En Hongrie, comme dans les autres pays de l’ancien bloc de l’Est, les taux de natalité sont faibles. Cette dépression démographique post-soviétique s’explique par de multiples facteurs que nous ne détaillerons pas ici. Avec un taux de natalité de 1,5, la Hongrie se dépeuple. Et le Premier ministre conservateur et calviniste Viktor Orban a choisi de répondre à ce défi en rejetant l’immigration de peuplement et en mettant en place une politique nataliste et pro-famille exemplaire au sein de l’UE.
C’est dans ce contexte qu’il faut aborder la question de l’avortement en Hongrie. Autorisé en 1956, le nombre d’avortements (légaux) annuel a oscillé entre 140 000 et 206 000 jusqu’en 1973, année de la mise à disposition massive des moyens contraceptifs, notamment de la pilule, ainsi que d’une restriction du droit à l’avortement libre. Le nombre d’avortements a alors rapidement chuté pour stagner entre 78 000 et 87 000 jusqu’en 1992, soit un an après la mise en place effective du nouveau régime politique. Le nombre d’avortements a depuis constamment baissé pour atteindre 31 000 en 2015. De 1950 à 2015, la seule Hongrie, peuplée aujourd’hui de 9,9 millions d’habitants, a connu 5 979 214 avortements. 44 % des grossesses depuis 1956 ont été interrompues volontairement, et 7 341 000 enfants sont nés. Selon l’office national des statistiques (KSH), dans les années 1995-2006, 97 % des avortements ont été justifiés par une situation de « détresse sévère ». Les Tziganes, qui représentent 9 % de la population hongroise et comptent pour une grande partie des classes les plus pauvres du pays, sont particulièrement concernés par la question. Même si l’on fait preuve d’un scepticisme légitime à l’égard des convictions et idéologies affichées par les politiciens, ces chiffres peuvent expliquer à eux seuls la volonté d’agir d’un gouvernement très soutenu et ayant fait le choix des politiques natalistes.
Le droit à l’avortement est toutefois une sorte de totem fondamental pour les milieux libéraux, et les médias hongrois, très majoritairement dominés par l’idéologie libérale-libertaire – même si cette domination est moins forte qu’en France – ne permettraient pas au très entreprenant Viktor Orban d’agir trop brusquement sur le sujet. Aussi, tout semble indiquer que le gouvernement a choisi une stratégie de moyen terme pour résoudre cette question. En 2016, certaines aides ont été retirées à des cliniques pratiquant l’avortement. Les Eglises catholiques et calvinistes se voient attribuer plus de visibilité dans l’espace public et, fin août, un groupe interministériel chargé des questions familiales a été créé pour soutenir les familles hongroises et augmenter la natalité. La première mesure annoncée par ce groupe l’a été après la rencontre du ministre des Ressources humaines hongrois avec le ministre de la Santé de Russie : la Hongrie, comme la Russie, va mettre en place des centres d’information sur l’avortement dans tout le pays, afin de favoriser les solutions alternatives et proposer de l’aide aux mères.
Ferenc Almassy
Journaliste et Rédacteur en chef du Visegrad Post
Illustration : campagne d’affichage lancée par le gouvernement hongrois en 2011, pour inciter les femmes à faire adopter leur bébé plutôt que se faire avorter. Interpellée par une députée socialiste française, la Commission européenne a demandé à la Hongrie le remboursement des aides européennes utilisées pour cette campagne.
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