La Chaux de-Fonds : L'avenir du Musée des civilisations de l'islam en question .
Source et auteur : Par Luc-Olivier Erard
Culture Le retrait du financement du Qatar mettrait en péril l’avenir du Musée des civilisations de l’islam de La Chaux-de-Fonds. Mais le projet immobilier qui devait financer l’institution à long terme est toujours sur les rails, assure son promoteur.
Inauguré en 2016 et situé au 109 de l’avenue Léopold-Robert, le Musée des civilisations de l’islam (Mucivi) est-il en sursis? C’est ce que laisse entendre une enquête de la RTS, affirmant que la Fondation Qatar Charity, qui a partiellement financé l’institution, a cessé ses subventions. Un projet immobilier, évalué à 22 millions de francs, devait permettre de financer par la suite le fonctionnement du Mucivi. Il serait lui aussi menacé, selon le média de service public.
Démenti de l’architecte Ziad Kazan
La position du Qatar (lire l’encadré) menace-t-elle l’avenir du musée, propriété de l’Institut culturel des musulmans de Suisse? Sa directrice, Nadia Karmous, n’a pas répondu à nos sollicitations. Olivier Schinz, qui a réalisé en indépendant la muséographie du Mucivi, met en doute l’information de la RTS: «A ma connaissance, la Fondation Qatar Charity a été sollicitée par la directrice du musée sans succès», assure-t-il, lui qui est aussi employé à 50% par le Musée d’ethnographie à Neuchâtel (MEN) en tant que conservateur adjoint.
Selon lui, ce sont des dons qui assureraient le fonctionnement actuel du musée. «A terme, pour qu’il devienne un espace plus vivant avec des conférences et des surfaces d’exposition plus conséquentes, il faudrait pouvoir compter sur le projet immobilier», estime Olivier Schinz.
Son promoteur, l’architecte lausannois Ziad Kazan, oppose, lui aussi, «un démenti formel et catégorique» aux affirmations de la RTS. Non, les 57 logements ne sont pas menacés, affirme-t-il: «Les démarches en vue du permis de construire suivent leur cours et la construction démarrera lorsque le quota de logements acquis sera suffisant.»
Les fonds en question
Ce projet avait suscité une certaine émotion dans les Montagnes en raison de son caractère communautaire, puisqu’il prévoit un espace de prière et une piscine aux horaires non-mixtes. L’ensemble doit aussi permettre l’agrandissement des surfaces d’expositions temporaires.
L’architecte l’assure, «il n’a jamais été question de financement de ce projet par des fonds étrangers, cette information est fausse». «L’acquisition de logements par des étrangers est encadrée par la loi. Il est donc possible que des mécènes, y compris étrangers, en acquièrent», précise-t-il toutefois.
Dans nos archives: Le musée sur l’islam inquiète des députés neuchâtelois (27.04.2016)
En charge de l’urbanisme dans la Métropole horlogère, le conseiller communal Théo Huguenin-Elie indique en substance que la Ville n’est pas impliquée dans le projet et que son rôle se limite à la procédure pour le permis de construire. Il rappelle que l’origine des fonds est l’affaire d’institutions fédérales, notamment de la Finma (autorité de surveillance des marchés financiers).
Une fondation associée au projet immobilier
La procédure communale suit d’ailleurs son cours. Le site d’information géographique du canton indique les parcelles jouxtant le Mucivi comme étant en voie de mutation, c’est-à-dire de changement de propriétaire.
Les époux Karmous, à l’origine du Mucivi, sont-ils encore impliqués dans ce projet immobilier, eux qui auraient permis l’arrivée des fonds qataris controversés et d’autres dons pour ouvrir le musée? Ziad Kazan indique que le bureau Kruger et Kazan qu’il dirige planifie le projet immobilier en partenariat avec la Fondation d’œuvres à rayonnement socioculturelles (Fors), dont Mohamed Karmous et Ziad Kazan font partie. Le financement de cette structure, dont les membres du conseil sont établis dans différentes villes suisses, n’est pas connu.
«Le Qatar se fait plus discret»
Contacté par «ArcInfo», Christian Chesnot, journaliste au «Figaro» et coauteur, avec Georges Malbrunot, de «Qatar Papers: comment l’émirat finance l’islam de France et d’Europe», n’est pas surpris par l’annonce du retrait des Qataris du financement des projets chaux-de-fonniers. «Depuis la crise avec ses voisins, qui a émergé en 2017 [réd: et qui a vu les Etats du Golfe imposer un embargo au Qatar, l’accusant de soutien au terrorisme], les investissements du Qatar en Europe se font plus discrets ou plus modestes».
Cette tendance pourrait se renforcer à l’approche de la Coupe du monde de foot, que le Qatar se prépare à accueillir en 2022. Une perspective qui inciterait l’émirat à faire profil bas, estime l’auteur. Mais il précise aussi que dans certains cas, comme celui de la mosquée de Sheffield (Royaume-Uni), le principal bailleur de fonds, Qatar Charity UK, a juste changé de nom. «Les investisseurs du Qatar sont aussi des as de la dissimulation», avance-t-il.
Merci à J.-P. H.
Nadia Karmous, passionaria des Frères Musulmans, porte drapeau du fan-club de Tarik Ramadan, on pourrait ainsi multiplier les clins d’œil complices aux fanatiques religieux. Pourquoi donc cette sulfureuse créature n’irait-elle pas exercer ses talents dans un de ces merveilleux pays islamiques ? Imposteur ne s’écrit pas au féminin, mais l’imposture lui va comme un gant.