L’actualité offre une bonne occasion de relire le fameux discours sur la Nation, conférence à la Sorbonne que le Ernest Renan a prononcée le 11 mars 1882 – et où figure son fameux : “L’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours [...] Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront.”
S’exprimant peut après la défaite de 1870 et de la perte de l’Alsace Lorraine, il formule l’idée qu’une nation repose à la fois sur un héritage passé, qu’il s’agit d’honorer, et sur la volonté présente de le perpétuer. Il est l’origine du courant dit “français” de la vision de na nation, qui s’oppose au courant allemand (incarné par Fichte), pour lequel la nation doit être issue de la race.
Rappelons que, contrairement à Victor Hugo pour qui le XXe siècle verrait l’avènement de la paix mondiale, Renan, devant le monolithisme culturel de la Prusse, prévoyait que cette attitude ne pourra « mener qu’à des guerres d’extermination, analogues à celles que les diverses espèces de rongeurs ou de carnassiers se livrent pour la vie. Ce serait la fin de ce mélange fécond, composé d’éléments nombreux et tous nécessaires, qui s’appelle l’humanité. » [Lettre du 15 septembre 1871 à Strauss]
Qu’est-ce qu’une Nation, par Ernest Renan (1882, Conférence à la Sorbonne) publié par les-crises. Je reprends ici sa dernière partie, conclusive :
“Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis. L’homme, Messieurs, ne s’improvise pas. La nation, comme l’individu, est l’aboutissant d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans la passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. On aime en proportion des sacrifices qu’on a consentis, des maux qu’on a soufferts. On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet. Le chant spartiate : «Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes» est dans sa simplicité l’hymne abrégé de toute patrie.
Dans le passé, un héritage de gloire et de regrets à partager, dans l’avenir un même programme à réaliser ; avoir souffert, joui, espéré ensemble, voilà ce qui vaut mieux que des douanes communes et des frontières conformes aux idées stratégiques ; voilà ce que l’on comprend malgré les diversités de race et de langue. Je disais tout à l’heure : «avoir souffert ensemble» ; oui, la souffrance en commun unit plus que la joie. En fait de souvenirs nationaux, les deuils valent mieux que les triomphes, car ils imposent des devoirs, ils commandent l’effort en commun.
Une nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune. L’existence d’une nation est (pardonnez-moi cette métaphore) un plébiscite de tous les jours, comme l’existence de l’individu est une affirmation perpétuelle de vie. Oh ! je le sais, cela est moins métaphysique que le droit divin, moins brutal que le droit prétendu historique. Dans l’ordre d’idées que je vous soumets, une nation n’a pas plus qu’un roi le droit de dire à une province : «Tu m’appartiens, je te prends». Une province, pour nous, ce sont ses habitants ; si quelqu’un en cette affaire a droit d’être consulté, c’est l’habitant. Une nation n’a jamais un véritable intérêt à s’annexer ou à retenir un pays malgré lui. Le voeu des nations est, en définitive, le seul critérium légitime, celui auquel il faut toujours en revenir.
Nous avons chassé de la politique les abstractions métaphysiques et théologiques. Que reste-t-il, après cela ? Il reste l’homme, ses désirs, ses besoins. La sécession, me direz-vous, et, à la longue, l’émiettement des nations sont la conséquence d’un système qui met ces vieux organismes à la merci de volontés souvent peu éclairées. Il est clair qu’en pareille matière aucun principe ne doit être poussé à l’excès. Les vérités de cet ordre ne sont applicables que dans leur ensemble et d’une façon très générale. Les volontés humaines changent ; mais qu’est-ce qui ne change pas ici-bas ? Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La confédération européenne, probablement, les remplacera. Mais telle n’est pas la loi du siècle où nous vivons. À l’heure présente, l’existence des nations est bonne, nécessaire même. Leur existence est la garantie de la liberté, qui serait perdue si le monde n’avait qu’une loi et qu’un maître.
Par leurs facultés diverses, souvent opposées, les nations servent à l’oeuvre commune de la civilisation ; toutes apportent une note à ce grand concert de l’humanité, qui, en somme, est la plus haute réalité idéale que nous atteignions. Isolées, elles ont leurs parties faibles. Je me dis souvent qu’un individu qui aurait les défauts tenus chez les nations pour des qualités, qui se nourrirait de vaine gloire ; qui serait à ce point jaloux, égoïste, querelleur ; qui ne pourrait rien supporter sans dégainer, serait le plus insupportable des hommes. Mais toutes ces dissonances de détail disparaissent dans l’ensemble. Pauvre humanité, que tu as souffert ! que d’épreuves t’attendent encore ! Puisse l’esprit de sagesse te guider pour te préserver des innombrables dangers dont ta route est semée !
Je me résume, Messieurs. L’homme n’est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de coeur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation. Tant que cette conscience morale prouve sa force par les sacrifices qu’exige l’abdication de l’individu au profit d’une communauté, elle est légitime, elle a le droit d’exister. Si des doutes s’élèvent sur ses frontières, consultez les populations disputées. Elles ont bien le droit d’avoir un avis dans la question. Voilà qui fera sourire les transcendants de la politique, ces infaillibles qui passent leur vie à se tromper et qui, du haut de leurs principes supérieurs, prennent en pitié notre terre à terre. «Consulter les populations, fi donc ! quelle naïveté ! Voilà bien ces chétives idées françaises qui prétendent remplacer la diplomatie et la guerre par des moyens d’une simplicité enfantine». – Attendons, Messieurs ; laissons passer le règne des transcendants ; sachons subir le dédain des forts. Peut-être, après bien des tâtonnements infructueux, reviendra-t-on à nos modestes solutions empiriques. Le moyen d’avoir raison dans l’avenir est, à certaines heures, de savoir se résigner à être démodé.”
Extrait de: Source et auteur
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THEORIE DES NATIONS
PAR LOUIS MELENNEC
PUBLIE SUR LA TOILE
Qu’est-ce-qu’une nation ?
La destruction de la nation bretonne par la France. Les nations suisse, kabyle, berbère, catalane, française canadienne …. existe-t-elles ????
Le concept de nation française« une et indivisible »date de 1789. Il n’a jamais répondu à rien de concret, ni avant, ni pendant, ni après la révolution française, encore moins en 2020. C’est par une affirmation des députés de l’assemblée constituante réunis en1789 à Versailles, puis à Paris, incluse dans l’article premier de la constitution de 1791, qu’ils ont cru, en écrivant cette formule magique, en l’aspergeant abondamment de poudre de Perlimpinpin,– reprise depuis lors par plusieurs constitutions, dont celle de 1958 -, avoir substitué la noble nation française aux vieilles nations incluses dans le territoire soumis à l’autorité des rois de France, et avoir effacé de la carte les autres peuples de l’hexagone, bien plus anciens qu’elle.
L’article premier de ladite constitution de1791est ainsi libellé :
Article1. -Le Royaume est un et indivisible : son territoire est distribué en quatre-vingt-trois départements, chaque département en districts, chaque district en cantons. L’article2 ajoute : Sont citoyens français : Ceux qui sont nés en France d’un père français. Tout cela est FAUX : une nation ne se décrète pas par une loi, ni par aucun texte, de quelque nature qu’il soit.–y compris ceux qu’on inclut dans une constitution, parce qu’on détient les moyens de la rédiger, encore moins s’ils y sont intégrés par la force, sans même solliciter l’avis des principaux intéressés, qui ont seuls qualité pour décider de quel peuple ils font partie.
Outre les provinces centrales, soumises au roi des Français depuis plusieurs siècles, il existe dans les limites de ce qu’on dénomme en 1789 le royaume de France, au moins cinq nations périphériques :l a Bretagne, le pays basque, le Béarn (annexé au royaume en 1620),la Corse, l’Alsace.Les régions centrales, intégrées dans le royaume depuis plusieurs siècles, font partie de la nation française , et ne revendiquent aucune autre identité nationale que celle-là. Mais là s’arrêtent les limites de cette nation.
Cette doctrine de la nation prétendûment « une et indivisible », est enseignée dans les écoles jusqu’à aujourd’hui. Les écoliers l’apprennent par cœur, il n’est pas permis d’admettre d’autre vérité que celle-là. Certains magistrats font semblant d’y croire. Le Conseil d’Etat se sert de cette formule absurde chaque fois qu’il en a besoin ; toute honte bue, il l’a fait pendant longtemps, pour interdire aux peuples plus anciens que le sien de parler et d’enseigner leur l angue nationale.
Il est nécessaire de rappeler ici ce qu’est une nation. Dans une conférence faite par mes soins à Paris en 2002, mes auditeurs ayant quelque difficulté à comprendre ce qu’est une nation, j’ai résumé ma démonstration de la manière qui suit :
« Lorsque vous jetez de l’eau dans une casserole, puis des poireaux, puis des pommes de terre ou d’autres légumes, et que vous mettez le tout sur le feu, qu’arrive-t-il ? Tout simplement, au bout d’un temps, une soupe de légumes. La nation, c’est cela : un groupe humain vivant ensemble, sur le même territoire, partageant les mêmes valeurs , les mêmes joies, les mêmes épreuves, parlant ou non la même langue, sous un gouvernement commun. Au bout d’un temps, ces hommes et ces femmes se lient ensemble, par ce que nous appelons un sentiment d’identité commune – ou sentiment national -, distinct de celui des peuples voisins, qui ont subi la même évolution, et qui sont vécus comme des étrangers. Point n’est besoin de connaître à fond l’histoire des sociétés anciennes ni modernes pour comprendre ce phénomène : il est lié consubstantiellement à l’espèce humaine : les peuples – ou nations – ont existé de tous temps, de même que le droit international, au moins sous une forme rudimentaire. C’est donc une absurdité de dire qu’il n’y a dans l’espace hexagonal dénommé« La France » qu’une seule nation. La nation française existe, c’est vrai, elle est au centre de ce qu’on dénomme « l’hexagone ». Mais à la périphérie, il y a d’autres nations : les Basques, les Bretons, les Corses, lesFlamands, les Alsaciens, les Savoyards et les Niçois …. La liste n’est probablement pas close. Les Bretons et les Basques sont identifiés avant les Francs et avant les Français, leur histoire est beaucoup plus ancienne, leur langue aussi. Les Corses, pas davantage que les Bretons, les Savoisiens ne sont pas ce qu’on a appelé absurdement des « composantes du peuple français » : ce sont des Nations à part entière, au même titre que les Ecossais, les Gallois, les Catalans ….
La négation des nations périphériques dans l’espace hexagonal est l’effet d’une imposture et d’une manipulation mentale grossières nées en 1789, de l’accaparement par le pouvoir de Paris d’enseigner une religion fausse, faite à son profit d’inexactitudes et d’approximations…La vérité est enfin connue aujourd’hui. Ceci détruit d’une manière définitive l’idée absurde selon laquelle, dans l’espace hexagonal, seule la France peut revendiquer la qualité de nation ».
Nous allons voir, par le détail, par quels moyens la France, pendant un siècle et demi, a tenté – sans y parvenir, bien entendu -, de détruire la vieille nation bretonne, qui existe depuis l’ antiquité, et dont la réalité est démontrée par les auteurs anciens avant Jésus Christ, dont Jules César, dans son célèbre ouvrage La guerre des Gaules.LesBretons n’ont jamais été aussi Bretons que depuis qu’ils ont découvert leur histoire.
(Extraits de l’article de Louis MELENNEC : Théorie de la nation, Qu’est-ce qu’une nation ? LouisMélennec est docteur en droit, licencié en droit, diplômé d ‘études supérieures de droit public, de droit privé, de sciences criminelles, diplômé d’études approfondie d’histoire moderne, toutes disciplines qu’il a enseignées).
http://melennec.info/theorie-des-nations-par-louis-melennec/Pourdes cours particuliers, s’adresser à Jean-Marc Ayrault, Johanna Roland (Nantes), Jean-Yves Le Drian, Jean-luc Mélenchon, éminents spécialiste de ces matières. Les cours sont gratuits. Evitez Poignant : il va se planter.
Ernest Renan a aussi écrit : …L’Islam est un boulet pour l’humanité. Et 150 après nous trainons toujours ce boulet.