Tous ces privilèges accordés aux «seniors»

Pierre Kunz
Pierre Kunz
Ancien député PLR, Genève
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Dans le cadre de l’Etat social, encore très récemment, par «solidarité intergénérationnelle» on entendait surtout celle qui s’exerce au bénéfice des générations âgées, les plus précarisées. Comme tous les peuples du monde les Suisses ont en effet eu conscience depuis des temps immémoriaux, au sein des familles, des devoirs que les enfants ont à l’égard de leurs parents et grands parents. Jusque-là restreinte au domaine privé, la solidarité intergénérationnelle a pris une dimension publique à la fin des années 1940, lorsque notre pays a fait connaissance avec l’AVS, une assurance destinée à garantir, par le travail et les cotisations des générations actives, le versement de pensions aux retraités.

Nul n’a jamais sérieusement contesté les bienfaits de ce système dans la lutte contre la pauvreté des personnes âgées et chacun reconnaît que l’AVS a joué un rôle déterminant dans le fonctionnement harmonieux de la société helvétique. A tel point que s’est ancrée peu à peu dans l’esprit des gens l’idée que la solidarité intergénérationnelle publique se résume aux efforts des jeunes pour les vieux et à l’aide due à ces derniers.

Les chouchous de l’Etat social

Il se trouve que notre société a grandement changé au cours des dernières décennies. Par l’introduction du deuxième pilier,  le niveau de vie des retraités s’est fortement amélioré. La croissance économique inouïe des «trente glorieuses» a par ailleurs renforcé magistralement cette évolution positive et il n’est pas exagéré de prétendre qu’en ce début de 21ème siècle, dans leur grande majorité, les «seniors», puisque c’est ainsi qu’il convient désormais de les désigner, sont devenus les chouchous de l’Etat social.

Dans ce contexte est-il encore correct de parler de solidarité intergénérationnelle? Ne s’agit-il pas plutôt de reconnaître objectivement que celle-ci s’est effilochée et que notre société, au fil du temps et des bouleversements démographiques, économiques et financiers, a accumulé au profit des anciens des privilèges considérables, parfois clairement au détriment des jeunes générations? Ces questions méritent d’être posées comme en témoignent les quelques exemples suivants.

L’assainissement devenu indispensable des caisses de pension qui forment le deuxième pilier continue de se faire clairement à charge des actifs et au profit des retraités. Ces derniers continuent de profiter de rentes intactes ou presque alors que les cotisations versées par les jeunes croissent et que les perspectives s’assombrissent s’agissant de leurs futures pensions. En Romandie, s’agissant des caisses de pension publiques, on peut même parler d’iniquité puisque, pour maintenir les prestations promises aux retraités, les fonctionnaires en activité ouvrent deux fois leur portemonnaie: la première en supportant une augmentation de leurs cotisations, la seconde en leur qualité de contribuables puisque l’Etat est amené à participer en milliards de francs au renflouement de ces institutions.

L’exemple caricatural du logement

En matière de logement, dans les cantons urbains en général mais en particulier à Genève, parce que le secteur est corseté par une législation qui crée et perpétue la pénurie, les jeunes générations affrontent une situation aussi insupportable qu’injuste à cause des «rentes de situations» accordées de fait aux retraités. Ceux-ci, parce qu’ils les occupent depuis longtemps, sont incités à ne pas libérer des logements pourtant trop vastes pour eux mais excessivement bon marché. au profit des jeunes familles dans le besoin

Dans le domaine de l’assurance maladie ce sont les jeunes générations qui supportent dans le montant de leurs primes la majeure partie des dépenses occasionnées par les patients âgés.

Il ne s’agit pas, bien sûr, de remettre en cause les assurances sociales, voire de réduire l’aide publique destinée aux personnes âgées fragilisées. Mais le moment est venu pour les autorités fédérales et cantonales de s’attaquer au déséquilibre souligné dans ce billet et de mettre en œuvre une vraie solidarité intergénérationnelle, celle qui s’exerce dans les deux sens, c’est à-dire non seulement au profit des seniors mais aussi au bénéfice des jeunes générations. Dans chacun des cas cités ci-dessus des solutions existent. Elles ne requièrent qu’une dose de volontarisme et un peu de courage politique de la part du législateur. On se limitera ici à une suggestion relative à la LaMal.

Vers l’AVS +

Le problème dans cette affaire se résume à reconnaître que les charges exorbitantes, qu’au prétexte de la solidarité intergénérationnelle cette assurance impose aux jeunes assurés, sont profondément injustes. La recherche d’un nouveau modèle de répartition des coûts découlant des soins requis par le «quatrième âge» est devenue cruciale. Les médias et les spécialistes s’en font d’ailleurs depuis quelques temps l’écho de façon pressante.

Ce nouveau modèle pourrait s’inspirer de l’idée émise en son temps par feu l’ancien conseiller national Peter Tschopp. En visionnaire, il avait proposé voici une quinzaine d’années déjà la création d’une assurance «AVS +» destinée à prendre en charge les frais médicaux des plus âgés, financée par l’Etat et qui s’accompagnerait d’un abaissement massif des primes maladies exigées des jeunes générations. Ce projet prend aujourd’hui un intérêt tout particulier, notamment parce que son financement devrait pourvoir être aisément assuré grâce aux économies réalisées dans les budgets publics qui sont actuellement lourdement grevés par le très large subventionnement des primes d’assurance.

7 commentaires

  1. Posté par François Etienne le

    Les retraités chouchoutés … ! Les jeunes opprimés … ! Personnellement j’ai cotisé durant 44 ans à l’AVS, payé tous les impôts, toutes les cotisations. A l’instar de milliers de retraité(e)s, j’ai vécu, contribué à 100 % au bien-être du pays. Pas de vacances tri-annuelles, de l’épargne, de la sueur, un respect total envers le travail, la création d’une famille sans crèches, ni aides socialistes. Les retraité(e)s ont payé leur dû. Globalement de manière dure et restrictive et obéissante.

    Et vous commencez à mettre en cause leur rente ? Une société honnête respecte ses “vieux”. Ou alors il faut être franc, direct, et prôner l’élimination de ces “vieux”. Le niveau qualitatif d’une civilisation se mesure notamment au respect témoigné envers ses pères et mères.

    Nous avons réfléchi sur nos dépenses, l’unité était encore le centime dans les années septante. Nous nous sommes privés de jouissances furtives. Nous avons construit pour nos enfants, leur avenir, leur sécurité. Nous continuons à épauler nos enfants largement majeurs qui étudient, qui ont parfois peine à trouver un emploi. Nous, les “Vieux”, sommes actuellement les protecteurs de cette jeunesse abandonnée par un système pourri, corrompu, entretenu par un socialisme partageux caviar. Par ce cancer socialisant de la pensée unique.

    Alors de grâce, ayez le respect de celles et ceux qui ont construit ce pays, bien souvent dans la sueur et dans la privation. Les Jeunes doivent aussi contribuer à l’effort commun. Ils ont entre les mains, jour et nuit, leur smartphone, ils paient voire s’endettent pour communiquer des données finalement imbéciles; ils veulent tout, tout de suite. La jeunesse marginale, festive, “enfoutiste”, alcoolique, n’est heureusement que très minoritaire. Parlons plutôt de cette jeunesse active, majoritaire, laquelle respecte la génération retraitée.

    Que dire des retraités qui paient les assurances sociales, la nourriture, le logis et la lessive de leurs enfants largement majeurs ? Sont-ils des profiteurs ? A qui la faute ? Il est temps de relever l’importance majeure des “Vieux” qui non seulement entretiennent financièrement leur progéniture, mais dispensent des principes de vie. Nous les “Vieux Schnocks”, nous détenons des atouts bien supérieurs à cette société de consommation : nous avons encore une éthique de vie grandie dans la difficulté.

    Alors STOP à cette culpabilisation insidieuse envers la génération des aînés. Ilk convient aussi de mettre le nez dans les abus sociaux. Svp moins de psychologues et autres intermédiaires parasites, moins d’observateurs et autres experts issus de Mai 68.

    La génération des aînés a donné; il n’est que justice qu’elle reçoive pour vivre normalement. Un grand merci à ces jeunes qui ont compris et n’adhèrent nullement aux théories socialo-démocratiques complètement pourries intellectuellement.

  2. Posté par O. Saudan le

    Il faut d’abord distinguer les deux variantes, celles à primauté des prestations (fonctionnaires et assimilées) dont l’employeur (collectivités publiques) verse des participations largement supérieures à la loi. Et les autres, qui ne recoivent qu’en fonction de ce qu’ils ont cotisé, plus une part patronale minimale.
    Le deuxième pilier est une execellente chose pour ceux qui ont occupé toujours le même emploi, comme par exemple les fonctionnaires. Pour ma part, bien qu’ayant travaillé de 15 à 65 ans, mon 2ème pilier n’atteint pas 3000.- et encore, j’y ai mis une somme importante de mon 3ème pilier lié. Ceci car au début de mon activité, ça n’existait pas et ensuite, lorsque je changeais d’entreprise, une grande partie de la part patronale restait dans la caisse et ne m’était que très partiellement transférée.
    Il y a donc des super gagnants et les autres. Finalement, ces disparités sont probablement corrigées par l’impôt sur le revenu et il n’y a pas de quoi s’indigner.
    PS: Si l’on lance une initiative pour un salaire minimum, je propose que ceci soit aussi appliqué aux retraités qui ont autant de charges que tout le monde.

  3. Posté par Pierre Arnaud de Chassipoulet le

    Cher Tintin, alors que nous donnons des milliards à toutes sortes de parasites venus s’installer souvent de force chez nous, vous nous expliquez que les vieux qui ont cotisés tout leur vie, n’ont qu’à crever dans leur coin à casser des pierres. Et c’est vous ou une nouvelle race de fonctionnaires qui allez décider qui n’a qu’à travailler. Dans votre délire, que va faire le vieux à 88 piges, se mettre au chômage peut-être? Qui engage aujourd’hui des 45 et plus, les administrations? Qui interdit aux plus de 65 ans de travailler? “La retraite est légitime pour ceux qui ne peuvent plus ni physiquement, ni intellectuellement travailler”, je crois bien que vous avez droit à la retraite. Les inspecteurs du travail non-fini vont passer vous voir. Les Grecs jusqu’à 50 ans et les Suisses travaillent à perpète! L’argent cotisé, on le donne aux jeunes, pour qu’ils puissent faire des études jusqu’à 65 ans? Vous parlez de honte, vous n’avez pas honte d’écrire des telles choses? Finalement, je crois que vous vous appelez Ouin-ouin!

  4. Posté par Jean-Paul Costantini le

    Ayant cotisé durant plus de quarante ans plus je fais partie des retraités. Je n’ai pas l’impression de vivre aux crochets des autres. Sans vouloir me vanter, je me livre à toutes sortes d’activités non-lucratives, mais pleines de satisfaction. Puisqu’on estime que les antiquités que nous sommes devenus profitent de la société, on pourrait envisager un nombre de cotisations obligatoires, avant d’avoir le droit aux diverses rentes, plutôt que fixer des âges. Beaucoup de personnes âgées pourraient se mettre à disposition gratuitement pour participer à la formation des plus jeunes, utilisant ainsi leur expérience et leur “sagesse” Tout le monde y trouverait son compte.
    Je voudrais encore préciser que la plupart des retraités sont loin d’être des nababs. Ils ont abordé le dernier chapitre du livre de leur existence, ne sachant pas combien de pages il comportera et où se situera le mot “fin”.

  5. Posté par Antonio Giovanni le

    On peut compléter l’information de M.Kunz en précisant que nombre de retraités après avoir longtemps cotisé, s’en vont dans un monde meilleur où elles ne leur servent plus, mais restent à la disposition des viennent ensuite et que nombre de plus jeunes s’arrêtent de cotiser en cessant de travailler, mais restent à charge à la société; il y a des chiffres ! Pourquoi M.Kunz ne les donne-t-il pas ?

  6. Posté par Antonio Giovanni le

    Un peu facile et un peu court; les retraités ? de quand ? les retraites ? depuis quand ? On ne sache pas que les cotisations déduites de revenu, puis imposées, ne sont pas des “sous tombés du ciel”; les montants ont été confiés à des organismes surveillés, pas trop, par l’Etat, mais qui ont pris beaucoup de libertés avec la saine et rationnelle gestion; combien sont-ils ces nababs de fonds de pension qui ont gagné des millions ? avec des fonds qui n’étaient pas les leurs. Qui parlait alors de de “..solidarité..” ? On invoque en pleurant la solidarité intergénérationnelle pour opposer dans notre société jeunes et vieux; et quand ces vieux-là cotisaient plein pot, qui est venu à leur secours en invoquant “..la solidarité intergénérationnelle..” ? personne ! En clair les mauvais gestionnaires voudraient se refaire une santé en ponctionnant à nouveau ceux qui ont déjà cotisé pour leur retraite et n’ont pas d’autre revenu ! Vous avez dit solidarité ? belle mentalité solidaire ! et pour se donner bonne conscience et quitus proposent de diminuer les cotisation des plus jeunes: jolie expérience da vases communicants. Vous avez dit solidarité ?

  7. Posté par Sergio Morosoli le

    Encore quelques coups de boutoir et ce sera la fin de tous ces “privilèges”.

    Monsieur Pierre Kunz semble ignorer que la munificence de l’AVS ne permet à personne de vivre en Suisse. C’est pour cette simple raison qu’a été créé le deuxième pilier, la fameuse LPP des années quatre-vingt. Il a cependant fallu faire le compromis du siècle, caisse de pension obligatoire oui, mais à condition que sa gestion soit confiée au privé.

    On connait la suite, chacun a établi son propre règlement, pendant des années les bénéfices ont été mirobolants, même pour des non-initiés. Certains allaient jusqu’à intégrer dans le bilan de leur entreprise les cadeaux des assureurs comme bénéfice non opérationnel. Las, nous vivons un ralentissement économique non prévu au programme.

    Il n’y a plus un jour sans que l’espérance de vie ne soit dénoncée: faudrait-il tuer tous ces vieux ? On ne rate pas une occasion de mettre en cause le taux de conversion ou celui de la rémunération du capital de celui qui aura été prévoyant. Il faut dépecer cette immense carcasse qu’est devenu le deuxième pilier avant qu’il ne sombre. D’ailleurs, ne conseille-t-on pas, sans rire, qu’un troisième pilier est devenu indispensable ?

    Monsieur Pierre Kunz va plus loin. Alors que les primes d’une assurance maladie n’étaient pas un sujet de conversation, il faudrait maintenant pénaliser ces gens qui ont tendance à devenir malades du fait qu’ils avancent dans l’âge. Mieux, on devrait les expulser des appartements qu’ils occupent indûment alors qu’ils les ont payés longtemps trop cher.

    Avec de telles idées, l’internationale socialiste a son avenir assuré.

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