par Burak Bekdil, 24 mars 2019
Traduction du texte original: Turkey: Putin's Ally in NATO?
- Le 7 mars, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a déclaré que la Turquie ne renoncerait pas à l'accord de livraison de missiles russes S-400. Il a même ajouté qu'Ankara envisageait d'acquérir les S-500 de prochaine génération.
- En achetant des S-400, la Turquie dit clairement à ses alliés occidentaux que ce sont « eux » et « pas la Russie » qui représentent une menace pour sa sécurité. Étant donné que la Russie continue d'être perçue comme une menace pour la sécurité de l'OTAN, le jeu singulier de la Turquie pose la question de son maintien dans l'OTAN.
- La Turquie, deuxième force militaire de l'OTAN, mène un jeu de séduction militaire avec la Russie. Cette histoire d'amour n'en est qu'à ses prémices, mais n'en mine pas moins la capacité dissuasive de l'OTAN vis-à-vis de la Russie.
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En avril 2009, des militaires de haut rang turcs et syriens ont franchi la frontière pour visiter de concert des avant-postes à l'occasion d'exercices militaires conjoints. Pour la première fois, une armée de l'OTAN manœuvrait en commun avec l'armée syrienne de Bashar al-Assad.
En septembre 2010, des avions de combat turcs et chinois se sont livrés à des exercices conjoints dans l'espace aérien turc. Là encore, pour la première fois, une force aérienne de l'OTAN a manœuvré en commun avec la Chine.
En 2011, un sondage du German Marshall Fund sur la perception des relations transatlantiques (Transatlantic Trends) a révélé que la Turquie était le pays-membre de l'OTAN qui affichait le plus faible soutien à l'alliance : 37% d'opinions positives seulement (contre 53% en 2004).
En 2012, la Turquie a rejoint l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS, une organisation intergouvernementale régionale dont les membres sont la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l'Ouzbékistan) en tant que partenaire de dialogue.
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En septembre 2013, la Turquie a annoncé qu'elle avait choisi une société chinoise (CPMIEC) pour la construction de son premier système de défense aérienne de longue portée et anti-missile dans le cadre du programme T-LORAMIDS. Ce contrat d'une valeur de 3,5 milliards de dollars a été annulé, mais Erdoğan s'est alors tourné vers le président russe Vladimir Poutine pour équiper son pays du système de défense antiaérienne et antimissile à longue portée S-400.
Malgré une pression croissante des Etats-Unis, des Européens et de l'OTAN, Erdoğan refuse de renoncer à son projet d'architecture de défense aérienne russe et défend hardiment le droit de la Turquie « à une décision souveraine ». [...]
Washington a averti son allié à temps partiel au sein de l l'OTAN que l'accord avec la Russie aurait « de graves conséquences ». Selon CNN :
« L'acquisition des S-400 aura de graves conséquences pour la Turquie» a déclaré Charles Summers, porte-parole du Pentagone, le 8 mars devant la presse. Pareille décision a-t-il ajouté est de nature à ébranler les relations militaires américaines avec Ankara.
Summers a affirmé que parmi les conséquences possibles, les États-Unis ne vendraient pas le F-35 à la Turquie et ne lui permettront pas non plus d'acquérir le système de défense antimissile Patriot.
La Turquie, membre du consortium international dirigé par les États-Unis qui construit le chasseur de nouvelle génération F-35 Lightening II, s'était engagé à acheter plus de 100 appareils.
Le choix de la Turquie en faveur de la Russie (et contre l'OTAN) aura sûrement des répercussions à plusieurs niveaux. [...]
La Turquie, deuxième puissance militaire de l'OTAN, mène un jeu de séduction avec la Russie. Cette histoire d'amour militaire n'en est sans doute qu'à ses prémices, mais n'en mine pas moins la capacité dissuasive de l'OTAN vis-à-vis de la Russie. Une rupture au sein d'une alliance militaire qui prévoit qu'une « attaque contre l'un » des membre de l'OTAN « sera considérée comme une attaque contre eux tous » serait le plus beau des cadeaux fait à la Russie.
Burak Bekdil, un des plus célèbres journalistes turcs, a récemment été limogé du plus important journal du pays, après 29 ans de bons et loyaux services, pour avoir écrit des articles sur l'actualité turque pour Gatestone. Il est Fellow du Middle East Forum.
Et vous, qu'en pensez vous ?