Entretien avec Jean-Marie Le Pen – « En se battant on sauve l’honneur »

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C’est un Jean-Marie Le Pen en pleine forme que nous avons rencontré à Montretout, toujours curieux d’actualité, lisant Présent chaque jour, se passionnant pour la « très intéressante » série israélienne Fauda. Une rencontre appelée à se répéter au cours de l’année, afin de commenter régulièrement l’actualité. « A votre disposition ! », nous dit le Président.


— Votre réaction au discours sur le « séparatisme », mot depuis devenu caduc ?

— Ce choix sémantique était stupide. Il ne correspond à aucune réalité géopolitique, si ce n’est qu’il voulait sans doute aggraver la perception du danger latent. Mais le danger n’est pas celui d’une partition, il est celui d’une conquête. Les gens qui sont là sont plus jeunes, ils font davantage d’enfants, ils sont plus disponibles aussi car ce sont généralement des oisifs, entretenus par des trafics divers – certains par le travail. Ils n’ont donc pas l’intention de s’en tenir à leurs quartiers. Quant au discours lui-même, il ne suffit pas d’annoncer des mesures pour qu’elles entrent en application et portent des fruits. C’est un travail de Romain que de mettre en route une politique de ce style. Il faut être possédé par la foi, or ce n’est pas la vertu principale de nos gouvernants. Ce discours se perdra dans les sables… du Sahara.

— Les « mineurs isolés » ou « non accompagnés » ont beaucoup fait parler d’eux.

— Cette histoire de « mineurs isolés » est une arnaque. A la base, il y a un trafic. Les bateaux pneumatiques qui transportent les migrants sont des bateaux professionnels, bien équipés, qui ne mettent pas en danger la vie des passagers. Ils lancent des appels à l’aide pour que ces « migrants » soient transférés sur des navires qui auront la possibilité d’entrer dans les ports européens. Un mineur de 16 ans, de nos jours, est organisé. Sauf si l’on considère que les Arabes sont des demeurés, ce qui n’est pas le cas : ils sont plutôt maluches. Je me souviens des cireurs de pompes tapant sur leurs petites boîtes, c’étaient des malins. Ceux qui mettent leurs enfants de 14 ou 16 ans dans ces bateaux savent qu’à l’arrivée ils seront pris en charge par les services sociaux de la République. La première des mesures à prendre serait la suspension de toutes les aides accordées aux mineurs. Ceux qui viendront quand même resteront sur le trottoir, jusqu’au moment où on les refoulera. Ce qui n’est pas évident, car il faut l’accord du pays dont ils viennent. Or beaucoup de pays sont soulagés d’exporter ces bouches inutiles. Dans un dîner avec des ministres marocains, j’avais suggéré que le Maroc reprenne ses migrants : « Jamais de la vie, m’avaient-ils répondu. Vous avez la racaille chez vous, gardez-la ! »

Les chiffrés clés sont ceux de la démographie mondiale. En cinquante ans, elle est passée de 2 à 8 milliards, multipliant par 4 tous les problèmes, dont certains étaient déjà dramatiques. D’où des situations conflictuelles internes graves, des débordements sur les pays voisins les plus faibles, l’arrivée vers l’Eldorado que serait l’Europe – l’Eldorado de la Méduse. Puisqu’il est difficile de renvoyer les gens chez eux, politique qui exige une diplomatie rigoureuse (ce qui n’est pas toujours le cas de la nôtre) et des accords avec les pays concernés, dissuadons-les de venir. Qu’ils sachent que, s’ils viennent sans autorisation, ils crèveront de faim. Rien aux immigrants illégaux. Pas une seule mesure, fût-ce humanitaire.

— Vous seriez donc plutôt zemmourien ?

— J’ai une grande affection pour Eric Zemmour dont j’admire non seulement la lucidité et les capacités intellectuelles, mais encore plus le courage. Je lui ai dit qu’il est imprudent. Il risque sa vie, à sortir seul dans les rues. Il défend des positions de bon sens… et de courage extrême dans la décadence lente que connaît notre pays. Parlant l’autre jour du pape et de l’encyclique Fratelli tutti, il était remarquable de clarté. Eric n’est pas catholique, je suis tenté de dire qu’il mériterait de l’être.

— La liberté d’expression est en danger ?

— « Tu as dit la vérité, saute sur ton cheval et cravache. » C’est un proverbe afghan. En France la liberté d’expression est strictement réservée à la gauche et à l’extrême gauche. On le sait depuis la Révolution : il n’y a pas de liberté pour les ennemis de la liberté. Il suffit de qualifier l’adversaire d’ennemi de la liberté pour qu’il n’ait plus celle de s’exprimer. C’est une situation que j’ai rencontrée à de nombreuses reprises au cours de ma vie politique. La seule manière de faire est d’imposer son discours, de prendre des risques qui sont souvent matérialisés par des procès, des condamnations, des amendes. Je viens de recevoir ma citation à comparaître pour mon histoire de « fournée ». Cela date de 2014 ! Les seules administrations qui ne sont pas touchées par le Covid sont l’administration pénale et l’administration fiscale, toujours prêtes à vous tomber sur le dos.

— Ce courage ne nous fait-il pas défaut ?

— Les gens sont soumis, dhimmis… Si vous résistez à une agression et que vous cassez un bras, vous allez en prison. Mais en se battant on sauve l’honneur, et on peut même parfois espérer la victoire. Le mâle blanc, combien de temps sera-t-il toléré ? Le savant ou le lutteur, aussi supérieur et pugnace soit-il, ne peut rien contre l’homme qui a un yatagan. J’ai peine à dire tout ça. D’abord parce que je me répète depuis des décennies. Ensuite parce que je me rends compte que la situation est redoutable. Je ne vois pas dans quel domaine les idées de la civilisation chrétienne ont progressé. Sur quel secteur de l’opinion s’appuyer pour opérer un redressement ? Avons-nous encore les qualités suffisantes, militaires, psychiques, spirituelles, qui ont fait notre force ? Le bon Dieu peut tout faire, lui.

— Le 4 octobre, le JDD a publié un sondage qui donne, à la présidentielle de 2022, Marine et Macron au coude à coude. L’échéance est lointaine, mais que vous inspire ce sondage ?

— J’éprouve de l’admiration et je ressens de l’espoir. Le Rassemblement national ne dispose plus des forces populaires qui avaient été organisées au sein du Front national. Ces forces ont été progressivement démantelées ou, en tout cas, négligées. Malgré cela, la seule présence médiatique de Marine et de ses lieutenants, pour peu qu’on les y invite, la met à égalité avec le président de la République – quelqu’un qui dispose de tous les moyens, politiques, financiers, médiatiques, judiciaires, fiscaux. Le pot de terre contre le pot de fer… et là, c’est le pot de fer qui se fêle. Ce que font Marine et le RN n’est donc pas négligeable, mais ce pourrait être mieux organisé, plus discipliné, parce que nous allons aborder une période de tempêtes. On ne peut les affronter avec des bateaux mal préparés et des équipages qui ne soient pas rodés à la difficulté. Tout s’apprend. Il n’y a que la mort qui ne s’apprend pas.

— Il ne manque pas de candidats, en tout cas de prétendants, pour 2022.

— Le nombre de gens qui s’en croient et qui s’engagent dans les élections présidentielles en croyant que leur passé leur vaudra des voix vont s’apercevoir qu’ils « valent » 1,3 %. Je pense à M. Pierre de Villiers : y a-t-il plus d’un pour cent de Français qui le connaissent ? Il s’agit d’un lent travail d’imprégnation, surtout quand vous êtes à contre-courant. Lorsque vous êtes porté, que les médias parlent de vous, comme ce nain du Nord, là, comment s’appelle-t-il…

— Xavier Bertrand ?

— Oui, Xavier Bertrand. Il lui manque la dimension physique. Quoi qu’il dise, elle lui fait défaut. Dans la cohue, les ordres passent mieux si on dépasse d’une tête. Xavier Bertrand est porté par les médias, il apparaît dans les sondages à une place qui n’est pas négligeable mais qu’il ne mérite pas, selon moi, au vu de sa position politique. Dans le brouhaha des événements ne surnageront que ceux qui ont une certaine dimension. Philippe de Villiers est occupé au Puy du Fou, avec raison car c’est une belle réalisation ; mais cela ne constitue pas un tremplin vers le pouvoir.

— Puisqu’on parle d’hommes et de pouvoir, parlons d’Erdogan et de la Turquie…

— Dans les années cinquante je naviguais sur les côtes turques. Pratiquement personne, dans la population, n’allait à la mosquée, sauf quelques vieilles dames. La Turquie a évolué en un demi-siècle. Elle est sortie de son engourdissement. Elle est aujourd’hui une force démographique considérable. 100 millions de Turcs, entourés de 150 millions de turcophones. Erdogan ne devrait pas se laisser pousser la petite moustache ni la mèche, qui pourraient l’entraîner à des débordements irréversibles. La dynamique ottomane ne s’est pas manifestée seulement en direction de l’Afrique du Nord. Elle s’est aussi exercée en Europe. La Bosnie, l’Albanie sont des traces de l’occupation ottomane de l’Europe. Nous sommes en face d’une même volonté de conquête, à ceci près que nous sommes plus faibles qu’au XVIIIe siècle. Le continent boréal, de Vladivostok à Gibraltar, est vaste mais dépeuplé. Notre civilisation décadente ne porte pas à l’expansion démographique, alors que le mot d’ordre d’Erdogan est : « La famille turque ce n’est pas trois enfants, c’est cinq au moins. » Les Turcs sont présents en Allemagne, en France. Différents des Arabes par l’ethnie et la culture, ils ont en commun avec eux l’unité de la langue de la prière. Tout le monde parle arabe. Il n’est donc vraiment pas nécessaire de développer l’enseignement de cette langue dans les écoles françaises… Enseigner le français serait plus sûr.

— Nous ne nous quitterons pas sans évoquer le Covid.

— Je demande la réouverture de l’hôpital du Val-de-Grâce comme hôpital spécialisé dans la lutte contre les épidémies. Nous connaissons actuellement une épidémie de petite dimension mais elle a déjà une envergure mondiale qui tient à la fois à l’explosion démographique et à la multiplication des transports. Nos hôpitaux normaux sont en quelques jours à la limite de la catastrophe. Nous devons nous préparer à des éventualités pathologiques gravissimes. Au lieu de cela nous avons fermé l’Hôtel-Dieu et le Val-de-Grâce… Il faut les rouvrir, les organiser, les spécialiser. Le Val-de-Grâce deviendrait une référence en matière d’épidémie. •

L’Institut Jean-Marie Le Pen

Cet institut voulu par le Président pour « faciliter aux chercheurs la vérité sur un mouvement national qui avait vocation à conquérir le pouvoir pour peu qu’il reste fidèle à sa ligne, ayant vu de loin la direction à prendre pour un avenir salvateur », se donne comme but de réunir en ligne les archives concernant le FN et Jean-Marie Le Pen (vidéos, photos, publications…). Nul doute que les lecteurs de Présent n’aient leur contribution à apporter ! Vous pouvez envoyer vos documents numérisés avec soin et circonstanciés, à cette adresse : [email protected]

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