Les musulmans britanniques – dont l’écrasante majorité a voté travailliste en 2010 – pourraient déterminer le résultat de l’élection du prochain Premier ministre.
PAR SOEREN KERN, Jeudi 30 avril 2015
Le leader du parti travailliste britannique, Ed Miliband (photo ci-dessus), a promis, s’il est élu Premier ministre le 7 mai, de faire passer une loi contre l’« islamophobie ».
Cette initiative – qu’un observateur a qualifiée d’« extrêmement alarmante » en raison de ses conséquences pour la liberté de parole en Grande-Bretagne fait partie d’un effort de Miliband pour flatter les électeurs musulmans dans ce qu’il appelle
« l’élection générale la plus serrée depuis une génération ».
Les conservateurs au pouvoir et l’opposition travailliste étant au coude à coude à quelques jours du scrutin, les musulmans britanniques – dont l’écrasante majorité a voté travailliste en 2010 – pourraient bien déterminer le résultat de l’élection du
prochain Premier ministre.
Dans une interview aux Muslim News, Miliband a déclaré:« Nous allons en faire [de l’islamophobie] un crime aggravé. Nous allons faire en sorte que cela soit inscrit au casier judiciaire afin d’être sûrs que la police éradique l’islamophobie qui est un crime de haine. Nous allons changer la loi sur ce point afin qu’il soit
absolument clair que nous avons horreur des crimes de haine et de l’islamophobie. Ce sera la première fois que la police enregistrera [comme telles] les agressions islamophobes dans tout le pays. »
On dirait que Miliband tente de rouvrir un vieux débat britannique sur la « haine religieuse ». Entre 2001 et 2005, le gouvernement travailliste d’alors, sous la conduite Premier ministre Tony Blair, avait tenté à deux reprises [voir les liens]
d’amender la partie 3 de la loi de 1986 sur l’ordre public pour étendre les dispositions sur l’incitation à la haine raciale de façon à ce qu’elles couvrent aussi l’incitation à la haine religieuse.
Ces tentatives s’étaient heurtées à l’opposition de ceux qui estimaient que ces mesures allaient trop loin et menaçaient la liberté de parole. À l’époque, ces critiques faisaient valoir que la définition du gouvernement travailliste pour la « haine religieuse » était si draconienne qu’elle faisait de toute critique de l’islam un crime.
En janvier 2006, la Chambre des Lords avait approuvé la Loi sur la haine raciale et religieuse, après avoir amendé le texte de façon à interdire seulement les propos « menaçants » et non ceux qui étaient seulement injurieux ou insultants. Les législateurs ont aussi précisé que seuls seraient punissables les propos comportant l’intention, et non seulement le risque, de provoquer la haine raciale. Ils ont aussi ajouté que le prosélytisme, la discussion, la critique et le fait d’insulter ou de se moquer d’une religion, d’une croyance ou d’une pratique religieuse ne seraient pas des délits.
La promesse renouvelée de Miliband de faire de l’« islamophobie » (un terme qu’il ne définit pas) un « crime aggravé » est peut-être le signe qu’il tente de transformer la loi de 2006 – qui fixe déjà une peine maximale de sept ans de prison pour l’incitation à la haine religieuse – en une véritable loi musulmane contre le blasphème.
D’après le commentateur britannique Leo McKinstry, « La proposition de Miliband est contraire à toute la tradition de la démocratie occidentale, qui veut que les gens soient punis seulement pour leurs actes et non pour leurs opinions. » Dans un article d’opinion [voir lien], il ajoute :« Dans la Grande-Bretagne de Miliband, il sera impossible de critiquer le moindre aspect de la culture musulmane, que ce soit la propagation de la burqa, l’établissement de tribunaux
islamiques ou la construction de mosquées colossales. Nous vivons déjà dans une société où Mohammed est devenu le prénom masculin le plus répandu [chez les nouveau-nés] et où un enfant né à Birmingham a plus de chance d’être musulman
que chrétien. S’il remporte l’élection, Miliband fera en sorte que l’islamisation toujours plus rapide de notre pays continue sans frein. »
McKinstry affirme que Miliband cherche à gagner la faveur des trois millions de musulmans britanniques afin de « renforcer le vote travailliste des villes.
Les musulmans sont en train de devenir un bloc électoral essentiel dans la politique britannique et sont déjà en mesure de décider du résultat d’élections locales dans de nombreux endroits du pays, comme il ressort d’un rapport du Conseil musulman de Grande-Bretagne, une organisation faîtière.
Le rapport montre que la population musulmane britannique est en grande majorité jeune et exercera une influence politique croissante avec le temps. L’âge médian des musulmans britanniques est 25 ans, contre 40 ans pour l’ensemble de la population.
Une extrapolation indique qu’un million de musulmans britanniques de 18 ans et plus pourront voter cette année.
D’après une étude, les musulmans pourraient déterminer le résultat de 25% des 573 sièges au Parlement en Angleterre et au Pays de Galles.
D’autres font valoir que la communauté musulmane britannique est ethniquement diverse et a peu de chances de voter de manière uniforme. Un analyste a soutenu que le potentiel d’influence des musulmans ne se réalisera pas cette année, faute d’une véritable organisation du vote musulman au niveau national.
Une étude publiée par Theos, un think-tank basé à Londres, a découvert que si les musulmans votent systématiquement travailliste, c’est pour des raisons socio-économiques et non religieuses.
Une enquête de la BBC, le 17 avril, a montré que près d’un quart des électeurs « asiatiques » [Pakistanais, etc.] ne savent toujours pas pour quel parti ils voteront. Certains des sondés ont dit que ce sont les questions économiques qui décideront
pour qui ils voteront.
Quoi qu’il en soit, l’influence des musulmans dans l’élection de 2015 dépendra largement de leur taux de participation, qui a été notoirement bas dans le passé. On estime que seuls 47% des musulmans britanniques ont voté en 2010.
Depuis lors, plusieurs campagnes ont été menées pour les encourager en 2015 [liens : Get Out & Vote, Muslim Vote and Operation Black Vote]. Un autre groupe, YouElect [c’est vous qui élisez], affirme : « 53% des musulmans britannique n’ont pas voté en 2010. Ce chiffre énorme montre que beaucoup de musulmans ses sentent ignorés par les politiciens et sont désabusés du processus politique.» Avec la montée de la rhétorique islamophobe en politique et une quantité toujours grandissante de lois anti-terroristes qui visent spécifiquement les musulmans, il est plus important que jamais que les musulmans utilisent leur droit de vote pour montrer aux politiciens qu’ils doivent changer d’attitude et de ligne de conduite.» YouElect veut faire passer le message que vous pouvez faire quelque chose sur les sujets qui vous tiennent à cœur. Nous avons lancé une campagne avec le hashtag #SortItOut, qui appelle les musulmans à voter (…).
» Avec 100'000 jeunes musulmans de plus qui pourront voter cette année, et 26 circonscriptions ayant une population musulmane de plus de 20%, la communauté musulmane a une occasion très réelle d’exercer une influence sur la politique
britannique. »
Ce n’est cependant pas l’avis de tous les musulmans.
Au Royaume-Uni, des islamistes manifestent contre le vote qui aura lieu le 7 mai. Affiche : NE VOTEZ PAS – Personne n’a le droit de légiférer à part Allah :
Le prédicateur islamiste Anjem Choudary, né en Grande-Bretagne, mène campagne, lui, pour appeler les musulmans à ne pas voter. Dans une série de messages sur Twitter avec le hashtag
#StayMuslimDontVote [restez musulmans, ne votez pas], il explique que voter est un « péché » contre l’islam car Allah est « l’unique législateur ». Il dit aussi que les musulmans qui votent ou qui briguent une fonction publique sont des « apostats ».
D’autres islamistes britanniques suivent la même voir. Des affiches jaune vif proclamant que la démocratie « viole la loi d’Allah » ont été vues à Cardiff, capitale du Pays de Galles, et à Leicester. dans le cadre d’une campagne appelée
#DontVote4ManMadeLaw [ne votez pas pour une loi humaine].
Une de ces affiches disait :« La démocratie est un système où l’homme viole la loi d’Allah et décide ce qui peut ou ne peut pas être permis à l’humanité, sur la seule base de ses caprices et de ses désirs.» L’islam est la seule solution véritable et efficace pour le Royaume-Uni. C'est un système global de gouvernance dans lequel on applique les lois d’Allah et on observe la justice. »
Soeren Kern est Senior Fellow à l’Institut Gatestone de New York et Senior Fellow en politique européenne au Grupo de Estudios Estratégicos à Madrid.
Cet article est paru en anglais sur GatestoneInstitute.org via
Merci à Cenator pour la traduction