Les loups ont envahi Paris...

 Autrefois les Barbares prenaient Rome, mettaient Byzance à sac, aujourd’hui ils s’en prennent aux Champs Elysées, au Fouquet’s ou à Christian Dior.. .Si l’on en croit les oiseaux de mauvais augure, cela devrait encore « castaner » grave ces prochains jours, offrant une fois de plus aux professionnels de la guérilla urbaine, l’occasion de tout casser. Pendant ce temps là, bien au chaud dans ses certitudes lénifiantes en attendant le « grand soir », la cléritude germanopratine vaticine, mollassonne sur les plateaux de télévision, où elle somnole d’un œil vaguement inquisiteur. Entre les flatulences néostaliniennes d’un BHL, nouveau philosophe sur le retour ou les « humeurs » clochemerlesques d’un Cohn Bendit, en mal de remake soixante hui tard…En mai 68, ils voulaient refaire le monde, aujourd’hui ils pensent plutôt à refaire leur cuisine ou leur salle de bains…ou le plein de leur limousine pour partir en week-end sur la route du Touquet ou de  Honfleur

Dans les lupanars cathodiques de l’agitation politique, nos appariteurs socialos-bobos ressemblent de plus en plus à des « indics » de police, ou au mieux à des indicateurs de chemin de fer. Entre deux tirades paranoïaques sur un complot de l’ultra droite, ils versent volontiers une larme nostalgique sur tous les trains de l’Histoire qui leur sont passés sous le nez. Même les imprécateurs patentés de la classe politique, à gauche comme à droite, ne savent plus à quelle couleur de gilet  se vouer et se couchent, dans l’attente d’illusoires tsunamis dans les urnes...Peu importe si le navire prend l’eau de toutes parts et que les électeurs se jettent par dessus bord. Sauve qui peut. « Le premier qui dort, réveille l’autre… » avait prévenu le génial Jean-Edern Hallier disparu trop tôt. Mais les âmes fortes ne meurent jamais longtemps.

Dans notre Alsace aseptisée, consensuelle, ankylosée, hormis Martin Graf, Pierre Kretz, Louis Schittly ou René Ehni, et les militants d’Unser Land et de son  combat pour notre identité,  il y a peu de place pour des voix discordantes, sauf pour les enfumer, dans une soumission résignée. Observateur vigilant de nos renoncements, Frère Médard,  avec son franc-parler et ses sourcils ombrageux, nous manque cruellement…Le paysan de Hipsheim savait se lancer dans de saintes colères qui faisaient trembler les murs de l’évêché et les certitudes émasculées de nos politiciens attitrés. « Weisch Beu, es sin alles Hosseschisser ! » m’a-t-il confié un jour place St Etienne, à la table ouverte qu’il partageait avec un autre rebelle du Val de Villé, l’universitaire Julien Freund, dont la devise radicale claque comme un étendard rot un wiss, rouge et blanc :« Sachons être suspects. C’est le signe d’un esprit libre et indépendant ».

Et  nous sommes quelques uns à se dire qu’il y a urgence, que l’on n’a plus rien à perdre, que l’on ne peut plus écrire comme avant. L’arbre bourgeonne, la colline se couvre de neige, la cordée se fait plus raide, le chemin plus étroit, l’arrête plus solitaire. Sans doute avançons-nous dans le vide, vers la tanière des loups de Serge Reggiani. Entre Vosges et Rhin, sous le couvert d’une fausse morale, du politiquement correct, des idéologies du prêt-à-penser, de l’unanimisme franco-français, il n’y a plus de chemins de traverse, ni de moutons encore moins de loups  noirs,…Même Tomi Ungerer est rentré dans le rang, moins caustique, depuis qu’il a eu son bändele de commandeur de la Légion d’Honneur et qu’il a de son vivant un musée à sa gloire. Ces temps nous déconcertent ! Le troupeau est repu, la soupe est bonne.  « Mange ta choucroute et tais-toi.. » écrivait l’ami Martin…  Que sont nos empêcheurs de penser en rond devenus ? « Cessez de rire charmante Elvire, autrefois les Barbares mettaient Byzance à sac, aujourd’hui « les loups ououh! de Serge Reggiani ont envahi  Paris Soit par Issy, soit par Ivry Les loups ont envahi Paris…Attirés par l'odeur du sang Il en vint des mille et des cents Faire carouss', liesse et bombance Dans ce foutu pays de France Jusqu'à c'que les hommes aient retrouvé L'amour et la fraternité... »

José Meidinger, 9.12.2018