Konrad Hummler, un homme qui fait face

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Les premières escarmouches avec la Justice américaine laissent à penser, que Konrad Hummler ne s’aplatira pas aussi servilement que le Conseil fédéral devant les remontrances de la – grande – Sister Republic.

Il y deux ou trois ans j’assistai à l’une des célèbres conférences données par «l’Oracle de Saint Gall». Le palais de Beaulieu était comble. Il a commenté avec clarté et verve les différents aspects de la crise, subprimes, Lehmann et autres. Après avoir partagé ses réflexions sur les défis à venir, il conclut que le moment était surtout venu de compter ce qui est vraiment important, les amis.
Il semble aujourd’hui qu’il n’en ait plus beaucoup, des amis, de notre côté de la Sarine encore moins qu’ailleurs. C’est dommage et c’est injuste.
Certes, sa vénérable maison s’est égarée en accueillant les clients américains vomis par l’UBS. Certes, M. Hummler aura t’il présumé de sa position de banquier purement suisse. Certes, a t’il quelques fois plastronné un peu plus que de raison.
La plus vielle banque de Suisse aura aussi réalisé, un peu tard, que si l’on pardonne beaucoup au grand, le petit ne peut pas attendre la moindre compréhension: c’est ce qu’on appelle les effets collatéraux du risque systémique.
Mais Konrad Hummler assume. Qu’il ait approuvé, en gros ou en détail, le principe ou les modalités de la récupération des clients US, peu importe: en sa qualité d’associé-gérant et surtout de figure de proue de Wegelin, il n’a pas fuit ses responsabilités.
Pour l’anecdote, il ne s’est pas caché derrière «le caractère affirmé de son épouse».

Un vrai capitaine

Surtout, M. Hummler n’a pas failli à sa responsabilité entrepreneuriale, à ses devoirs de capitaine d’industrie.  Lâché par ceux-là même qui s’étaient empressés au chevet de l’UBS, il a pris son destin en main, sabordé l’œuvre de sa vie, sauvé ses 700 collaborateurs, protégé ses clients. Il a ainsi fait preuve ainsi d’un courage et d’une audace auxquels la classe politique ne nous avait plus habitués.
Le Giornale del Popolo du 29 janvier titrait ainsi «Un capitano que salva marinai e passaggero.» En revanche, la presse romande s’est surtout acharnée sur la chute d’un banquier, dont il était, par ses bons mots et ses déclarations chocs, la coqueluche, et qu’aujourd’hui elle considère dangereusement remuant.
Les premières escarmouches avec la Justice américaine laissent à penser, que Konrad Hummler ne s'aplatira pas aussi servilement que le Conseil fédéral devant les remontrances de la - grande - Sister Republic. Il va faire valoir ses droits, car il en a, comme celui, élémentaire, d’être assigné en bonne et due forme. Ceux qui, en Suisse, l’ont déjà condamné, semblent l’oublier.
Que les esprits chagrins ne perdent pas espoir, leur Schadenfreude sera sans doute satisfaite, le jour où Konrad Hummler, vaincu par un adversaire, certes sur le déclin, mais encore formidablement puissant, courbera l’échine ....et passera à la caisse.
Il est pourtant des défaites plus glorieuses que les victoires, quand celles-là révèlent le courage des individus. En 480 avant notre ère, dans le défilé des Thermopyles, c’est Léonidas qui est entré dans l’histoire, quand 200’000 Perses sont finalement venus à bout de ses 300 Spartiates.

6 commentaires

  1. Posté par Bruno Bertez le

    La réflexion de Pierre-Yves Tschanz me parait essentielle et les beaux esprits feraient bien de la méditer. L’aspect évasion fiscale est-il vraiment plus important que le droit à la sphère privée des clients; mais c’est oublier que le fascisme a besoin de supprimer la sphère privée privée pour s’emparer d’une société. Et j’ajouterais que la résistance, a besoin pour s’opposer, de disposer de ressources hors de portée des gouvernants. Avant que les choses ne tournent mal, tout gouvernant, tout gouvernement est respectable; c’est après que l’on s’apercoit de sa dérive, quand il est bien tard.. Les Francais en particulier feraient bien de s’interroger sur la question de savoir si la Résistance aurait pu se financer dans un monde totalement transparent , controlé par les envahisseurs et leurs alliés collaborateurs.
    Mais il est vrai, j’oubliais, que l’Histoire s’est arretée, que les gouvernements sont omniscients , ils savent, eux, que plus jamais cela ne produira. Ils prévoient tout n’est ce pas ? Ils détiennent la Verité n’est ce pas ?
    Mais un gouvernement qui détient la Vérité n’est ce pas déja le début du fascisme?

  2. Magnifique article concernant Monsieur Hummler qui a eut le courage d’écrire ce que beaucoup pensaient tout bas,mais la grande démocratie d’outre Atlantique a la mémoire longue et ne pardonne pas à ceux qui la critiquent,et comme nous sommes des vassaux……Licorne

  3. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Cher Antoine, votre regard sur Konrad me rencontre! Me plaît. Et m’inspire de vous raconter une vielle histoire. Une histoire biblique. Vous savez peut-être combien l’oint, David, en a bavé de la part du Roi encore en place. Et que David n’a pas profité de l’occasion de tuer Saül, dans une grotte. Vous savez peut-être aussi l’acceuil que David a réservé au soldat qui lui a annoncé triomphalement la mort de Saul! Si vous ne savez pas, jetez un oeil dans le livre de Samuel, ou dans les Chroniques! Ca vaut le détour! Je sais que c’est chiant! Mais j’ai reçu de m’endormir en entendant ces histoires quand j’étais âgé de sept ans, et de les relire avant d’avoir atteint ma dixième année. Il va falloir que je m’y remette, car je suis remonté à bloc contre le fait que ces textes ont été enfermés dans le religieux! Un peu comme sont ornées de fleurs les tombes des prophètes que nos pères ont tué…. (ont tués? tant pis, j’ai oublié les règles de l’accord du participe passé, après avoir…) Que nos pères ont tués! Bonne nuit Antoine.

  4. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Aïe, la lecture des articles proposés par les Observateurs exige du temps, beaucoup. Sans omettre celle des commentaires. Je donne donc écho à celui-ci avant de le lire. Ce que je ferai demain! Le titre me touche: “un homme qui fait face”! Le rire est le propre de l’Homme, ai-je lu et entendu! Mais de quel homme? suis-je fondé de m’interroger! En me souvenant de rires sarcastiques, ou gras répondant à des plaisanteries graveleuses. Que l’on dit de “corps de garde”! (Ce qui me renvoie à mes propos sur “la volonté de défense”.) Un homme qui fait face! Un homme qui conserve le cap! C’est ainsi que je me suis désigné. En y ajoutant la nudité! Ce qui est contraire aux préceptes de la psychologie, car le dévoilement rend vulnérable. Mais c’est aussi un moyen de connaissance ultra rapide!

  5. Posté par Pierre-Yves Tschanz le

    L’éloquent article d’Antoine Maillard a le mérite de débanaliser l’affaire et d’en faire une cause. En effet, au-delà de son cadre bancaire et judiciaire, il y a probablement une question à poser et peut-être une cause à défendre: l’aspect d’évasion fiscale est-il vraiment plus important que le droit à la sphère privée des clients? Certes, la tendance est d’accorder moins de poids à la seconde. Mais c’est oublier que le fascisme a besoin de supprimer la sphère privée pour s’emparer d’une société. Le petit pays devrait continuer de défendre la sphère privée. S’il ne le fait pas, on ne peut que saluer ceux qui montent au créneau.

  6. Posté par Laurent Garnier le

    Monsieur Konrad Hummler est certes un homme brillant et j’ai été aussi impressionné que vous par ses conférences. Ceci-dit, en matière de gestion, les performances de la banque Wegelin ne sont pas extraordinaires. La banque Wegelin se distingue surtout par ses prouesses en marketing, l’objectif étant d’augmenter cette fameuse masse active. Dans le private banking, les avoirs sous gestion sont indispensables, c’est l’équivalent du bois pour le menuisier ou de la farine pour le boulanger. Les avoirs sous gestion sont un des éléments les plus importants pour une banque. Les banques privées ont souvent engagé des banquiers sur la base de la clientèle qu’ils pouvaient rabattre, et non pas de leurs qualités professionnelles. Et c’est bien là le problème, pour obtenir ces fonds, Wegelin était prête à tout, même à affronter les Perses, comme vous le dites si bien. En moins de 5 mois, une banque bicentenaire est tombée.
    Un autre monstre de la finance a agi de la même manière, le grand patron de l’UBP à Genève. En moins de dix ans, la banque privée genevoise a réussi à obtenir des sommes énormes du Moyen-Orient. Pourtant rien ne laissait penser que cette banque détenue par une famille israélite, pouvait devenir la banque de référence dans le Golfe. C’était sans compter sur l’esprit d’entreprise de son grand patron, Edgar de Picciotto. Mais là aussi, la chute fût brutale et les investisseurs arabes sont partis.

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