Correspondant permanent aux Etats-Unis. – La CIA est sur les dents, le FBI a rappelé ses vacanciers, la Maison Blanche ressemble – très discrètement – à un camp retranché, on a renforcé, à Washington, la sécurité autour des ambassades des pays du Moyen-Orient alliés des Etats-Unis, partout dans le monde les bases américaines se trouvent en état d’alerte permanente et, détail qui peut paraître ahurissant : pour la première fois depuis de longs mois, le problème de la destitution du président Donald Trump ne figure plus à la une des principaux quotidiens du pays. Il est remplacé par une seule question : quelles cibles américaines les autorités iraniennes vont-elles choisir pour venger la perte du général Qasem Soleimani, deuxième personnage du régime, patron des Gardiens de la Révolution et de leur fer de lance, le Qud. Un drone américain l’a tué avec dix autres militaires iraniens – certains de haut rang –, la semaine dernière, au nord de Bagdad. Et depuis, les mollahs ont juré de faire payer très cher à l’Amérique ce qui est à leur yeux bien davantage qu’un coup au but : un insupportable affront, une terrible humiliation.
Depuis trois ans que Trump est au pouvoir, tout paraît bon à la gauche pour critiquer, rejeter ce qu’il fait, ce qu’il dit et ce qu’il pense. L’« affaire Soleimani » – car c’en est une – était une occasion trop belle pour la laisser s’échapper. Tous les ennemis du régime, regroupés au sein d’une énorme orchestration, ont, non seulement pris le deuil d’un homme qui menaçait l’Amérique après lui avoir tué plus de 600 de ses soldats, mais condamné Trump en assimilant sa décision de commandant en chef à un acte criminel.
A la Chambre des représentants – celle qui vient d’inculper Trump dans la « mascarade » ukrainienne – la présidente Nancy Pelosi veut officiellement blâmer la Maison Blanche pour « sa réaction provocante, disproportionnée et illégale, selon les lois internationales ». De son côté, Adam Schiff, le procureur « soviétique » du « cirque » ukrainien, exige des auditions publiques sur ce drame tandis que l’extrême gauche démocrate – de plus en plus bavarde et venimeuse – clame que Trump cherche à en découdre avec les mollahs et que dans les grandes villes du pays des pancartes protestataires affirment que la troisième guerre mondiale a pratiquement déjà commencé.
Trump avait toutes les raisons de répondre « OK, allez-y » lorsque le Pentagone lui a dit : « Nous tenons Soleimani dans notre ligne de mire. » D’abord, ce général était un terroriste, un tueur, un saboteur qui avait un fleuve de sang américain sur les mains et dont le seul objectif consistait à torpiller la présence ou l’influence des Etats-Unis partout dans le monde. Par définition, ce prédateur était la cible privilégiée d’un national-populisme, vigilant et protecteur. Ensuite, les rapports des services de renseignements mentionnaient depuis plusieurs années le rôle clé que pouvait jouer Soleimani en cas de graves émeutes contre le régime théocratique. Il est l’un des rares – peut être le seul – soulignaient-ils, à pouvoir dompter la rue et défendre le régime avec quelques chances de succès. Il était logique de faire sauter ce verrou dans la perspective de négociations avec Téhéran : étourdir les « durs » et montrer sa force.
Enfin, Trump avait deux autres bonnes raisons, moins avouables celles-là, de lâcher un drone sur Soleimani. Obliger les médias à oublier, pour un moment, le misérable processus de destitution afin d’en obtenir d’amples commentaires, mais cette fois sur un terrain flatteur pour un chef. Et, lorsqu’un président américain se représente devant les électeurs, il n’est jamais mauvais pour son image de faire un tour de piste avec des allures de cow-boy. •
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