Le cas Fethullah Gulen, éternel sujet de tensions
A la suite de la tentative de coup d'Etat dans la nuit du 15 au 16 juillet, le gouvernement turc a indirectement critiqué Washington d’héberger l’opposant au régime Fethullah Gulen, religieux exilé aux Etats-Unis et que Ankara accuse d’être derrière la tentative de coup d’Etat du vendredi 15 juillet.
«Je ne vois aucun pays capable de protéger un tel homme, qui est le chef d’une organisation terroriste, surtout après ce qui s’est passé la nuit dernière. Protéger cet homme constitue un acte d’hostilité envers la Turquie et le pays qui le ferait ne serait pas un ami de la Turquie», a martelé le Premier ministre turc Binali Yıldırım à la presse turque sur un ton qui laissait clairement entendre un avertissement à l’égard des Etats-Unis où le clerc vit exilé.
L'homme de 75 ans est présenté comme l'inspirateur des putschistes. Pour Erdogan, le Hizmet – le mouvement politique et religieux que dirige Gulen – est un «groupe terroriste». La Turquie avait d'ailleurs demandé aux Etats-Unis l'extradition du rival d'Erdogan.
Fethullah Gulen et Recep Tayyip Erdogan, avant d'être des ennemis, ont été des alliés de circonstance. Ainsi, Gulen a ainsi soutenu l'AKP, le parti d'Erdogan, dès 2002, jusqu'à ce que la crise éclate entre les deux hommes en 2014. Le Hizmet est alors accusé de noyauter les milieux de la justice et de la police. Gulen dénonce pour sa part la dérive autoritaire de l'AKP et d'Erdogan, s'inquiétant de ce que l'action de l'AKP pourrait compromettre l'intégration à l'Union européenne de la Turquie.
Washington renforce au maximum le niveau de sécurité de ses bastions en Turquie
Un responsable de la défense des Etats-Unis, sous couvert d’anonymat a déclaré le 16 juillet, cité par Reuters, que la sécurité avait été élevée au niveau «delta». Cela signifie généralement de l’imminence d’une attaque terroriste ou en cas d’attentat.
Le responsable a cependant déclaré qu’au niveau diplomatique, la sécurité restait la même, précisant que l’ambassade des Etats-Unis à Ankara et le consulat à Istanbul continuaient de fonctionner normalement et qu’aucun ressortissant américain n’avait été rapatrié par l’armée durant la tentative de putsch.
Néanmoins, L’ambassade et le consulat américains ont invité leurs ressortissants à ne pas s’y rendre en raison de risques sécuritaires encore non clairement définis.
L'avenir des bases américaines en Turquie pourrait être compromis
Vendredi 15 juillet, la tentative de coup d'Etat avait soulevé des questions sur les opérations militaires américaines à l’avenir, notamment en ce qui concerne la lutte contre l’Etat islamique en Irak et en Syrie, les Etats-Unis utilisant des bases militaires sur le territoire turc. Mais ces préoccupations semblaient diminuer samedi 16 juillet, selon le responsable de la Défense.
En effet, le Pentagone fait stationner ses troupes sur la base aérienne d’Incirlik, près de la frontière sud avec la Syrie et la base aérienne de Diyarbakir, dans la partie sud du pays. Les deux bases ont un rôle primordial dans la lutte des troupes américaines contre l’Etat islamique.
«Nous suivons la situation de près en Turquie et prenons les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de nos soldats, des civils, de leurs familles, ainsi que des installations», a déclaré un autre responsable de la défense américaine le soir de la tentative de coup d’Etat.
Le responsable a notamment ajouté que jusqu’à présent, il n’y avait pas eu d’impact particulier sur la base aérienne d’Incirlik et que les opérations de lutte contre Daesh se poursuivaient normalement.
Des déclarations qui semblent totalement contraster avec la réalité sur le terrain, puisque le 16 juillet, l’accès à la base d'Incirlik qui abrite notamment des armes nucléaires américaines a été bloqué et l’électricité coupée.
Selon la chaîne d’actualité américaine CNN, l’espace aérien au-dessus de la zone a lui aussi été fermé.
Les autorités turques ont expliqué vouloir s’assurer que tous les éléments de l’aviation turque sont bien sous le contrôle des forces pro-gouvernementales, alors que des avions et des hélicoptères militaires ont été utilisés par des putschistes la veille.
En conséquence, les missions américaines menées contre Daesh depuis la base d’Incirlik ont été temporairement suspendues, a indiqué un responsable américain à l'AFP sous couvert d'anonymat.
À Incirlik, les États-Unis font également stationner des avions de combat, des navires-citernes, ainsi que des drones de combat. Un commandant de la Force aérienne américain avait déclaré en mai 2016 que son unité gérait à elle seule un tiers du ravitaillement en carburant nécessaire pour les frappes aériennes en Irak et en Syrie.
Les Etats-Unis utilisent par ailleurs d’autres bases en Turquie, notamment à Izmir, à environ 320 km au sud-ouest d'Istanbul et à Aksaz sur la côte égéenne.
En Mars 2016, le Pentagone et le Département d'Etat avait ordonné aux familles de soldats américains, ainsi qu’aux diplomates de quitter le pays, invoquant de graves risques sécuritaires et des menaces d’attentats.
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