L’initiative soumise au vote le 17 juin prochain tend à compléter le référendum sur les traités internationaux. Celui-ci est actuellement prévu à titre facultatif pour trois catégories de textes : soit qu’ils sont d’une durée indéterminée et non dénonçables, soit qu’ils prévoient l’adhésion à une organisation internationale, soit qu’ils contiennent d’importantes règles de droit.
Suivant l’initiative, les traités seraient soumis au référendum obligatoire du peuple et des cantons lorsqu’ils entraînent une unification multilatérale du droit, ou obligent la Suisse à reprendre des règles de droit, ou délèguent des compétences juridictionnelles à des institutions étrangères ou internationales ou enfin entraînent de nouvelles dépenses uniques de plus d’un milliard de francs ou de nouvelles dépenses renouvelables de plus de cent millions de francs. Cependant, il faut souligner que, dans les trois premiers cas, le contrôle automatique du peuple et des cantons aurait lieu seulement si le traité touche « des domaines importants » ; c’est dire que la portée de la nouvelle disposition dépendrait du sens attribué à la notion de « domaines importants ». Or l’interprétation de cet élément central serait naturellement donnée par l’Assemblée fédérale, qui serait appelée à choisir, pour chaque traité qu’elle approuve, entre le référendum facultatif et le référendum obligatoire. Il demeure donc une grande incertitude sur les effets pratiques de la réforme réclamée.
Tension entre démocratie et droit
Pour situer le problème, il importe de rappeler la tension inévitable entre l’unification progressive du droit et la démocratie directe. Ce phénomène s’observe lorsque les communes s’associent et que les cantons coopèrent. Il se manifeste de manière plus évidente encore à l’échelon international. Inévitablement, un accord est négocié et signé par l’exécutif, le Parlement ayant tout au plus la possibilité de l’accepter ou de le refuser, pratiquement en bloc. Quant au peuple, il n’est appelé que très exceptionnellement à se prononcer, de sorte que les conventions conclues avec des tiers lui échappent souvent.
L’initiative populaire cherche ainsi à résoudre une équation impossible. En effet, on ne saurait à la fois développer les coopérations et conserver en même temps intacte la démocratie directe. Entre l’un et l’autre, la contradiction est trop flagrante pour qu’une conciliation soit possible et il ne reste qu’à faire un choix, en pesant, dans chaque situation, les avantages et les inconvénients des deux termes de l’alternative. Jusqu’ici le constituant fédéral a peu à peu élargi le contrôle populaire sur les traités en prévoyant un référendum facultatif pour les trois catégories mentionnées et un référendum obligatoire pour l’adhésion à l’ONU ou à l’UE. C’est un moyen terme qui paraît raisonnable, faute de mieux.
Une demande raisonnable
L’initiative votée le 17 juin prochain transformerait, dans quelques cas, le référendum facultatif en référendum obligatoire. Les traités ainsi visés acquerraient ainsi le rang de textes constitutionnels, ce qui est pour le moins discutable. De plus, le peuple serait appelé à se prononcer sur des objets qui ne sont pas nécessairement controversés. Mais il ne faut pas exagérer la portée de la réforme demandée : celle-ci ne concerne de toute manière que les accords soumis à l’Assemblée fédérale, lesquels sont en petite minorité. En outre, si les Chambres donnaient un sens restreint au critère du « domaine important », l’innovation aurait en définitive peu d’effets concrets.
Quant à l’autre volet de l’initiative, le nouveau référendum financier obligerait l’électorat à se prononcer sur les achats ou les projets de construction particulièrement coûteux. Cette adjonction, qui est sans rapport direct avec la politique étrangère, concernerait par exemple les avions de combat ou les tunnels. Le référendum obligatoire ne s’impose pas ici non plus, la pratique actuelle étant suffisante.
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