Extrait de: L'Aide à l'Eglise en Détresse
Avec l’avancée des combattants d’EILL, des milliers d’irakiens perdent leur patrie, se réfugiant là où ils le peuvent. Mgr Nona, archevêque de Mossoul, vit au milieu des réfugiés à Tilkef, à 3 km de son diocèse, accueillant « tout le monde, qu’il soit chrétien ou musulman ». Témoignages d’hier (2 juillet) de notre correspondant sur place.
L’archevêque Mgr Amel Nona lance un aimable « Ahlan wa sahlan, soyez la bienvenue » pour saluer une femme voilée à l’air peureux entrée dans son bureau. Il lui offre de prendre place. L’archevêque chaldéen de Mossoul traduit les paroles frénétiquement prononcées en arabe par cette musulmane : « Elle vient juste d’arriver à pied de Mossoul ici à Tilkef, accompagnée de son fils, pour se réfugier ici. Il y a eu des combats entre le gouvernement et les rebelles sunnites. C’est pourquoi elle s’est enfuie. » Il n’y a que trois kilomètres entre Mossoul et la localité de Tilkef, partiellement chrétienne. Mais un gouffre les sépare depuis que les islamistes ont conquis la ville. « Nous accueillons tout le monde ici, qu’il soit chrétien ou musulman », assure Mgr Nona. C’est ce que nous enseigne notre foi : apporter de l’aide à chacun sans distinction de religion. Dieu aime chaque être humain. Voilà pourquoi nous devrions aider tout le monde. »
De fait, l’Église a ouvert ses établissements scolaires, jardins d’enfants et salles communales aux chrétiens ainsi qu’aux familles musulmanes. Alqosh, une localité chrétienne à une vingtaine de kilomètres de Mossoul, a accueilli 500 familles chrétiennes et 150 familles musulmanes. Plus de 700 familles, parmi elles également des musulmans, ont trouvé refuge à Tilkef. La localité est pleine à craquer. Les réfugiés ont même été logés dans une imprimerie pour livres liturgiques. Comme la famille d’Habib. « Nous avons laissé tous nos biens à Mossoul. Nous ne sommes parvenus à sauver de Mossoul que les vêtements que nous portions, des documents et quelques cabas. C’est tout ce qui nous reste. J’ignore si nous pourrons y retourner un jour », raconte ce chaldéen catholique. Il hausse les épaules et ajoute : « Je ne sais pas non plus que ce qui nous attend à l’avenir. »
« Il n’y a pas de place pour nous autres chrétiens au Proche-Orient »
Mgr Nona sait ce que ressentent les gens. Il a lui-même été un réfugié. Lorsque Mossoul a été conquise il y a trois semaines par les terroristes djihadistes d’EILL, lui et environ 5000 autres chrétiens se sont enfuis de cette deuxième plus grande ville d’Irak. Des centaines de milliers de musulmans ont également tenté d’échapper aux cruels guerriers d’Allah. Les déplacés sont estimés à environ 450 000 personnes. La plupart ont trouvé refuge dans la Région autonome du Kurdistan. « Mon diocèse n’existe plus, EIIL me l’a pris » déplore l’archevêque. Selon lui, trois quarts des quelque 10 000 membres de son diocèse seraient en fuite. « J’ignore s’ils pourront jamais retourner à Mossoul ». L’ambiance chez les gens est d’autant plus sombre ici. « Il n’y a pas de place pour nous autres chrétiens au Proche-Orient », dit une femme. Elle aussi s’est enfuie de Mossoul, avec ses quatre enfants. « Où voulez-vous qu’ils aillent maintenant ? Plus rien ne nous retient en Irak. D’abord la guerre en 2003. Puis tous les troubles qui ont suivi, lorsque nous les chrétiens sommes devenus les cibles de fanatiques. Et maintenant, ça. Nous voudrions aller le plus rapidement possible en Occident. » Mais elle ne se fait pas d’illusion. « Des parents qui y sont déjà m’ont appris qu’il n’était pas facile d’y commencer une nouvelle vie. Mais nous y serons au moins en sécurité. Je ne veux pas que mes enfants grandissent dans la peur. »
La saignée de la chrétienté irakienne
Les évêques sont tout à fait conscients des réflexions de leurs fidèles. Lors du synode qui s’est achevé la semaine dernière, ils ont désespérément cherché des issues à cette crise causée par la progression d’EILL. « Il ne s’agit pas que de l’actuelle crise des réfugiés », explique Mgr Nona. « Le problème réside dans le fait qu’à cause de l’avancée d’EILL et des tensions entre sunnites et chiites, tous les chrétiens d’Irak ne se sentent plus en sécurité. Ils ne croient plus en un avenir dans ce pays. » Pourtant, la saignée de cette chrétienté irakienne, dont les origines remontent à l’apôtre Saint Thomas, n’est pas récente. L’archevêque Mgr Nona calcule qu’avant 2003, lorsque les Américains sont venus pour renverser Saddam Hussein, plus de 25 000 chaldéens vivaient rien qu’à Mossoul. Avant la vague actuelle de départs, il y en avait encore juste 5000. Au total, la chrétienté irakienne a perdu en dix ans environ les deux tiers de ses quelque 1,2 million de fidèles. Ceux qui sont partis se sont dispersés dans la région ou ont directement émigré dans les pays occidentaux.
Tout l’espoir des évêques se concentre maintenant sur le Kurdistan. Cela fait des années déjà que la Région autonome au nord de l’Irak constitue un lieu de refuge pour les chrétiens originaires de contrées agitées comme Mossoul et Bagdad. Beaucoup d’évêques croient qu’ils y trouveront une nouvelle patrie.
L’Aide à l’Église en détresse a accordé 100 000 euros de secours d’urgence aux réfugiés de Mossoul.
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Source et auteur: L'Aide à l'Eglise en Détresse
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