Michel Garroté -- Simone Veil, qui avait porté la loi légalisant l'avortement en 1974, est décédée vendredi 30 juin 2017 au matin à l'âge de 89 ans. Elle dépénalisera l'avortement en songeant notamment aux femmes qui avaient recours aux avortements clandestins, tout en défendant une position d’équilibre qui faisait, à l'époque, de l’IVG, une exception et un dernier recours, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui avec "l'avortement de confort" comme moyen de contraception, ce qui n'était le but visé en 1974.
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Au demeurant, la formule "interruption volontaire de grossesse" est un peu hypocrite. Une "interruption" qualifie ce que l'on interrompt avant de le reprendre plus tard. Or, l'avortement, une fois réalisé, est irréversible. On l'a "interrompu", sans pouvoir le reprendre. "Interruption volontaire de grossesse", avec le mot "volontaire", c'est un peu démagogique : à quel point l'avortement est-il "volontaire", si le "planning familial" et la famille poussent une femme à avorter sans forcément lui décrire les conséquences ?
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Lorsqu'elle a fait voter la loi sur la dépénalisation de l'avortement par le Parlement, elle était ministre de la Santé, dans le gouvernement Chirac, et, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing. Elle était donc membre d'un gouvernement de droite et la loi est passée au Parlement avec les voix de la gauche.
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C'est Giscard qui voulait cette loi et c'est lui qui a été chercher Simone Veil dans ce contexte. Il ne l'a pas nommée ministre de la Justice alors qu'il s'agissait d'une loi, la loi sur la dépénalisation de l'avortement (Simone Veil était juriste), mais ministre de la Santé (alors que Simone Veil n'était pas médecin). Valéry Giscard d'Estaing a choisi une femme, car il pensait que cela faciliterait l'acceptation de la loi en question, au motif de la "libération de la femme".
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Née le 13 juillet 1927 à Nice dans les Alpes-Maritimes au sein d'une famille juive et laïque, et fille d'un architecte, Simone Jacob, Simone Veil est déportée, à l'âge de 16 ans, en 1944, à Auschwitz, avec sa famille. Elle rencontre à Sciences-Po son futur mari Antoine Veil. Le couple, marié en 1946, aura trois enfants. Antoine est décédé en avril 2013. Simone Veil commence en 1956 sa carrière dans la magistrature, comme substitut à l'administration centrale du ministère de la Justice.
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Elle est la première femme à devenir secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature (1970-74). Entrée en politique en 1974, comme ministre de la Santé dans le gouvernement Chirac, elle le demeurera dans les trois gouvernements Barre, se voyant adjoindre la Sécurité sociale en 1977-78, et la Famille en 1978-79. Tête de liste UDF lors des premières élections au Parlement européen au suffrage universel en 1979, elle renonce à son poste ministériel pour devenir députée européenne puis présidente du Parlement européen (1979-1982).
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Réélue en 1984 et 1989, Mme Veil siègera au Parlement à Strasbourg jusqu'en 1993. De 1993 à 1995, Mme Veil est ministre d'Etat, ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville, dans le gouvernement Balladur. Soutien de Raymond Barre à la présidentielle de 1988, elle rallie Edouard Balladur dans la course à l'Elysée en 1995. Elle soutient Nicolas Sarkozy en 2007. Les sondages l'ont à maintes reprises présentée comme "la femme préférée des Français", sachant qu'un sondage n'est jamais qu'un sondage...
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A propos de Simone Veil et de l'IVG, Jeanne Smits, très critique, écrit notamment, sur son blog (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Son nom restera pour toujours lié à la loi dépénalisant l'avortement sous l'euphémisme ravageur, "interruption volontaire de grossesse". Simone Veil n'était certes pas seule dans cette entreprise de mort dont les loges ont revendiqué la paternité, et il peut sembler de mauvais goût de n'évoquer que cela dans cette petite « nécro » très parcellaire.
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Jeanne Smits : Mais enfin, c'est un aspect de sa vie que la presse dans son ensemble juge déterminant pour lui « tresser des couronnes » aujourd'hui et elle-même n'a jamais exprimé de regrets. Au contraire, elle a avec quelque mépris souligné dans son autobiographie que les évêques de France étaient probablement plus soucieux de leur sécurité sociale à l'époque, en 1974, que d'une mobilisation générale contre une loi qui, parmi les premières en Occident, a donné une justification légale à l'assassinat des enfants dans le ventre de leur mère, moyennant force conditions [ndmg - à l'avortement] qui ont été mollement appliquées, voire pas du tout.
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Jeanne Smits : A raison de quelque 200.000 victimes par an, mal an mal an, on arrive à près de 8,5 millions de petites vies supprimées avec la bénédiction du législateur, sans compter les effets épouvantables sur les femmes qui ont cru qu'avorter, cela ne se faisait sans doute pas « de gaieté de cœur » mais que c'était une sorte de droit.
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Jeanne Smits : Peut-être Simone Veil a-t-elle, au fil des ans, regretté que cela devienne de plus en plus un droit légalement affirmé par l'élargissement constant des possibilités d'accès à l'IVG, à tel point que l'opposition à l'avortement pour des raisons morales est de plus en plus assimilée à une pression indue sur les femmes, et pénalisée [ndmg - Simone Veil l'a regretté et elle l'a fait savoir]. L'avortement devait être réservé aux cas graves et rester « exceptionnel », assurait-elle en 1974, ajoute Jeanne Smits (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Michel Garroté pour Les Observateurs
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http://leblogdejeannesmits.blogspot.ch/2017/06/deces-de-simone-veil-quelques.html
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Blog Archives
Laurence Rossignol condamnera-t-elle Simone Veil ?
Michel Garroté - Récemment, la ministre totalitaire et commissaire politique Laurence Rossignol a lancé un amendement liberticide et halluciné qui vise, soit-disant, à sanctionner les sites Internet qui, sous couvert d’une présentation neutre et objective, seraient, dit-elle, des "paravents de groupes anti-IVG qui veulent dissuader les femmes qui souhaitent recourir à l’IVG" (cette première allégation est complètement débile). Or, dit-elle, les manipulations, les informations faussées délivrées sur des sites qui se font passer pour neutres portent atteinte au libre choix des femmes (cette deuxième allégation, elle aussi, est complètement débile ; la France est-elle devenue une deuxième Corée-du-Nord ?).
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A ce propos, le site Internet catholique conservateur Le Salon Beige signale que le billet récemment publié par Thibaud Collin sur son blog est intéressant à double titre, par son contenu d'abord mais aussi car il permet de se replonger dans la Loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de la grossesse (dit loi Veil) ainsi que dans le discours prononcé par Simone Veil le 26 novembre 1974. C'est édifiant de voir à quel point la situation a empiré.
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Voici quelques extraits du discours de Simone Veil qui pourraient presque désormais justifier sa présence à la prochaine Marche pour la Vie (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : "La loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie. Il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu'en cas de nécessité et selon les conditions définies par la présente loi" [Article n°1 de la loi]. "Je le dis avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue. Mais comment le tolérer sans qu’il perde ce caractère d’exception, sans que la société paraisse l’encourager ? C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame.
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C’est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme. Le deuxième absent dans ce projet pour beaucoup d’entre vous sans doute, c’est le père. La décision de l’interruption de grossesse ne devrait pas, chacun le ressent, être entreprise par la femme seule, mais aussi par son mari ou son compagnon. Je souhaite, pour ma part, que dans les faits il en soit toujours ainsi. Enfin, le troisième absent, n’est-ce pas cette promesse de vie que porte en elle la femme ? Je me refuse à entrer dans les discussions scientifiques et philosophiques dont les auditions de la commission ont montré qu’elles posaient un problème insoluble.
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Plus personne ne contexte maintenant que, sur un plan strictement médical, l’embryon porte en lui définitivement toutes les virtualités de l’être humain qu’il deviendra. Tout en évitant d’instituer une procédure qui puisse la détourner d’y avoir recours, le projet prévoit donc diverses consultations qui doivent la conduire à mesurer toute la gravité de la décision qu’elle se propose de prendre. Cette tâche de dissuasion et de conseil revient au corps médical de façon privilégiée. Il va sans dire que nous souhaitons que ces consultations soient le plus diversifiées possible et que, notamment, les organismes qui se sont spécialisés pour aider les jeunes femmes en difficulté puissent continuer à les accueillir et à leur apporter l’aide qui les incite à renoncer à leur projet.
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Ensuite, l’interruption de grossesse ne peut être pratiquée que par un médecin. Mais il va de soi qu’aucun médecin ou auxiliaire médical ne sera jamais tenu d’y participer. Si l’on s’en tient aux principes généraux de la Sécurité sociale, l’interruption de grossesse, lorsqu’elle n’est pas thérapeutique, n’a pas à être prise en charge. Faut-il faire exception à ce principe ? Nous ne le pensons pas, car il nous a paru nécessaire de souligner la gravité d’un acte qui doit rester exceptionnel. Ce qu’il faut aussi, c’est bien marquer la différence entre la contraception qui, lorsque les femmes ne désirent pas un enfant, doit être encouragée par tous les moyens et dont le remboursement par la Sécurité sociale vient d’être décidé, et l’avortement que la société tolère mais qu’elle ne saurait ni prendre en charge ni encourager.
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Rares sont les femmes qui ne désirent pas d’enfant ; la maternité fait partie de l’accomplissement de leur vie et celles qui n’ont pas connu ce bonheur en souffrent profondément. Si la loi est générale et donc abstraite, elle est faite pour s’appliquer à des situations individuelles souvent angoissantes ; que si elle n’interdit plus, elle ne crée aucun droit à l’avortement (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Il est vrai que personne ne peut éprouver une satisfaction profonde à défendre un tel texte : personne n’a jamais contesté, et le ministre de la Santé moins que quiconque, que l’avortement soit un échec quand il n’est pas un drame. Alors, Laurence Rossignol condamnera-t-elle Simone Veil ?
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Introduction, adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://philosophe-chretien.blogs.la-croix.com/ivg-les-pierres-crieront/2016/09/29/
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