des technologies grandissantes de ce monde post-moderne amoral.
Erwan Castel

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