Roumanie : Les failles et les zones d’ombre de l’unité nationale

18 décembre 2018, Thibaud Cassel.

Partie 1/3 ici ! – 2/3 – Reportage exclusif en Roumanie

De Bucarest à Alba Iulia, on célèbre le 1er décembre l’union de « la plus grande Roumanie », union qui autorise bien des détournements en son nom. Quelles leçons tirer des célébrations officielles d’un côté, d’animations culturelles et de la liesse populaire d’un autre, et enfin de la manifestation contestataire des libéraux de #Rezist ?

Ce que dit une parade militaire

Le samedi 1er décembre, la foule se presse, compacte, dans le métro à destination de la station Aviatorilor. La place Charles de Gaulle se trouve à deux pas. S’y dresse un arc de triomphe, plus petit et plus dépouillé que son modèle parisien : c’est l’endroit le plus couru pour suivre la parade militaire. L’assistance est considérable, jeune et familiale en dépit des – 8°C affichés au thermomètre. Les enfants tiennent dans leur petit poing serré des drapeaux roumains. Une véritable réjouissance publique se prépare, au point que le dispositif de sécurité aux abords de l’arc de triomphe semble incongru ; mais les gens s’en accommodent sans humeur.

Le président Klaus Iohannis prononce un bref discours à 10h, puis l’hymne national est entonné alors que se succèdent des coups de canons : cérémonial assez simple et sans prétention aux yeux d’un Français. Les références à la « grande nation » ne se limitent pas à la place de Gaulle : la musique militaire est d’une tournure très française, les uniformes également. Le défilé a quelque chose d’un spectacle populaire et provincial. Les têtes d’ogives qui descendent vers la place de la Victoire ne semblent dangereuses que dans la mesure où c’est une force extérieure qui en commande l’usage aux Roumains – et ils achètent fort chers ces hochets de leur souveraineté limitée. L’armée a l’air d’une curiosité dont on se rappelle l’existence une fois l’an. Hors le cadre un peu parent de l’Europe orientale, tout autre est le défilé du 9 mai à Moscou. Je me souviens de la fièvre populaire, de l’ardeur martiale avec laquelle la foule acclamait les avions qui pavoisaient le ciel aux couleurs nationales. Combien les cadets semblaient exprimer le dévouement guerrier de tout l’empire. Le défilé était le décalque en arme de la Russie tout entière ; il est ici le masque roumain de l’empire américain.

Véhicule blindé défilant lors du 1er décembre 2018 à Bucarest. Photo : Thibaud Cassel

Être patriote comme on fait de la prose

La patience coutumière de la Roumanie sous l’empire du moment ne fait donc pas défaut. L’envers du décor, beaucoup plus réjouissant, m’apparaît dans la bodega où je me réchauffe. L’ambiance est populaire, légère et festive. On y arbore les couleurs nationales avec une débonnaireté qui n’a rien de national, au sens moderne et politique du terme. C’est une expression aussi simple et nécessaire que la politesse. Cette simplicité s’apparente à une primitivité sans artifice, aux antipodes de tout sentiment recuit, de toute vindicte ; à croire que la fibre nationale n’ait jamais connu ici son moment romantique. Un ami m’assure qu’en Roumanie la transcendance est réservée aux popes. Presque peut-on dire que la politique y est un commerce comme un autre. On comprend alors l’ineptie d’un libéral, essayant de subvertir les Roumains par des « mobilisations citoyennes ». Ils n’ont rien de ce que les Français s’inoculent depuis trois siècles ; et trois siècles c’est un monde. On peut voler le Roumain, mais le persuader de ce qui lui est étranger, cela semble heureusement un objectif inatteignable dans les délais dont dispose le libéralisme en crise.

En face du palais royal de Bucarest, qui accueille à présent le musée d’art national, de grands pavillons bâchés abritent une exposition sponsorisée par la mairie de Bucarest à l’occasion du centenaire de la Roumanie moderne. « 100 inventions en 100 ans » expose les trouvailles et les savants roumains du siècle écoulé. Des biplans sont exposés non loin des groupes d’adolescents se prêtant à des animations tout droit sorties de « C’est pas sorcier ». Dans une salle attenante se déroulent des interventions accessibles aux enfants.

Une jeunesse indécise et sceptique

Le président de l’ONG en charge de l’organisation se prête volontiers à un entretien. Liviu, à peine trentenaire, est aujourd’hui assez détaché de la politique : le but de ces animations gratuites, c’est d’offrir à la jeunesse l’estime de son histoire et une meilleure culture scientifique. Pour une jeunesse à la fois curieuse et enracinée, ni chauvine ni intellectuelle. Les débats partisans l’agacent, aucun parti ne trouvant grâce à ses yeux et d’ailleurs : les Roumains n’attendent guère d’eux, sinon un peu de retenue dans la façon d’abuser de leur situation. La postérité de Ceaușescu se retrouve dans tous les partis, et pas seulement dans le Parti social-démocrate (PSD) au pouvoir. Liviu m’affirme que le mouvement #rezist, qui appelle à manifester aujourd’hui, est perçu comme un mouvement artificiel, et sa rhétorique creuse ne fait plus recette. Nous rappelons que ce mouvement fait l’objet de toute l’attention du Visegrád Post, notamment ici et ici.

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source: Wikipedia

Population of Romania according to ethnic group 1948–2011
Ethnic
group
census 19481 census 19562 census 19663 census 19774 census 19925 census 20026 census 20117
Number % Number % Number % Number % Number % Number % Number %
Romanians 13,597,613 85.7 14,996,114 85.7 16,746,510 87.7 18,999,565 88.1 20,408,542 89.5 19,399,597 89.5 16,792,868 88.9
Hungarians 1,499,851 9.4 1,587,675 9.1 1,619,592 8.5 1,713,928 7.9 1,624,959 7.1 1,431,807 6.6 1,227,623 6.1
Roma 53,425 0.3 104,216 0.6 64,197 0.3 227,398 1.05 401,087 1.8 535,140 2.5 621,573 3.0
Ukrainians 37,582 0.2 60,479 0.4 54,705 0.3 55,510 0.3 65,764 0.3 61,098 0.3 50,920 0.2
Germans 343,913 2.2 384,708 2.2 382,595 2.0 359,109 1.6 119,462 0.5 59,764 0.3 36,042 0.2
Turks 28,782 0.2 14,329 0.2 18,040 0.1 23,422 0.1 29,832 0.1 32,098 0.2 27,698 0.2
Tatars 20,469 0.2 22,151 0.1 23,369 0.1 24,596 0.1 23,935 0.1 20,282 0.1
Russians 39,332 0.2 38,731 0.2 39,483 0.2 21,206 0.2 7,983 0.1 35,791 0.2 23,864 0.1
Lipovans 11,090 0.1 30,623 0.2
Serbs 45,447 0.3 46,517 0.3 44,236 0.3 34,429 0.2 29,408 0.1 22,561 0.1 18,076 0.1
Croats 7,500 0.0 4,085 0.0 6,807 0.0 5,408 0.0
Slovenes 175 0.0
Slovaks 35,143 0.2 23,331 0.2 22,151 0.1 21,286 0.1 19,594 0.1 17,226 0.2 13,654 0.1
Czechs 11,821 0.0 9,978 0.0 7,683 0.0 5,797 0.0 3,941 0.0 2,477 0.0
Bulgarians 13,408 0.1 12,040 0.1 11,193 0.1 10,372 0.0 9,851 0.1 8,025 0.0 7,336 0.0
Greeks 8,696 0.1 11,166 0.0 9,088 0.0 6,262 0.0 3,940 0.0 6,472 0.0 3,668 0.0
Jews 138,795 0.9 146,264 0.8 42,888 0.2 24,667 0.1 8,955 0.0 5,785 0.0 3,271 0.0
Poles 6,753 0.0 7,627 0.0 5,860 0.0 4,641 0.0 4,232 0.0 3,559 0.0 2,543 0.0
Armenians 6,987 0.0 6,441 0.0 3,436 0.0 2,342 0.0 1,957 0.0 1,780 0.0 1,361 0.0
Macedonians 1,176 0.0 6,867 0.0 731 0.0 1,264 0.0
Csangos 1,266 0.0 1,536 0.0
Aromanians 982 0.0 21,736 0.1
Others/undeclared 15,897 0.1 17,522 0.1 6,990 <0.1 5,731 <0.1 9,368 <0.1 28,303 0.1 23,741 0.1
Undeclared 1,236,810 6.14
Total 15,872,624 17,489,450 19,103,163 21,559,910 22,810,035 21,680,974 20,121,641
1 The results of the 1948 census are according to language. 2 Source: [13]. 3 Source: [13]. 4 Source: [13]. 5 Source: [13]. 6 Source: [14] 7 Source: [15]

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