Victoire à la Pyrrhus de la droite hellène

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A vrai dire, on ne sait pas si le résultat est une plus défaite de l’extrême gauche ou une victoire de la droite. Toujours est-il que le résultat est net. 39,7 % des suffrages pour Kyriákos Mitsotákis, contre 31,4 % pour Aléxis Tsípras. Soit 158 des 300 sièges du Parlement. Les élus l’ont été sans le peuple, si l’on ose dire, parce que 42,08 % des électeurs se sont abstenus. La droite n’a pas vraiment de quoi pavoiser : comme en France en 2012, les électeurs n’ont pas voté pour qui que ce soit, mais bel et bien contre. Kyriákos Mitsotákis est une caricature de politique, un peu comme Alain Juppé ou Jean-Pierre Raffarin, quoiqu’un peu plus jeune. C’est le fils d’un ancien Premier ministre, dynastie congédiée en 2015 par la porte et qui rentre par la fenêtre. Les Grecs sont lucides : ils ont voté par dépit et ne s’attendent pas à grand-chose.

Lorsqu’il est élu en janvier 2015, Aléxis Tsípras incarnait un immense espoir, pour la Grèce mais aussi pour toute l’extrême gauche européenne. Celui que le pouvoir leur était accessible, et que leur voie politique était praticable. La Grèce était alors exsangue. Croulant sous le poids de sa dette, le pays hellène était en pleine politique d’austérité. Tenu à la gorge par le FMI et l’UE, les deux menaçant sans cesse de serrer le nœud coulant. Dans cet enfer social et ce contexte de honte nationale, le panache d’Aléxis Tsípras l’a porté aux affaires. Bravache, provocateur, insolent, il promettait d’envoyer paître les institutions internationales. Quelques mois plus tard, il cédait à son tour aux pressions financières, et avalisait l’austérité. La déception était à la hauteur de l’espoir : immense. La trahison de Tsípras du référendum sur l’austérité était comparable à celle de Nicolas Sarkozy sur la Constitution européenne. Les électeurs ne lui ont pas pardonné. Aléxis Tsípras s’est avéré être un agent zélé pour faire adopter à son pays les réformes bruxelloises fiscales et normatives.

Pour ne rien arranger, la situation économique du pays n’a absolument pas progressé. Le très léger rebond de la croissance n’a rien arrangé en raison de la forte baisse du PIB désormais fantôme. Le chômage baisse, c’est vrai ; pas parce que le marché de l’emploi se déverrouille mais bien parce que les forces vives du pays le quittent. Les travailleurs s’expatrient, emportant savoir-faire et énergie. L’UE a exigé, Tsípras l’a fait : l’hôpital public est démantelé, les infrastructures de transport vendues, l’enseignement n’a plus d’argent. Les Grecs ruinés, en incapacité de rembourser leur dette, se voient saisir leurs logements.

L’argent a encore eu le dernier mot

L’extrême gauche de Syriza a donné le coup de pied dans le dos à un pays au bord du gouffre. Il n’y a plus de classe moyenne en Grèce : le pays est fractionné entre une petite minorité s’enrichissant sur le commerce international et le tourisme de masse, une classe s’en sortant avec grande difficulté à coups de sacrifices immenses et un travail acharné, et une classe désœuvrée, sans espoir aucun et dans la misère totale.

Le programme de Kyriákos Mitsotákis est relativement simple : baisser les taxes pour favoriser l’embauche, et remettre son pays au travail. L’expérience Syriza a été possible parce que Tsípras avait mobilisé loin des frontières traditionnelles de son électorat, en promettant un sursaut d’orgueil national. Au moins Kyriákos Mitsotákis ne promet rien. S’il n’arrive à rien, personne ne pourra lui en vouloir ! •

Benoît Busonier

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