Le nouveau ministre des affaires étrangères, Didier Burkhalter, a répondu à l’invitation du Groupe parlementaire des Chambres fédérales s’intéressant particulièrement aux Suisses de l’étranger.
Il a affiché une attitude positive envers la demande de l’Organisation des Suisses de l’étranger : soit élaborer une loi qui consacre mieux leur rôle, qui regroupe les objets les concernant et qui, au moins, fasse du Département des affaires étrangères le répondant de nos expatriés : à charge pour lui, dans les questions administratives, d’assurer la transversalité pour des objets rattachés à d’autres départements, assurances sociales, écoles suisses à l’étranger etc…
Dans une démarche intellectuelle qui tranche avec celle de son prédécesseur, Micheline Calmy Rey, il a aussi dit que toute mesure affectant les Suisses de l’étranger devait s’inscrire dans une conception politique, une stratégie préalablement définie. Il pensait ici à la suppression de nombreux consulats en Europe occidentale, suppression mal ressentie par nos compatriotes. Celle du Consulat de Bordeaux, par exemple, avait même étonné Alain Juppé. Or, de telles suppressions, outre les complications administratives qu’elles provoquent, par exemple pour l’établissement ou le renouvellement de passeports, affaiblissent des pôles fédérateurs pour nos communautés à l’étranger. Certes, avec l’enveloppe budgétaire qui est la sienne, notre diplomatie a dû se déployer dans de nouveaux pays. Mais il était réconfortant d’entendre notre ministre dire qu’un accent retrouvé devait être mis sur nos relations avec nos pays européens voisins ; ceux qui, comme par hasard, regroupent le plus de nos compatriotes. Réconfortant aussi de l’entendre lorsqu’il a exprimé sa volonté de rétablir la subvention pour la Revue suisse, destinée aux Suisses de l’étranger et fabriquée par l’OSE, afin de publier à nouveau six éditions par an, en partie on line en partie sur papier.
On avait l’impression, en somme, que l’OSE retrouverait son rang et son rôle de partenaire, dans un vrai dialogue, au bénéfice d’une vraie écoute ; et cela était réconfortant. La cinquième Suisse, en effet, est reconnue dans la Constitution. 700.000 porteurs de la nationalité helvétique, souvent des doubles nationaux, sont répartis dans le monde. Quelque 140.000 sont inscrits comme électeurs et votants. Beaucoup se sentent concernés et votent. A cet égard, la généralisation indispensable du vote électronique, qui doit être intégré par les cantons, devrait assurer une bien meilleure participation. Le vote par correspondance a des ratés à cause des retards postaux. Parmi ces Suisses expatriés, il y a ceux qui le sont depuis des générations, bien implantés dans leurs pays de résidence mais n’ayant pas oubliés leurs racines. La Radio romande a diffusé à cet égard des reportages étonnants. Il y a également ceux qui vont, reviennent, repartent. De plus en plus il faut considérer cette mobilité académique, scientifique, professionnelle. Mais tous sont des diffuseurs de messages émis par la Suisse, de ses valeurs, de ses caractéristiques. Tous sont à l’écoute aussi dans les différents pays où ils sont et sont de précieuses sources d’information pour la Suisse ; si elle sait les écouter.
Chaque année l’OSE organise un congrès des Suisses de l’étranger dans un canton. En 2011, c’était à Lugano. En août prochain ce sera à Lausanne. Caque année, un Conseiller fédéral l’honore de sa présence. Mais nos compatriotes attendent des actes au-delà des mots. Ils se sentent trop souvent ignorés et parfois malmenés. Le comble n’est pas venu des autorités mais des banques. Des résidents suisses aux Etats Unis ayant des comptes dans des banques suisses, même tout à fait déclarés, ont été jetés dehors par ces banques, UBS en tête, qui ne voulaient plus de comptes en Suisse de résidents US, helvètes ou non. Et cela le plus souvent sans le moindre égard sans accompagnement humain. Choquant ! On ne peut rien faire a répondu le Conseil fédéral à l’OSE.
L’organisation, elle, s’engage à fond pour cette cinquième Suisse. C’est sa vocation. Elle défend ses intérêts et est le lien de transmission. Fondation privée mais reconnue d’intérêt général elle a un Conseil de 140 membres, dont 120 sont des délégués des associations de par le monde. Parmi éles 20 membres de l’intérieur les principaux partis politiques sont représentés. Le Comité, de neuf membres, est l’exécutif. Cinq doivent vivre à l’étranger. Atour de l’OSE se greffent des éléments particuliers, telle l’Association pour les écoles suisses ou l’Association d’aide à la formation en Suisse de jeunes compatriotes de l’étranger. Enfin l’OSE a lancé une grande plateforme informatique «svisscommunity» qui permet des communications entre Suisses de l’étranger, entre eux et la Confédération, les cantons…
Bref, l’OSE fait ce qu’elle peut avec les moyens accordés. Mais, à la fin, tout dépendra d’une conscience et d’une volonté politiques. La cinquième Suisse est un atout évident pour la Suisse, laquelle a plus besoin que jamais de ces relais. Il faut qu’elle ne soit pas seulement épisodiquement honorée, mais qu’elle soit intégrée et utilisée dans le meilleur sens du terme.
Merci à M. François Pillonel pour ses précisions fort pertinentes venant “de l’intérieur” de l’Ambassade de Suisse à Ankara. Je n’ai personnellement pas connu M. Kessler – je faisais mes études en Suisse à cette époque. Son nom me vient de ce que m’a rapporté mon père qui était alors un des quelques membres de la “diaspora” Suisse locale à Ankara. Le nom de Kissling m’est également familier.
Comme je comprends la situation, la période où M. Kessler était ambassadeur était particulièrement bien ressentie par la communauté Suisse locale car la représentation Suisse était, sinon, inexistante pour eux. Et, il semble que cet état de choses tenait alors en premier lieu à l’ensemble du personnel de l’Ambassade. En ce qui concerne le “certain Cramer” qui a brièvement passé par l’Ambassade, il s’agit bien d’un membre de ma famille, mais d’une branche plus éloignée qui ne fait pas partie des “levantins” qui se sont établis en Turquie vers 1840. J’ai été bien amusé par l’incident du “passeport” qui est entièrement comparable à mon expérience des “15 francs”. Les mentalités ont bien changé depuis – je l’espère du moins – chez nos représentants à l’étranger.…
Permettez-moi, tout d’abord, de vous dire que j’apprécie énormément votre journal et que les articles qu’il pulbie m’intéressent au plus haut point. En lisant les remarques de M. Noël Cramer, je ne peux m’empêcher de réagir sur le seul point qui concerne l’Ambassadeur Kessler, car, pour le reste, il s’agit de faits prouvés. L’Ambassadeur Kessler, Eric de son prénom, n’avait jamais été diplomate avant d’être Ambassadeur en Turquie. Il était certes Suisse d’origine, mais il parlait, tant l’allemand que le français, avec un tel accent british que personne ne le prenait pour un compatriote. Il a passé toute sa vie professionnelle à Londres en tant que correspondant le la NZZ. Sa femme, anglaise et dont j’ai oublié le prénom, ne vivait pas à Ankara au côté de son mari, mais en sa qualité d’archéologue connue et reconnue en Grande Bretagne, elle voyageait en permanence sur tout le territoire turc sans ne jamais apparaître aux rencontres avec les compatriotes qui lui étaient de toute façon étrangers. L’Ambassadeur avait surtout à l’époque la fonction de s’occuper du chien de Madame, portant le doux nom de “MISCHOU”. Eric Kessler n’a jamais organisé une seule réception de Suisses à sa Résidence de l’Atatürk Bulvari. Ceux qui le faisaient pour lui étaient le Conseiller d’Ambassade Paul GOTTRET (successeur d’ailleurs à ce poste d’un certain Cramer dont l’épouse était, je crois, norvégienne), qui fut ensuite Chef du Protocole du DPF (Département politique fédéral avant de passer à DFAE), puis Chef du Protocole du Canton et République de Genève, père de notre actuel Ambassadeur à Tripoli, M. Michel Gottret. Celui qui l’assistai dans l’organisation des rares réceptions à l’Ambassade était le Vice-Consul Max Kissling. Et, celui qui apprenait son métier, de 1957 à 1959, dans cette Ambassade n’était autre que le soussigné. Je voudrais aussi préciser qu’à l’époque, la colonie suisse immatriculée auprès de l’Ambassade comprenait 24 personnes et qu’en deux ans, nous n’avions eu qu’un seul passeport à établir. J’étais là pour mon stage au DPF mais le “célèbre” passeport a été établi par le Consul Kissling qui avait refusé de m’en confier la confection, de peur que je le “râte”!!! Bref, les choses ont tout naturellement bien évolué!!
Je tenais à vous faire part de ces précisions car, pour moi, il s’agit de choses vécues de l’intérieur de l’Ambassade et non pas d’un membre de la colonie que je respecte, naturellement au plus haut point.
C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu votre article. Né à Trébizonde en Turquie en 1941, je me souviens de l’époque où nous recevions “L’Echo” – le journal destiné aux Suisses de l’étranger – qui nous parvenait régulièrement malgré les aléas de la distribution postale locale. Comme enfant, je recevais même de l’Ambassade l’Almanach Pestalozzi – qui a certainement servi à orienter mon esprit vers mes vocations futures. Mes parents écoutaient aussi la Radio Suisse Internationale durant les rares moments où elle n’était pas brouillée par les émetteurs de la propagande soviétique situés en Géorgie. Mais, à cette époque aussi la relative insensibilité des consuls et ambassadeurs suisses envers les occasionnelles difficultés de leurs concitoyens était connue des Suisses de l’étranger.
Ma famille (d’origine zurichoise) a habité la Turquie du deuxième tiers du 19e siècle aux années 1970, tout en gardant sa nationalité suisse. La bienveillance des différents régimes politiques turcs envers les ressortissants occidentaux (hormis les Grecs…) garantissait une existence relativement tranquille. Mais, dans les rares cas où mes parents avaient besoin d’une assistance diplomatique, je me souviens qu’après avoir vainement contacté la représentation suisse, ils se tournaient vers l’Ambassade d’Angleterre qui, généralement, résolvait le problème !
En anecdote, voici l’aventure que j’ai vécue en août 1966 à Ankara lorsque mon père travaillait encore comme expert en génie civil auprès du ministère des travaux publics turcs, et que je voyageais en compagnie de deux amis étudiants:
Au milieu de notre séjour, un de mes compagnons apprit que son père venait de décéder à La Chaux-de-Fonds. Il était urgent qu’il rejoigne sa famille. Or, à cette époque, la Turquie appliquait des restrictions à l’exportation des devises et l’achat d’un billet d’avion pour une destination étrangère avec des livres turques était soumis à une surtaxe de 100%. Nous avons réuni tous nos francs suisses, et mon père y a contribué avec les quelques billets qu’il avait, mais il manquait encore 15 francs sur les quelque 600 que coûtait alors le vol. A l’Ambassade de Suisse, le secrétaire nous dit que sans l’accord de l’Ambassadeur (un homonyme d’un grand séducteur vénitien) qui était momentanément en croisière sur son bateau en mer Égée, il regrettait de ne pas pouvoir disposer librement de “l’argent de la Confédération” et qu’il ne pouvait rien faire pour nous. Il a fallu que mon père aille personnellement négocier, signer des garanties bancaires sur ses comptes en Suisse et, comble des affronts, assurer que le remboursement aurait lieu même dans le cas où son propre décès surviendrait entre-temps.
Précisons tout de même que l’attitude du personnel de l’Ambassade dépendait beaucoup de la personnalité de l’Ambassadeur en place. L’ambassadeur Kessler qui avait occupé ce poste précédemment conviait fréquemment la petite communauté suisse à des réceptions à l’Ambassade. Ces contacts lui permettaient aussi, en bon diplomate, de se tenir au courant de manière objective des conditions de vie de la population locale dans son ensemble.