Une histoire de chats de gouttières

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Publié le 22 mars 2020 - par

Ce n’est ni du comique ni du sarcastique, mais bien une réalité.

Il y a quelques mois, suite à un violent orage qui s’était abattu sur notre région, quelques chats de gouttières avaient trouvé refuge dans notre vaste véranda, avec son toit et ses volets paravents. Ma fille et moi n’y avions vu aucun inconvénient, au contraire, nous étions satisfaites d’avoir servi de refuge à ces malheureux chats de gouttières.

Le cœur et la main toujours prêts à secourir l’infortuné, ma fille et moi avions, sur notre lancée, ouvert quelques boîtes de conserves que nous avions offertes à ces malheureux affamés.

Une fois l’orage essoufflé, ces chats étaient partis. Il y en avait de toutes les couleurs, des noirs, des gris, des blancs, des fauves, de toutes les tailles et de tous les genres… tous étaient très mignons avec leurs yeux apeurés et leur crainte de toute approche humaine, tant ils étaient sauvages et difficiles à dompter.

Ma fille émit la très hasardeuse initiative d’acheter un paquet de vingt kilos de nourriture pour chats avec quelques petites assiettes en acier inoxydable qu’il fallait dorénavant remplir de nourriture pour tous ces chats et les répartir sur la surface de notre véranda et son parapet.

Je dois vous avouer que j’ai eu quelques hésitations, mais devant les arguments de ma fille, j’ai obtempéré. « Allons, maman, c’est seulement quelques centaines de shekels, nous pouvons bien nous permettre ce luxe. Et ces pauvres bêtes en ont si besoin ».

Et depuis, tous les matins entre 5 et 6 heures, avec les premiers rayons du soleil, j’étais debout en train de remplir ces petites assiettes alors que la meute de chats ne cessait de grossir. Si au début, il n’y en avait que 4-5 chats, maintenant c’était une troupe. Il y avait en leur sein des grands, des vieux, des jeunes et même des nourrissons qu’il fallait alimenter et abreuver.

Les querelles pour la nourriture avaient en parallèle fait leur apparition, ce qui me contraignit à jouer au gendarme afin de permettre aux plus faibles de jouir de leur portion.

Le sac de vingt kilos ne dura plus que quelques jours, et il fallait en commander encore et de toute urgence ; les bouches d’affamées devenant de plus en plus nombreuses, de plus en plus agressives… Ma fille commença à sentir le trou que cela causait à notre budget, mais s’abstint de se plaindre… Elle reconnaissait bien être la source de cette initiative et dans son cas, elle devait boire le vin jusqu’à la lie.

Mais moi, même si je ne payais pas les factures qui s’enchaînaient, je me démenais comme dix pour satisfaire tous ces chats envahisseurs qui maintenant s’aventuraient à l’intérieur de mon logis. Le jour où un chaton sauta sur les rayons de ma cuisine et détruisit tout ce qui se trouvait sur son chemin pour dénicher de la nourriture, je compris que je devais mettre un terme à cette dangereuse aventure, puisque maintenant, même mon toit était menacé et ma sécurité de même. Après tout, ces chats étaient sauvages, et Dieu seul sait d’où ils venaient et ce qu’ils traînaient en eux et avec eux.

Mais comment faire ? Ils s’alignaient maintenant sur le rebord de mes fenêtres, les yeux pointés sur les miens, sur le parapet de la clôture de mon jardin, derrière les arbres, là où ils faisaient leurs besoins, empestant les lieux et détruisant tout ce qui pouvait les déranger. Souvent, un élan de pitié me faisait reprendre le refrain, pour ensuite me maudire face à ses conséquences.

C’est alors que je me souvins, qu’en fait, je ne faisais aucun bien à ces petites bêtes… oui, elles étaient opportunistes, mais c’est chose naturelle et innée en toute créature, si des bénévoles idiotes comme ma fille et moi sont prêtes à leur tendre la main pour qu’ils nous grimpent dessus.

En outre, en leur ouvrant notre porte, nous avions à notre insu créé en eux une dépendance, alors qu’avant notre intervention, ils ne l’étaient pas, employant tous leurs moyens, activant  leur ingéniosité pour se nourrir, pour survivre et se développer. Dans notre tentative de leur venir en aide, nous cherchions sans doute à atténuer leurs difficultés pour survivre mais avions omis la leçon primordiale de la création, qui est la lutte pour gagner son pain, et cela est valable tant pour l’animal que pour l’être humain…

Nous avions, ma fille et moi, trimé comme dix pour nous construire un toit et sécuriser nos vieux jours, pourquoi devrait-il en être différemment pour toutes les autres créatures ?

Mais c’est aussi avec beaucoup de peine que nous nous sommes vues contraintes de fermer nos portes, de fermer nos yeux face à ceux pitoyables de ces envahisseurs, et avons permis à cette horde de chats de gouttières de reprendre le fil là que nous avions, par pitié, solidarité et compassion, coupé.

Aujourd’hui, ces hordes se hasardent rarement dans nos parages, bien qu’elles demeurent aux aguets de tout fléchissement de notre part… Nous avions par contre continué d’aider l’un d’entre eux qui ne savait pas se défendre et lutter pour sa potion au point qu’il nous a fallu faire appel à un vétérinaire qui l’hospitalisa durant quelques jours pour retaper sa santé…

Il continue à venir chercher sa potion chez moi et repart une fois repu.

Je garde l’espoir qu’un jour il soit en mesure de se défendre indépendamment de notre intervention.

Cette situation abracadabrante et cauchemardesque m’a rappelé inévitablement celle de l’Occident et de ses malheurs… et je me demande encore si je dois en rire ou en pleurer, tant c’est devenu désespérant…

Thérèse Zrihen-Dvir

source: https://ripostelaique.com/une-histoire-de-chats-de-gouttieres.html

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