Des pratiques dignes d’une République bananière

André Duval
Enseignant,  Ex- président de l'ARLE

L’IUFE (institut universitaire de formation des enseignants) n’en finit pas d’être critiqué.

J'ai récemment encore reçu des témoignages pour le moins édifiants. Les étudiants se plaignent qu'on leur bourre le crâne à coups de grandes théories inutiles pour la pratique de leur métier et les directeurs d'établissement ne peuvent plus choisir leurs stagiaires.

C'est justement ce dernier point qui nous intéresse aujourd'hui:

Ces stages obligatoires et primordiaux puisque seul moyen pour les étudiants de passer en 2ème année de formation et ainsi valider leur diplôme.

On pourrait donc penser que, logiquement, les étudiants qui ont réussi leurs examens de 1ère année obtiendront un stage leur permettant de poursuivre leur cursus...

Ce serait bien naïf!

Malheureusement, la réalité n'est pas aussi simple.

Un entretien décisif

Afin d'être parmi les heureux élus, les résultats de 1ère année ne suffisent pas. Tous les étudiants doivent passer un entretien avec deux messieurs, Mrs Toulou et Loosli.

Il se trouve que l'IUFE a accepté trop d'inscriptions par rapport au nombre de places de stage disponibles...on se demande d'ailleurs en quoi et pourquoi ces places sont si peu nombreuses.

Dès lors, ces deux messieurs sont tout puissants, ils font la pluie et le beau temps puisque c'est d'eux seuls que va dépendre le futur de chaque étudiant!

Une étudiante a accepté de témoigner, encore une fois de façon anonyme, et de me raconter son "aventure":

En ce qui me concerne, je garde un souvenir particulièrement négatif de cet entretien. Je ne m'attendais pas à être autant critiquée, on aurait dit que je n'avais pas ma place dans l'enseignement alors que mon CV prouve que j'exerce depuis plusieurs années. Monsieur Toulou a l'habitude d'appliquer une méthode agressive avec bon nombre de candidats afin, j'imagine, de nous déstabiliser.

Mon entretien a débuté par une critique de ma lettre de motivation: trop laconique selon lui. J'y explique pourtant qu'enseigner est ma vocation, le métier que je souhaite faire depuis toujours.

Mr Toulou n'a pas hésité à mettre ma parole en doute: "Qu'est ce qui peut bien prouver que vous ne mentez pas??? Je n'ai aucun moyen de vérifier votre soi-disant vocation".

Le fait que mon cv démontre que toutes mes études ont été poursuivies dans ce but et annonce plusieurs années de pratique ne semble pas être pris en compte. Ce qui l'est, en revanche, c'est sa présentation. Les dates sont mal alignées, cela mérite que Mr Loosli y passe plusieurs minutes, règles à l'appui. Selon lui, aucun directeur d'établissement digne de ce nom n'accepterait de me rencontrer après avoir reçu un tel cv et une telle lettre de motivation. Que je sache, mon travail en stage ne consistera pas à taper des cv!

Sur 30 minutes d'entretien, seules 2 questions m'ont été posées sur l'enseignement, dont une particulièrement bizarre... Mr Toulou a souhaité savoir dans quelle mesure un enseignant est amené à utiliser l'écrit en dehors de l'enseignement direct. En gros, est-ce qu'un enseignant est capable de communiquer par écrit avec ses collègues, les parents d'élèves, les élèves, l'administration et tous les collaborateurs? Faut-il rappeler à ce monsieur que chacun de nous a un master en poche?

A aucun moment je n'ai pu mettre en avant mes qualités pédagogiques.

Sachant que ces messieurs notent des commentaires dans notre dossier, difficile de ne pas se sentir frustrée voire piégée. Sur quoi se basent-ils pour nous attribuer ces précieux stages, notre expérience et nos compétences ou la présentation de notre cv?

Longueur de notre jupe? Rasé de près? Nombre de battements de cils? Mystère!

Nous n'avons aucun droit de vue sur notre dossier, aucun retour ne nous est fait quant aux raisons de l'échec décrété dictatorialement par ces deux messieurs!

Nous sommes recalés sans savoir pourquoi!

A la sortie de cet entretien, je me sentais tout simplement misérable. Pour moi, cette entrevue relevait plus du lynchage que de l'entretien professionnel.

Je rappelle que ces étudiants ont tous fait 5 ans d'études supérieures et par conséquent, qu'ils ont tous écrit un mémoire d'une soixantaine de pages minimum sur telle ou telle problématique...qu'à cela ne tienne... l'entretien est suivi immédiatement par un test de français, nécessaire pour vérifier l'aptitude des étudiants à construire une réflexion en peu de temps, dans un français correct.

A ce sujet, voici ce que me relate l'un d'entre eux:

Je suis donc dans une pièce exigüe, surveillé par un cerbère, chronomètre en main, devant un écran d'ordinateur: j'ai 15 minutes et pas une seconde de plus pour réagir en 180 à 240 mots au sujet suivant: "La science doit être démontrée de façon positive, les risques et le dangers ne sont affaire que de croyances".

Au bout du temps imparti, l'écran s'éteint automatiquement et notre texte s'imprime.

Je pensais que j'aurais à débattre d'un sujet portant sur l'enseignement, la pédagogie ou l'éducation, mais je ne m'attendais pas à être jugé sur un sujet philosophique que je n'aborderai jamais dans la matière que j'enseignerai.

Les pratiques inqualifiables utilisées par ces deux personnes, ont provoqué un vent de révolte parmi les étudiants.

L'un d'entre eux m'a annoncé avoir eu une moyenne de 5,75 à ses examens finaux de 1ère année... et, sans savoir pourquoi, se voir refuser son stage pour l'année prochaine alors qu'il effectue des remplacements depuis de nombreuses années!

Mis en échec donc!. Recalé, après avoir payé 1000 francs pour une année qu'il a, haut la main, réussie.

Il se dit animé d'un sentiment de révolte et d'injustice, ce qui est plus que compréhensible. Il ne veut plus rien avoir à faire avec l'IUFE: "Je préfère me débrouiller sans leur diplôme, qui entre parenthèses n'est reconnu qu'à Genève, plutôt que de leur verser un franc de plus!"

Les critiques envers l'IUFE se font de plus en plus nombreuses et de plus en plus vives. Jusqu'à quand nos autorités accepteront-elles de couvrir cet institut? N'est-il pas temps pour nos élus d'ouvrir les yeux sur une telle honte?

Le temps presse car, entre les mains d'incompétents, c'est l'avenir de notre école genevoise qui est en jeu.

André Duval

2 commentaires

  1. Posté par G. Vuilliomenet le

    @ P.-H. Reymond

    Lisez “Le tam-tam de Jonathan” de Jean Raspail pour vous rendre compte s’il n’y a pas des points communs entre république bananière et régime totalitaire (dictature).

    Mais il est vrai qu’à cette dictature européenne, manque ce petit plus qui faisait nos délices avec les Bokassa et consorts, aussi sinistres fussent-ils! A croire que Hollande est protestant.

  2. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    République bananière, dites-vous? Non, totalitaire!

Et vous, qu'en pensez vous ?

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