Norbert van Handel : « Le M7 réunissant le V4, la Croatie, la Slovénie et l’Autriche doit parler d’une seule voix »

 

Autriche – Entretien avec le baron Norbert van Handel : « Le M7 – pour Mitteleuropa 7 -, ces pays d’essence chrétienne et conservatrice, doivent se rapprocher au sein de l’UE afin de rectifier le cap, sans quoi ils sombreront dans un tourbillon européen multiculturel. Le M7 doit pouvoir parler d’une seule voix sur les questions importantes pour se défendre face aux grands pays. »

Suite à l’explosion de la coalition ÖVP-FPÖ en mai 2019, de nouvelles élections législatives auront lieu en Autriche le 29 septembre. L’ÖVP de Sebastian Kurz est le favori du scrutin. La question qui se pose est de savoir avec quel(s) partenaire(s) de coalition Kurz formera un gouvernement : reconduira-t-il la coalition avec les populistes du FPÖ, ou se tournera-t-il vers la gauche (SPÖ, Verts ou libéraux) ?

Du côté du FPÖ, après le retrait politique de HC Strache, le parti se réorganise autour de son nouveau président Norbert Hofer (félicité par Orbán pour son accession à la présidence du FPÖ), qui avait échoué de peu à remporte l’élection présidentielle en 2016 [voir ici son entretien de novembre 2016 pour le Visegrád Post].

Le FPÖ pourra également s’appuyer sur le ralliement officiel du baron Norbert van Handel, que le Visegrád Post avait interrogé en 2017. Cette fois-ci, c’est en tant que candidat FPÖ et probable futur parlementaire que Norbert van Handel a répondu à nos questions.

Visegrád Post : M. Van Handel, vous êtes actuellement candidat du FPÖ pour les élections législatives de fin septembre. On vous sait proche du nouveau dirigeant de ce parti, Norbert Hofer, depuis sa candidature aux dernières présidentielles. Néanmoins, vous étiez dans le passé plutôt proche de l’ÖVP de Sebastian Kurz. Qu’est-ce qui vous a fondamentalement poussé à passer de l’ÖVP au FPÖ ?

Norbert van Handel : J’ai été membre de l’ÖVP pendant cinquante ans. Lorsque lors des présidentielles, l’ÖVP a soutenu le candidat arc-en-ciel Alexander van der Bellen et non pas le candidat chrétien Norbert Hofer, j’ai quitté ce parti. Pour un parti chrétien-social comme l’ÖVP prétend l’être, il aurait dû être impossible de ne pas soutenir le seul candidat chrétien aux présidentielles.

Que Sebastian Kurz fasse éclater la coalition au mois de mai et, contrairement à ses engagements, et ne poursuive pas la coalition avec Norbert Hofer, fut pour moi la raison d’adhérer désormais au FPÖ. Le FPÖ est aujourd’hui le seul parti chrétien ayant un programme conservateur. Les valeurs du FPÖ correspondent aux miennes.

Visegrád Post : Quel regard portez-vous sur la coalition ÖVP/FPÖ qui a gouverné l’Autriche pendant un an et demi avant d’éclater au mois de mai ?

Norbert van Handel : La coalition ÖVP-FPÖ s’est donnée et a mis en œuvre un excellent programme de gouvernement que la majorité de la population autrichienne a approuvé jusqu’au bout. Selon moi, ce fut une catastrophe pour l’Autriche et pour l’Europe centrale que Kurz mette fin sans nécessité à cette coalition.

Visegrád Post : Souhaitez-vous une reconduction de cette coalition après les législatives de la fin septembre ? Pensez-vous que MM. Kurz et Hofer pourront facilement se mettre d’accord après les semaines de brouille auxquelles on assiste depuis ledit « Ibizagate » ?

Norbert van Handel : Je crois qu’une reconduite de la coalition ÖVP-FPÖ après les élections législatives est urgemment nécessaire. Les relations personnelles entre Sebastian Kurz et Norbert Hofer sont bonnes. C’est surtout au niveau des pressions exercées par de vieux cadres de l’ÖVP qu’on trouve la racine des problèmes. Ces gens voient que leurs privilèges souvent singuliers sont menacés et refusent un renouvellement de l’Autriche.

L’affaire d’Ibiza n’a rien à voir avec cela, car les protagonistes de celle-ci, H.C. Strache et Johann Gudenus, ont démissionné aussitôt.

Il y aura de longues négociations de coalition avec des interruptions et des reprises de négociations suites auxquelles il sera, j’espère, possible de mettre sur pied une nouvelle coalition turquoise et bleue [les couleurs de l’ÖVP et du FPÖ, ndlr.].

Visegrád Post : Vous aviez très clairement dénoncé la politique de la chancelière allemande Angela Merkel en matière d’immigration. Il y a quelques jours, le parti allemand allié du FPÖ a réalisé des scores très importants lors des élections régionales en Saxe et au Brandebourg. Comment jugez-vous l’évolution politique en Allemagne ?

Norbert van Handel : L’évolution politique en Allemagne me préoccupe beaucoup. On a le sentiment que les vieux partis ont essentiellement le souci d’empêcher l’AfD plutôt que de s’intéresser à l’avenir de l’Allemagne. C’est une situation très mauvaise. L’AfD a été élue démocratiquement et, en tant que deuxième ou troisième force politique selon les endroits, elle est donc légitime à participer à l’exécutif.

La continuelle politique d’ostracisme vis-à-vis de l’AfD mène l’Allemagne au bord d’une crise constitutionnelle dans laquelle se perdent tous les principes démocratiques. L’Allemagne a suffisamment de problèmes, que ce soit au niveau de la politique industrielle (notamment dans l’industrie automobile), de la politique énergétique (la transition énergétique ne peut pas fonctionner de cette manière), d’une politique climatique ratée, de la question de l’immigration, de la crise du logement, d’une amélioration d’une l’infrastructure en partie dans un état catastrophique, de la réforme de la Bundeswehr, etc.

Voici les thèmes dont la politique allemande devrait s’occuper au lieu d’exclure l’AfD qui est la seule formation nationale-conservatrice en Allemagne.

Visegrád Post : Vous plaidez pour l’élargissement du Groupe de Visegrád à l’Autriche, à la Croatie et à la Slovénie qui formeraient ensemble le M7, pour Mitteleuropa 7. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Norbert van Handel : Comme l’Union européenne n’est en aucune manière en mesure de régler les problèmes vraiment importants – immigration, défense, réconciliation avec la Russie et de nombreux autres – et comme l’Europe est désormais dirigée par la France et qu’elle va en direction des États-Unis d’Europe, il est très important de rectifier le cap.

Le M7, c’est-à-dire ces petits pays qui ont été liés entre eux pendant des siècles, ne feront individuellement pas le poids face à l’avalanche franco-allemande renforcée de l’Espagne, du Portugal et de la « colonie française » qu’est le Benelux.

Le M7, ces pays européens d’essence chrétienne et conservatrice, doivent se rapprocher au sein de l’UE afin de rectifier le cap, sans quoi ils sombreront dans un tourbillon européen multiculturel. Le M7 doit pouvoir parler d’une seule voix sur les questions importantes pour se défendre face aux grands pays.

Une coopération très étroite dans les domaines de l’immigration, de l’infrastructure, des universités, d’une politique culturelle commune, d’une politique agricole commune, mais aussi d’une défense commune, est urgemment nécessaire. L’Autriche devrait prendre l’initiative dans cette direction, ce que malheureusement elle ne fait pas.

Dans le cadre d’une nouvelle politique, il faudrait le plus rapidement possible parler d’une même voix et de manière non bureaucratique. Les pays du M7 doivent sauver leur propre identité au-delà des clivages politiques. Il est grand temps que cela ait lieu. Dans le cadre de mes possibilités politiques, je ferai tout ce que je pourrai pour faire avancer cette idée. Les pays du M7 doivent se rendre compte que nos intérêts sont essentiellement des intérêts communs et faire de cette communauté d’intérêts une réalité politique.

 

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