Renaud Camus à Bruxelles : qu’est-ce que le Grand Remplacement

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Mesdames et Messieurs les Députés
Mesdames et Messieurs les Sénateurs
Mesdames et Messieurs,

Vous avez bien voulu m’inviter à vous entretenir du Grand Remplacement, je vous en remercie. Toutes les occasions sont bonnes de corriger sur ce sujet des assertions plus fausses les unes que les autres. C’est au point qu’on pourrait procéder par la négative et définir la notion, ou le syntagme, l’expression Grand Remplacement, par tout ce que le Grand Remplacement n’est pas et par tout ce que ses adversaires — qui sont les adversaires du nom mais les partisans de la chose — disent qu’il est.

La première chose que le Grand Remplacement n’est pas, c’est une théorie. Plût au Ciel qu’il en fût une, et rien d’autre ! Qu’il n’en soit pas une ne signifie nullement, bien entendu, que je n’ai pas de théorie. J’en ai une : elle se nomme le remplacisme global, le remplacisme global davocratique, même, d’après la gestion du parc humain par Davos, les grands argentiers, la finance, les banques, les fonds de pension, les hedge funds, les multinationales, les gafam, le management et la cybernétique. Le Grand Remplacement, si colossal qu’il soit, puisqu’il affecte des dizaines de nations et se déroule sur trois continents au moins, n’est d’ailleurs qu’une infime partie de ce dont rend compte le remplacisme global. Ma théorie, je l’expose longuement dans l’énorme volume intitulé La Dépossession. Et certes le Grand Remplacement est par excellence une dépossession, pour les peuples dépossédés. Mais comme la Grande Peste, la Grande Guerre ou la Grande Dépression, il est d’abord un chrononyme, un nom pour une époque d’après son phénomène de très loin le plus important : le changement de peuple et de civilisation, en une ou deux générations. Il y avait là un peuple, depuis des siècles ou des millénaires, il y en a maintenant un ou plusieurs autres.

Le changement de peuple implique nécessairement le changement de civilisation : pour croire qu’il puisse en aller autrement il faut une grande méconnaissance de l’espèce humaine, un grand mépris de l’homme qu’on imagine interchangeable à merci, comme un quelconque produit de vaisselle, ou encore une grande vanité, comme celle des Français qui croient leurs “valeurs” et la perfection de leur mode de vie si universels, si universellement admirables, et désirables, que n’importe qui s’y convertira automatiquement à peine y aura-t-il été exposé quelques mois ou quelques années : vanité que chaque jour qui passe s’ingénie à démentir. La seule assimilation encore à l’ordre du jour est celle des remplacés à leurs remplaçants, et celle-là va bon train. Quant à l’intégration elle a toujours été possible pour des individus, elle ne l’est jamais pour des peuples, et moins encore pour des peuples dotés d’une civilisation millénaire et d’une religion conquérante, qui fait leur force.

On peut me faire bien des reproches mais même mes pires ennemis sont obligés de reconnaître que je n’ai jamais fourni la moindre preuve ni offert le moindre chiffre à l’appui de ce que j’avance. S’abaisser à fournir des preuves serait se prêter à une farce : on ne fournit pas de preuves d’un tremblement de terre, d’un tsunami, d’une épidémie de choléra ou de grippe espagnole : pas plus qu’on ne fournit de preuves d’une révolution, ou d’une occupation étrangère. Le Grand Remplacement c’est le mystère en pleine lumière, c’est la lettre volée d’Edgard Poe, c’est la réalité des jours, c’est le crocodile au milieu du salon, l’évidence même. Il y a quelques dizaines d’années on a acheté en voyage de noces un petit lézard d’agrément, l’immigration, et maintenant il est cet énorme animal au dos dentelé et aux yeux jaunes proéminents, par-dessus lequel on se passe des tasses de thé et des macarons, dans le salon, en affectant de ne pas le voir ou de le prendre pour une table basse, bien que la gigantesque mâchoire avale de temps en temps un bras ou une jambe et que le tapis soit rouge de sang. Un crocodile ? Quel crocodile ?

Le Grand Remplacement crève les yeux comme il crève le cœur. Les peuples, au cours de l’histoire, n’ont eu nul besoin de se voir confirmer par la science qu’ils vivaient les guerres de Religion, la guerre de Trente Ans, la Révolution française ou les conquêtes napoléoniennes. À la fin du XIXe siècle, en 1882, pour être précis, Dieu est mort, selon la fameuse formule de Nietzsche. Les religions ne se sont pas éteintes pour autant mais elles ont perdu leur fonction d’instance suprême de la vérité. Dans ce rôle, elles ont été remplacées par la Science, la Science avec un grand S, une religion aussi monothéiste que les précédentes mais prodigue comme elles en chapelles, en sectes, en hérésies, en sous-sciences de moins en moins scientifiques à mesure qu’elles sont plus éloignées de l’expérience ; mais qui toutes gardent le chiffre comme le signe suprême de leur appartenance à l’exactitude, assimilée un peu vite à la vérité : ainsi les sciences humaines, cet oxymore, et parmi elle la sociologie, la science reine, flanquée de ses dames d’honneur la démographie et la statistique.

Je parlais à l’instant de dépossession : la science, sous ses masques divers, a sans doute plus dépossédé l’homme, quand tout est dit, que ne l’avaient fait les religions avant elle. Elle l’a dépossédé de son regard, elle l’a dépossédé de son expérience, elle l’a dépossédé de sa foi en sa capacité à constater ce qu’il vivait, elle lui a ravi jusqu’à son chagrin. Tandis que s’effondrait autour de lui tout le système de transmission, la science a convaincu l’homme, chiffres à l’appui, qu’à l’École le niveau montait : moyennant quoi l’enseignement est un champ de ruines. Tandis qu’on assistait à une sorte de réensauvagement de l’espèce, et que partout l’hébétude gagnait, les industries culturelles se substituant partout à la culture — ce que j’appelle le Petit Remplacement —, la science persuadait l’homme que la culture se répandait parmi les masses : et certes elle se répandait, mais comme le lait de Perrette, et naturellement il n’y avait personne pour essuyer. Tandis que partout la société de confiance cédait la place à une société de méfiance généralisée, où chacun devait se garder de tout le monde à force de codes, de cadenas et de protections pour le cou, bavière, gorgerin ou cache-col en zinc, la science inculquait à l’homme, tenez-vous bien, que la délinquance décroissait, qu’il n’y avait aucun lien entre son augmentation et le changement de peuple et que ce qu’il éprouvait bien à tort comme de l’insécurité n’était qu’un sentiment d’insécurité, d’ailleurs assez suspect, idéologiquement. Exiger d’un Européen de l’Ouest, en 2023, des preuves du changement de peuple et de civilisation dans lequel il est tous les jours plongé n’a pas plus de sens, ni de décence, que d’exiger d’un Français, d’un Belge ou d’un Néerlandais, en 1943, des preuves de l’occupation allemande. On réclame de nous des chiffres. Pourquoi ? Parce que les chiffres sont ce qui a le plus menti et ce qui permet le mieux de mentir encore. Le Chiffre était le service du brouillage, sous l’Ancien Régime. Une lettre chiffrée est une lettre qui dissimule son message. Lorsque la situation est hélas parfaitement claire, comme l’est la nôtre et comme l’est le Grand Remplacement, seuls des chiffres extrêmement précis sont encore capables de la dissimuler au peuple.

Un seul exemple, choisi parmi les plus caricaturaux : on nous serine depuis trente ans qu’il y a moins d’étrangers en France que dans les années 30. Évidemment, ils ont tous été naturalisés. La naturalisation, c’est l’artificialisation des hommes. C’est quand il n’y aura plus un seul étranger que le Grand Remplacement sera achevé. D’où l’absurdité du reproche de xénophobie, qui nous est adressé, à nous autres antiremplacistes. Nous sommes les derniers xénophiles au contraire, les ultimes défenseurs de l’étrangèreté. Pour les remplacistes, être étranger est une tare : ils aiment tellement les étrangers qu’ils n’ont rien de plus pressé que de les dépouiller de cette belle qualité.

Non seulement le Grand Remplacement n’est en rien une théorie, non seulement il est une sinistre réalité et le phénomène le plus important et le plus grave en Europe occidentale et ailleurs dans le monde à notre époque, non seulement il est le crime contre l’humanité du XXIe siècle, mais ceux qui l’appellent une “théorie” se désignent aussitôt, et de ce seul fait, à la fois comme ses négateurs et ses perpétrateurs. Nier le Grand Remplacement c’est l’accomplir. Parler de la théorie du Grand Remplacement c’est comme parler de la théorie des chambres à gaz : c‘est désigner une atroce réalité comme une simple hypothèse ; c’est, si j’ose dire, s’affirmer négationniste. Le négationnisme le plus vivant aujourd’hui, c’est la négation contre toute évidence du Grand Remplacement, ou génocide par substitution. Cependant il y a une immense différence entre les deux négationnismes, le négationnisme “classique”, celui qui niait la réalité des chambres à gaz, le génocide des juifs, la destruction des juifs d’Europe, et le négationnisme “moderne“, celui qui nie la réalité du Grand Remplacement, le génocide par substitution, la destruction des Européens d’Europe et de leur civilisation. La différence entre ces deux négationnismes, c’est que le premier était le fait de quelques vieilles taupes dans des taupinières, de quelques individus lucifuges dans des caves, de sinistres amuseurs sur des théâtres d’ombres, tandis que le second est quotidiennement pratiqué en pleine lumière par tous ceux qui régissent nos destins, pape, rois, présidents de la République, président du conseils, Premiers ministres, ministres, chefs de parti, députés, banquiers, chefs d’entreprises, magistrats, professeurs, enseignants, journalistes, journalistes, journalistes.

Renaud Camus

source: https://ripostelaique.com/renaud-camus-a-bruxelles-quest-ce-que-le-grand-remplacement.html

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