La transmission est à la racine de tout acte d’enseignement

Nous sommes aujourd'hui arrivé à un stade de développement (je mets en italique parce que je ne suis pas sûr qu'il s'agisse là d'un terme véritablement adéquat comme vous allez le constater) plutôt étonnant. Certaines personnes s'opposent en effet à ce que les jeunes générations soient instruites par le biais de la transmission. Pour ces personnes, il ne doit plus être question de transmettre quoi que ce soit. Dans la foulée, elles proposent donc de substituer au phénomène transmissif  des méthodes où les élèves construisent leurs savoirs appelées méthodes actives ou (socio-)constructivisme. 

De vieilles lunes régulièrement ressorties de leur placard

Comme cela fleure bon la nouveauté, ces méthodes obtiennent un certain succès auprès d'esprits peu critiques pour qui l'important est d'évoluer, et ce peu importe dans quelle direction. Il est vrai que d'après l'expérience scolaire vécue par le plus grand nombre, il semblerait que les méthodes transmissives soient les méthodes du passé et que ces autres manières de faire relèvent de la nouveauté. Il ne s'agit là que d'une illusion. Comme je l'ai déjà souligné à plusieurs reprises, les méthodes actives ou constructivistes sont en fait de vieilles lunes qui réapparaissent épisodiquement. J'ai déjà montré que l'ensemble de l 'arsenal constructiviste a eu son heure de gloire dans l'URSS des années 20 (ce qui démontre en passant que la charge de démocratie qu'elles contiennent est plutôt faible contrairement aux dires de leurs promoteurs), que les soviétiques l'avait tiré des rares réflexions menées par Marx (1818-1883) sur l'éducation et sur diverses expérimentations déjà faites à l'époque de la Révolution industrielle dans le système scolaire allemand notamment. Auparavant, Rousseau (1712-1778) en avait lui aussi déjà esquissé le contour dans l'Emile (bien que cet apport soit à relativiser puisque Rousseau n'avait pas là pensé un système adapté à un maître en face d'une multitude d'élèves dans un laps de temps réduit mais à un précepteur face à un disciple à plein temps). A la lecture du dernier ouvrage de François Xavier Bellamy (les Déshérités), j'apprends que Descartes  (1596-1650) avait lui aussi déjà élaboré les idées maîtresses d'un système éducatif allant dans ce sens, et ce bien avant Rousseau. Au bas mot, cette pédagogie aujourd'hui qualifiée de novatrice a donc, au bas mot, soufflé ses 400 bougies. Il faut donc une sacré dose de malhonnêteté pour continuer à la présenter comme une innovation.

Certains seront peu être fort étonnés d'apprendre ces quelques faits et peuvent être tentés de se demander pourquoi alors si peu de monde connait l'ancienneté de ce courant. La réponse est assez simple: partout où ces conceptions ont été testées à large échelle, elles se sont soldées par de retentissants échecs et ont dû battre en retrait. Elles n'ont donc jamais pu s'imposer définitivement et devenir la modalité dominante sur de longues périodes, si bien que peu nombreux sont ceux qui l'ont déjà connue. Apparaît dès lors l'illusion qu'il s'agit là d'une nouveauté à opposer à un vieux modèle transmissif dont, soi dit en passant, on omet sciemment de se demander s'il peut évoluer (l'enseignement explicite en est pourtant la plus éclatante démonstration).

Quand les constructivistes transmettent leurs idées...

Mais ce n'est pas là le sujet de ce billet. J'aimerai traiter ici de l'opposition farouche à la transmission qui émane du camps constructiviste. Est-ce vraiment une position tenable? Pour ma part, je ne le crois pas un seul instant: je pense qu'à la racine de tout acte d'enseignement, constructiviste, transmissif ou autre, il y a transmission. Je vais donc essayer de démontrer que les pratiques constructivistes sont toutes, sans exception, construites sur une base transmissive, certes inavouée et occultée, mais existante.

Commençons cette quête de la transmission en nous basant sur la manière dont les constructivistes communiquent leurs idées. Il est somme toute assez intéressant de constater que Meirieu, Perrenoud et consort ont tous en commun d'utiliser le livre et l'article comme moyen de communication. Or, qu'y a t-il de plus transmissif que ces outils? A ce que je sache, leurs écrits ne se présentent pas sous forme de situation problème ou je-ne-sais-quoi-d'autre mais prennent bien la forme de textes totalement conventionnels, écrits par des gens ayant le désir de transmettre leurs idées. Dès lors, la volonté exprimée d'expulser la culture livresque de l'école prête à sourire puisque leurs propres actes sont en contradiction avec ce qu'ils prônent. Si donc mêmes les papes du constructivisme ne parviennent pas à enseigner à des adultes autrement que par le biais de méthodes transmissives, qui parviendra à le faire avec des enfants ou des adolescents? Si ces messieurs veulent être pris au sérieux, il ne leur reste donc plus qu'à innover et à trouver des moyens réellement opposés à la transmission pour promouvoir leurs idées. Je leur souhaite bien du courage.

Si les constructivistes sont incapables de diffuser autrement leurs idées à grande échelle que par des moyens transmissifs comme cela vient d'être relevé, ils sont tout aussi incapable de se passer de la transmission lorsqu'ils forment des enseignants. L'ensemble des formations à l'enseignement trouvent également à leur base une transmission: une transmission très mal assurée et pas du tout assumée, mais une transmission quand même. Tous les enseignants qui sont passés par des institutions formatives constructivistes (HEP et autres) savent qu'on y présente des outils avant de laisser l'apprenti enseignant réfléchir à la manière de s'approprier l'outil en question. On n'y donne donc pas l'ensemble des informations nécessaires à son utilisation, on force à réfléchir sur son utilisation. La rupture de transmission se situe à ce niveau, c'est à dire au refus de transmettre les pratiques adéquates. En revanche, l'outil en lui-même est transmis. Peut être un exemple est-il nécessaire pour illustrer le cas. On peut tout à fait présenter aux étudiants une carte mentale. En revanche, on ne leur dira pas vraiment comment et à quelles occasions utiliser cette carte mentale. Il sera du ressort des étudiants d'en comprendre le fonctionnement et l'utilité.

En conséquence, dans le chemin d'appropriation de la carte mentale par l'enseignant en formation, la première partie (la présentation de l'outil) est transmise alors que la seconde (l'appropriation de celui-ci) doit être construite. Il s'agit là d'un aveu d'impuissance : sans transmission préalable, il est impossible d'entrer dans un processus constructiviste. Une deuxième conclusion qui peut dès lors être tirée de ce cas est que toute une frange d'enseignement échappe donc à la possibilité d'être traitée par des méthodes constructivistes. Le contraire ne sera démontré que le jour où les enseignants en formation ne construiront pas uniquement leurs savoirs relatifs à l'utilisation de ces outils, mais qu'ils construiront d'eux-mêmes ces outils sans qu'ils ne soient présentés au préalable. Tant que ce n'est pas le cas, toutes les critiques sur la transmission ne méritent même pas d'être écoutées.

Bien entendu, tout le monde aura connu un ou plusieurs formateurs expliquant également l'utilisation de l'outil en question. Ce n'est cependant pas là un argument pour contredire ce qui est avancé: ce n'est pas parce que certains ne respectent pas l'orthodoxie constructiviste que celle-ci est fondée. D'ailleurs, pour tout dire, cela ne fait que renforcer l'idée contraire puisqu'il s'agit là d'un nouveau aveu désaveu de l'idéologie constructiviste.

Troisième aspect relatif à la transmission des conceptions constructivistes, la conception d'un plan d'étude. Lorsque des constructivistes réalisent un plan d'étude, ils ont beau changer la terminologie, remplacer les savoirs et savoir faire par des compétences ou je ne sais quoi d'autre, ils restent toujours dans le même schéma, à savoir celui de la transmission/imposition  de directives aux enseignants. Il est totalement impossible de concevoir un plan d'étude en expurgeant totalement la notion de transmission puisque d'une part, le plan physique lui-même a pour vocation d'être transmis aux enseignants et, d'autre part, puisque le contenu de ce plan doit lui aussi se transmettre. Sans quoi les enseignants seraient libres de faire à peu près tout et n'importe quoi dans leurs salles de classe au prétexte qu'ils construisent leurs représentation du plan d'étude.  Sinon, il faut bien reconnaître que des bornes sont transmises. Le fait d'utiliser un langage abscon ne change absolument rien à la question.

L'impératif du transmettre dans les salles de classe

Plus encore que le plan d'étude, il est intéressant de remarquer que l'ensemble des gestes exécutés par des enseignants constructivistes sont en fait surchargés de transmission. Prenez par exemple l'organisation d'une situation problème en classe. Si l'enseignant ne transmet pas directement le savoir nécessaire à sa résolution, il organise un dispositif qui devrait théoriquement permettre aux élèves d'y arriver par eux-mêmes. Se faisant, il inscrit dans le génome de son dispositif des contraintes qu'il espère suffisantes pour que les élèves parviennent à réaliser un certain cheminement. Un cheminement qu'il a préparé d'avance et qu'il va donc transmettre.  Pour tout dire, les contraintes en elles-mêmes sont également transmises puisqu'elles partent de l'action de l'enseignant pour aller rejoindre celle de l'élève. Tout cela relève ainsi de la transmission. En définitive, la seule chose qui change réside dans le fait que les constructivistes délèguent au dispositif mis en place la responsabilité de transmettre au lieu de le faire par eux-mêmes. Si tel n'était pas le cas, alors le constructiviste devrait accepter que n'importe quel acte posé par l'élève dans le cadre de sa situation problème est un progrès acceptable. Sinon, il faut bien admettre qu'il est en train de lui transmettre quelque chose.

A ce sujet, un élève qui resterait complètement immobile sur sa chaise sans rien faire me semble le seul exemple valide de refus catégorique de toute transmission: il se développe puisque son cerveau n'est jamais totalement inactif et, par conséquent ses connaissances se construisent (dans quel sens, on ne le sait pas vraiment) tout en rejetant tout apport transmissif provenant de l'extérieur.

Allons plus loin dans l'analyse des dispositifs mis à disposition des élèves: le simple fait de lui donner un texte, une carte ou un schéma est déjà bourré de transmission. Celui qui a écrit le texte, réalisé la carte ou le schéma n'a-t-il pas voulu transmettre une information? En mettant ces documents dans les mains  des élèves, le constructiviste favorise donc cette forme de transmission. Il en va d'ailleurs de même avec tous les dispositifs où les élèves sont sensés construire leurs connaissances en allant les chercher sur internet. A la base de toute information trouvée sur internet, il y a quelqu'un qui a construit un site internet et qui l'a enrichi d'informations dans le but de les transmettre à celui qui le désire. En définitive, on constate donc que le constructiviste ne fait que déplacer la transmission qui va traditionnellement de l'enseignant à l'élève en transitant par les documents (exercices etc.) vers une nouvelle forme de transmission allant du document vers celui qui apprend (en transitant par l'enseignant coach).

A ce stade là, certains rétorqueront peut-être que si effectivement la transmission est toujours présente, le taux d'activité de l'élève change dans une perspective constructiviste. Celui-ci s'approprierait plus activement ce qu'on veut lui transmettre. On peut légitimement se poser des questions sur la véracité de cette information ainsi que sur sa pertinence. Voici pourquoi.  Au stade précédant l'enseignement, l'élève dispose en mémoire d'un certain nombre de concepts, connaissances, savoir-faire regroupés sous formes de schèmes. Un apprentissage réussi est un apprentissage qui va modifier un schème de façon à y inclure la nouvelle conception. C'est là tout ce qui importe. Si je veux apprendre à un élève à additionner, mon objectif est qu'il sache manier cette opération. Peu importe le temps et l'intensité de l'activité déployée par l'élève pour y parvenir puisqu'il a été suffisamment actif mentalement pour parvenir à maîtriser cette nouvelle technique. Plus encore, j'aurai tendance à penser qu'en fait, ce taux d'activité devrait être le plus faible possible pour arriver au résultat attendu. Explication: un enseignement qui permet à un élève d'apprendre du premier coup est plus opportun et plus efficace qu'un enseignement arrivant à un résultat équivalent mais qui demande à l'élève une somme de travail beaucoup plus conséquente. L'économie de temps réalisée ainsi peut être réinvestie dans des apprentissages supplémentaires.

Si on veut être cohérent jusqu'au bout, le fait de laisser une plus grande part de chemin à parcourir seul à l'élève par ses propres forces implique automatiquement une déperdition au niveau des résultats! La plupart des élèves apprennent en effet nettement mieux si on les enseigne que si on les laisse se débrouiller tout seul. Dit plus simplement, il vaut mieux un enseignement où le maître démontre à plusieurs reprises le savoir à acquérir, travaille ensuite avec ses élèves oralement avant de les laisser agir de manière autonome qu'un maitre qui donne une fois l'explication et laisse ses élèves travailler. Je pense que personne ne peut dire le contraire! D'ailleurs, toutes les comparaisons effectuées à ce jour ne disent pas autre chose.

Partant de ce constat, il est stupéfiant de constater que le fondement du constructivisme consiste justement à rendre l'enseignement plus restreint pour laisser l'élève agir par ses propres forces, à l'image de l'enseignement transmissif mal exécuté ne consistant qu'à expliquer une fois avant de laisser l'élève se débrouiller dont on vient de parler! En définitive, le constructivisme n'est donc, au vu de ce qui a été dit jusqu'ici, qu'une transmission mal exécutée, brouillonne et déléguée au support de travail!

La réflexion ne s'arrête pas là. L'acte d'enseigner implique d'évaluer les progrès réalisés ou non par les élèves. Or, là aussi, la philosophie constructiviste se heurte à des difficultés insurmontables! Si on veut évaluer, on a des critères de ce que les élèves ont du apprendre. Par conséquent, on mesure leur capacité à digérer ce qu'on leur a transmis d'une manière ou d'une autre. Si on ne veut pas évaluer une transmission, quelle qu'elle soit, on ne peut tout simplement rien évaluer! Tout au plus peut-on évaluer le fait d'avoir évoluer simplement, mais là également, vouloir faire évoluer un élève c'est vouloir lui transmettre un mouvement, un processus. Rejeter la transmission c'est donc rejeter d'office la possibilité d'évaluer selon des critères cohérents, car il ne reste plus que l'arbitraire qui permette d'évaluer une prestation non basée sur une quelconque forme de transmission.

Conclusion

Bien entendu, la plupart des adeptes de constructivisme diront qu'on ne peut pas être si extrême et que les diverses situations de vie de classe existantes offrent de multiples occasions de varier les méthodes.  Je répondrais simplement en disant que si toute situation implique nécessairement transmission comme cela a été exposé jusqu'ici, il faut m'expliquer au nom de quels critères on peut choisir la voie du constructivisme. L'ensemble de ce texte démontre qu'il n'est en fait qu'une mauvaise version de transmission non avouée déléguée à un dispositif non structuré, ce qui est d'ailleurs corroboré par les multiples études comparatives réalisées sur le terrain par des myriades de chercheurs. Choisir l'option constructiviste c'est faire le choix délibéré de l'outil le moins efficient que le monde de la transmission connaisse.

Au fait, à bien y réfléchir, la seule manière de permettre à quelqu'un d'apprendre en rejetant toute forme de transmission, c'est de ne lui fixer aucun objectif, de ne rien lui enseigner, de n'utiliser aucun dispositif porteur de transmission, de ne pas l'évaluer et, en définitive, le laisser choisir lui ce qu'il veut faire tant la transmission est au coeur de tout acte d'enseignement. Dès lors, il est éventuellement possible de le questionner de manière à lui permettre d'approfondir ses conceptions, tout en se gardant bien de diriger d'une quelconque manière cette réflexion, ce qui semble totalement illusoire.

Stevan Miljevic, le 7 novembre 2014, sur le net et pour les Observateurs.ch

3 commentaires

  1. Posté par Vautrin le

    “Émetteur” et “récepteur” sont des paramètres de l’énonciation : il peuvent donc n’être pas humains (après tout, un ascenseur peut émettre un message et un enregistreur téléphonique en recevoir), donc ils n’ont pas d’existence sociologique. Mais deux interlocuteurs (ce qui est différent) sont des personnes, donc appartiennent au domaine sociologique. Mais ce n’est qu’un à-côté de notre problème. Pour y revenir, je parle de mise en partage, donc non pas de “transmission” mais de négociation-appropriation (quand il s’agit d’adultes). C’est le contrat didactique. Maintenant du côté de la pédagogie, donc du côté des enfants, j’ai été souvent frappé par le fait qu’ils sont presque jamais “interloqués”, c’est-à-dire que rien ne leur est étranger, qu’ils ramènent toujours l’inconnu au connu. Maintenant, quand je parle de ce que l’on appelle les “fondamentaux” (écriture/lecture, calcul, et de l’inculcation de certaines valeurs sociales), je parle “d’éducation civique”, c’est-à-dire de l’apprentissage de modes opératoires, en même temps que de la manière particulière dont telle société s’y prend, par exemple pour poser les opérations arithmétiques ou pour noter des différences phonologiques et/ou sémiologiques à l’aide de diacritiques (c’est l’orthographie) etc… Je veux bien admettre que dans un premier temps, c’est de la “transmission”, parce que chez l’enfant ce n’est pas encore approprié, remis en perspective. Mais je préfère le concept “d’imprégnation” pour parler de ce phénomène (voir notamment JC Quentel, “L’Enfant”, chez deBoecke). Et, bien entendu, je considère que cette “éducation civique” est indispensable.
    Quant à l’invariance… Bien sûr, on peut retenir des “mots”, des noms propres etc… On sait par exemple qui était Churchill (sauf qu’un malade de Warrington pourrait connaître le nom sans le rattacher à une période historique et à des faits précis), mais ce nom n’a pas la même résonance pour un Anglais que pour un Français, un Chinois etc… Ce n’est qu’un (très) petit exemple de faits qui me font douter du “ne varietur”.

  2. Posté par Stevan Miljevic le

    Merci de votre contribution. Si la transmission n’est pas un concept digne qu’on s’occupe de lui, alors il faut signaler à tous ces rigolos grassement payés dans le domaine des sciences de l’éducation et qui passent leur temps à affubler la transmission de tous les noms d’oiseaux que leurs démarches ne sont pas scientifiques.
    Plus sérieusement, il est clair que le message envoyé par un émetteur vers un recepteur est toujours ou presque brouillé d’une manière ou d’une autre et que le récepteur l’incorpore dans sa mémoire à long terme à sa manière. Par la suite, il va effectivement remodeler les données en question bien souvent. ll n’empêche que plus que les mathématiques ou la physique, il y a toute une série de données qui sont elles aussi invariables et ne subissent aucune altération. Ce qui permet de parler de transmission. Je parle par exemple du nom des conseillers fédéraux à telle ou telle date, de tel évènement historique relié à une date précise etc. Même l’interprétation de la manière dont ces éléments se lient entre eux doit, à mon avis, au niveau de l’école obligatoire être transmise. Il faut pour cela choisir une option particulière. Par la suite, les études supérieures ou le travail d’autodidacte va permettre de flexibiliser ces connaissances et de les transformer.
    Donc oui, je reste convaincu que selon vos dires, au niveau de l’école obligatoire, on peut parler de transmission

  3. Posté par Vautrin le

    “Transmission” n’est pas un concept scientifique. Il relève du domaine des… Transmission, comme on désignait cette Arme du temps de mon service militaire. C’est-à-dire l’envoi d’un vecteur (électromagnétique ou sonore) d’un émetteur à un récepteur. Au bonhomme ensuite, si c’est lui le récepteur, d’en faire du message si des ondes parasitaires n’ont pas endommagé le vecteur. Mais le message qui se fabrique ainsi (ce qui se prédique et s’énonce) ne se saisit pas “ne varietur”. Il y a toujours du malentendu et du quiproquo. C’est que l’interlocuteur (= prive) à l’autre (= prive) de sa parole et se l’approprie, et donc la transforme. Il en va évidemment de même en matière de partage des connaissances : à part dans des domaines très précis (maths, physique) où règne une convention sur les concepts (et encore !) chacun s’approprie du savoir, c’est-à-dire le transforme. On ne transmet pas, on partage, mais le partage c’est comme l’héritage : on le fait fructifier ou on le dilapide, en tous cas il s’approprie et ne reste pas invariable. Je reconnais que cela a de quoi surprendre, mais je suis tout prêt à en discuter.
    Ce que je viens de dire, cela concerne “l’adulte” (bien qu’anthropologiquement ce concept ne convient pas). Chez l’enfant, c’est autre chose. À l’inverse de l’adulte, l’enfant s’imprègne, stocke, classe (l’adulte aussi, mais pas de la même manière), mais ne remet pas encore “en perspective” : c’est comme ça chez Papy-Mamie, pas comme ça à la maison, un point c’est tout. Il rapporte le nouveau à l’ancien, ce qui est une autre opération que l’opposition. Ce qui fait que rien ne lui est jamais réellement transmis non plus, ni étranger, mais se trouve toujours rapporté (cependant jamais “contesté”). Si l’on ne me croit pas, se demandera-t-on pourquoi la “porcelaine” et la mère des porcelets et “les grains du nez” des granulés ?
    Cela dit, il est tout aussi raisonnable et logique d’enseigner (= mettre en signe) ce qu’une société estime être les “fondamentaux” du savoir – et ici je rejoins l’argumentaire de l’article- , car il faut bien que l’enfant s’imprègne de ce savoir, avant de se l’approprier plus tard. Il est des choses qu’il ne peut pas inventer, même s’il dispose de la “figura” logique : il n’a pas encore le “modo” social.
    Maintenant le maître transmet-il ? Oui et non. Oui si l’on admet qu’il est censé obéir à des instructions portant sur le contenu de l’enseignement, non si l’on considère que ce qu’il raconte ce n’est que ce qu’il s’est approprié et que ça ne coïncide pas, en dépit des apparences, avec ce que racontent ses collègues. Quand il parle de l’atome, un prof de physique n’est pas Niels Bohrs, mais quelqu’un qui s’est approprié -donc a transformé – le modèle atomique du théoricien.
    Le “ne varietur” n’existe pas en anthropologie, c’est pour cela que je récuse le terme de “transmission” – comme je récuse celui de “créativité” qui fait tant de mal en pédagogie.
    On peut en discuter, et je suis prêt à cela.

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