"- La récente affaire Dieudonné a réveillé une forme de compétition mémorielle entre le colonialisme, la traite des Noirs et l'Holocauste. Cette fracture est-elle récente dans l'histoire contemporaine?
Dans les années 1950, ces deux mémoires se nourrissaient l'une de l'autre. Hannah Arendt considérait que le système colonialiste, mélange de violence et de bureaucratie, était une ébauche du système concentrationnaire, Aimé Césaire que le colonialisme décivilisait le colon. Il s'agissait d'une faille morale dans la pensée occidentale, qui s'est approfondie avec le nazisme et la collaboration.
[...] - Mais pourquoi la Shoah est-elle devenue la référence quand on parle de crime contre l'Humanité?
La notion même de génocide et de crime contre l'Humanité vient de là. L'Holocauste est devenu le modèle référentiel d'abord du point de vue du droit international, qui a été créé pour traiter de ce sujet. Mais de nombreux auteurs critiquent la surexposition mémorielle de la Shoah, qui dépouille les autres événements dramatiques de l'indignation qu'ils pourraient susciter. Ce "succès mémoriel" a des effets pervers. Il peut amener à banaliser les catastrophes présentes. Il peut être érigé en Mal absolu inégalable. En réaction, certains veulent le délégitimer et le nier."
Si on pouvait bénéficier du jour de la mémoire pour ne retenir que le fond du message, notemment celui qui nous impose de respectertoute souffrance et de ne pas la minimiser au nom d’une autre… le messager et tout le cirque qui l’entoure, je voudrai bien l’enfouir dans le plus profond des oublis.