Dame Faucheuse fait son marché ces temps-ci. L’acteur italien Enrico Venantino Venantini est mort le 9 octobre à Viterbe, en Italie. Destin paradoxal : alors que tant de jeunes hommes sont monté à Paris (souvent en vain) pour devenir acteur, lui le fut de manière tout à fait accidentelle. En effet, il se destinait à une carrière de peintre et s’installa à Paris pour cela. Pour financer ses études, il accepta de faire de la figuration dans plusieurs films dont Quo Vadis et Ben Hur.
En 1963, Georges Lautner adapte dans une coproduction franco-germano-italienne le roman Grisbi or not grisbi, qui deviendra le cultissime Les Tontons flingueurs, film massacré alors par la critique de gauche (pléoasme). Il y jouera Pascal, le porte-flingue de Louis le Mexicain, loyal et compétant, mais avec un code de l’honneur lui interdisant de tuer un membre de sa famille, à savoir son cousin Bastien, première gâchette du clan Volfoni. Mais qui cherche le trouve : quant à la distillerie de Théo lui et Bastien tombent sur Tomate qui n’avait pas à être là, ils préviennent Fernand qui s’inquiète : Tomate a-t-il donné les raisons de sa présence. « Bien sûr ! » répondent les deux sicaires en éclatant de rire. Et la caméra fait un gros plan du cadavre de Tomate et d’un poêle ouvert, charbons ardant bien visibles, laissant supposer que Tomate a été torturé pour parler… « L’esprit fantassin se perd, c’est un tort ! », commente-t-il après avoir abattu dans leur voiture des tueurs à la solde de Théo venus les mitrailler lui et Fernand dans le parc du cercle de jeux de Tomate alors que, selon Pascal, ils auraient eu leur chance embusqués dans les buissons. De même, on les voit arriver en retard à la messe de mariage entre Patricia et Antoine, entrant dans l’église juste après une énorme explosion : ils venaient de faire exploser la voiture de Théo et de son giton.
Un an plus tard, il tient le rôle du méchant dans Le Corniaud, à savoir Mickey (surnommé ainsi à cause de son porte-clé Mickey Mouse), dont la principale caractéristique est de bégayer. Avec là aussi une phrase culte : évoquant le pauvre Antoine Maréchal et apprenant qu’il ne sait rien de la cargaison de la Cadillac, il le plaint : « Pauvre gars, j’espère qu’on ne sera pas obligé de le dé..dé..dé…
– De le dérouiller ? (Mario, le garçon de restaurant)
– Non, de le descendre. A la chasse, on tire aussi bien le faisan que le pigeon ».
Notons que le générique du Corniaud plonge dans une intense mélancolie matinée de rage, quand on voit la ville merveilleuse qu’était Paris à l’époque, comparé au cloaque crasseux qu’elle est devenue de par sa mairesse, la sépharade Anne Hidalgo, montrant que la féminisation des élites entraîne en effet un renouvellement… pour le pire).
On le verra également jouer le marquis Del Basto, Grand d’Espagne comploteur dans La Folie des Grandeurs, et, pour rester dans les conspirateurs, le capitaine Enrique dans Le Grand Restaurant, chef de la sécurité du Président (dictateur ?) Novales et chef de la conspiration militaire visant à le renverser (avec là aussi, une scène culte où lui, simple « trois galons » hurle après des généraux l’appelant en tremblant « mon capitaine »). Avec la mort de Venantino Venantini, c’est tout une page qui se tourne et le livre d’une période – somme toute heureuse – qui s’achève…
Hristo XIEP
Extrait de: Source et auteur
Ça fait un bout de temps que cette époque bénie s’en est allée. Ce qui rend d’autant plus triste la disparition de ses témoins.
“…..Le Mexicain l’avait achetée en viager à un procureur à la retraite. Après trois mois, l’accident bête. Une affaire……”
Venantino s’en est retourné à la maison mère, au terminus, rejoindre Lino et Bernard.
Il avait une présence apaisante… Pour nous, les vieux, c’est une époque qui part dans les limbes. Peut-être redécouvrira-t-on ces acteurs d’un autre temps, quand il n’y aura plus de gauchistes ? C’est à espérer, car si le ciné continue sur sa lancée présente, ce sera la fin des haricots, à bouffer du navet bien-pensant.
Adieu, Venantino Venantini, tu vas retrouver M. Fernand, les Volfoni, et Michel Audiard. Veinard !