C’est une proposition pour le moins surprenante qui a été relayée par le chef de l’anti-terrorisme britannique en juillet dernier: que la police arrête d’utiliser les termes « terrorisme islamiste » et « jihadistes ».
À la demande de l’association nationale des policiers musulmans (NAMP) qui compte plus de trois mille membres, le chef national du contre-terrorisme Neil Basu a soumis cette proposition lors d’un e-colloque rassemblant 70 victimes du terrorisme islamiste, des universitaires, des associations ainsi que des experts en sécurité intérieure.
« Un changement de culture en se détournant du vocabulaire qui aurait un lien direct avec l’islam et le jihad afin de faciliter les relations intra-communautaires et de rassurer le public », tel est le but de l’association qui se dit également inquiète de la montée de l’islamophobie et de la discrimination générées par les stéréotypes négatifs associés aux musulmans.
Alors comment qualifier les crimes commis par ceux qui se revendiquent de l’islam ? Et comment qualifier ceux qui commettent ces crimes ?
Alexander Gent, porte-parole de la NAMP, propose des alternatives comme « terrorisme de la foi revendiquée », « terroristes abusant des motivations religieuses », « les adhérents à l’idéologie d’Oussama Ben Laden » ou encore « Ir’habi » qui signifie « terroriste » en arabe littéraire.
Rizwan Mustafa, un ancien policier musulman devenu maître de conférence à l’université de Huddersfield, explique dans une note d’information que les musulmans qui travaillent dans le domaine du contre-terrorisme sont mal à l’aise avec l’utilisation des termes « islamisme » et « jihadiste » qui donneraient une image « péjorative, violente et belliqueuse de leur religion ». Ce constat est partagé par un chef religieux qui a déclaré à la fin du colloque « nous demandons aux autres de la responsabilité dans leur façon d’utiliser le mot islamisme ».
Sérieux problème
Interrogé sur la faisabilité de ces propositions, le porte-parole de la police britannique aurait confié qu’elles n’avaient pas de grandes chances d’aboutir. Et pour cause, comme le précise David Toube du think tank du contre-extrémisme Quilliam, « les gens n’aiment pas qu’on leur révèle des vérités à moitié… Il y a un sérieux problème avec le terrorisme islamiste. L’usage de tout autre mot qui masquerait ce fait risque de sérieusement endommager la confiance du peuple en la police ».
Alors que s’ouvre le procès de l’attaque de Charlie Hebdo, je me suis demandé comment l’on pouvait plaider devant le tribunal, dans le cadre d’affaires relevant du terrorisme islamiste, si ce changement de terminologie aboutissait un jour dans les institutions françaises.
« Cela viderait la poursuite de tout son sens. Un poulet sans tête, voilà à quoi cela ressemblerait. Le terrorisme est une action politique, un mode opératoire au service d’une cause politique. Si on ne peut pas nommer ladite cause, on ne pourrait pas établir le motif. Le terrorisme n’a de sens que parce qu’il est commis au nom d’une idéologie », m’a confié Maître Thibault De Montbrial, président du Centre de Réflexion sur la Sécurité Intérieure (CRSI) et avocat d’une des parties civiles au procès. Il ajoute que « de toute façon, cela ne serait pas possible en France à cause de l’article 41 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse qui se veut garant de ce que l’on appelle par commodité l’immunité de robe ou l’immunité de plaidoirie pour les avocats ». Me voilà rassurée.
Largesse d’esprit
Les Britanniques ont fait preuve d’une grande largesse d’esprit en prenant le temps de considérer une demande aussi aberrante. Auraient-ils été aussi compréhensifs si une association avait par exemple proposé de remplacer « islamisme » par « islam » ?
Ce qui reste certain, c’est qu’un islamiste tentera toujours et par tous les moyens de déresponsabiliser sa religion. Il se victimisera afin que l’on dédouane le dogme auquel il croit de tous les crimes commis en son nom. Il ira jusqu’à tenter de nous interdire de prononcer le mot islam afin de réduire toute possibilité de critique et de réforme en vue d’une assimilation aux lois, aux us et aux coutumes du pays qui l’accueille.
C’est grâce à la critique et à l’humour que le catholicisme et le judaïsme ont été réformés. À quand le tour pour l’islam ?
Dans un entretien accordé au Figaro, la journaliste et essayiste Zineb Elrhazoui, rescapée des attentats de Charlie Hebdo, rappelle à juste titre comment elle aborde le procès qui s’ouvre ce mercredi : « J’aborde ce procès en constatant avec amertume une grande absente au banc des accusés : l’idéologie qui a conduit à cet attentat. Il n’est pas possible de considérer les crimes terroristes comme des crimes de droit commun. Il me tient donc à cœur qu’il soit dit que cet attentat n’est pas un crime de droit commun mais un crime politique et idéologique. Quel fut son mobile ? La foi en Allah des attaquants (qui ont crié d’ailleurs « Allah Akbar » en arrivant, ce qui veut dire qu’Allah est plus grand que vous, plus grand que tout, la grandeur absolue). »
Mettre l’islam sur le banc des accusés n’est pas pour demain tant les espaces médiatique et public sont tétanisés par la peur et gangrénés par le relativisme culturel.
Pour l’heure, le combat consiste à se soulever contre sa composante militante qui s’acharne sans relâche à nous arracher toujours un peu plus de parts de notre liberté d’expression, quand elle ne va pas jusqu’à réclamer la tête de notre liberté de penser. Commençons par bien nommer les maux qui nous rongent… et recommençons à blasphémer si cela nous chante, afin d’honorer la mémoire de ceux qui sont tombés pour que l’on continue de pouvoir le faire.
source: https://www.causeur.fr/royaume-uni-ne-dites-plus-terrorisme-islamiste-181231
LA NOVLANGUE dans 1984 d'Orwell
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