Au lieu de soutenir les AOC, Darbellay les enterre avec une nouvelle lubie régulato-administrative

Au lieu de soutenir les AOC, Darbellay les enterre avec une nouvelle lubie régulato-administrative

Le Valais du vin avait besoin de tout, sauf de ça. Avec sa complaisance habituelle lorsqu’il s’agit d’évoquer le conseiller d’Etat valaisan Christophe Darbellay, le Nouvelliste annonce en grande pompe dans son édition de samedi dernier la création d’un nouveau « label » pour les vins valaisans : la « marque Valais ».

Quelle est la plus-value pour le consommateur, le vigneron ou l’encaveur ? Vous ne le saurez pas en lisant Le Nouvelliste puisque le journaliste n’a pas posé la question. Il a juste fait le marketing de l’IVV et de Christophe Darbellay, qui sont derrière ce projet. La plus-value est tout simplement inexistante. Les vignerons qui veulent faire du vin bio ou du vin nature sont libres de le faire aujourd’hui déjà. Juridiquement, tout est réglé par l’AOC qui représente déjà un carcan de contraintes très serré.

Le Nouvelliste cite Chloé Fontannaz de la Cave de la Madeleine à Vétroz, qui a rejoint le projet. On notera d’ailleurs que le projet est soutenu par une vingtaine de caves du canton seulement, ce qui est très peu au vu de la pression qui a été exercée par l’IVV et le département de Christophe Darbellay pour rallier un maximum de caves à cette nouvelle lubie régulato-administrative. Que dit Chloé Fontannaz ? « Nous adhérons au projet par conviction. C’est gratifiant de pouvoir ainsi montrer au public les efforts consentis pour travailler la vigne dans le respect de la nature. » Le grand mot est tombé : la nature. Selon la logique de la « marque Valais », il y a les gentils vignerons, qui respectent la « nature » et… tous les autres qui sont de vilaines personnes qui ne connaissent rien au vin et font tout faux.

Il est instructif d’éclairer cette discussion par l’intervention d’une personne neutre, dont le portrait a été publié le même jour – samedi dernier – par Le Temps. Il s’agit de Fabio Penta, baptisé par le journal « l’œnologue qui murmure à l’oreille des vignerons ». On nous dit encore dans cet article que Fabio Penta « s’est imposé comme une des références en matière de conseil œnologique en Suisse » et qu’il œuvre « dans plusieurs domaines prestigieux ». On apprend qu’il s’occupe de 36 domaines au total répartis entre Genève, Vaud, le Valais et le Tessin. Disons que l’homme sait de quoi il parle. Et que pense-t-il de la mode des vins « nature » ? Il vaut la peine de citer l’entier de ce passage (Le Temps, samedi 21 septembre, page 29) :

« Le spécialiste des vinifications défend une approche cartésienne de son métier. Il a du mal avec le discours à la mode sur les vins “nature”, qui laisse penser que le vin se fait tout seul en laissant le raisin fermenter. “Cela me fait sourire. Quand on ne fait rien pour accompagner le vin, on n’arrive à rien. Cela nécessite un savoir-faire qui ne s’improvise pas.” Son credo ? Prendre du plaisir, sans se laisser enfermer dans une chapelle. “Il y a quinze jours, j’étais en vacances à Naples avec mon amie, qui est aussi œnologue. Dans un restaurant, le sommelier nous a demandé si nous voulions du vin bio ou du vin “nature”… On lui a répondu qu’on souhaitait quelque chose de bon. C’est tout ce qui compte.” »

On en déduit déjà tout le mal que Fabio Penta, éminent expert en œnologie, pense de la nouvelle « marque Valais » : une mode qui passe à côté de ce qui fait vraiment le bon vin.

Essayons néanmoins de porter un regard positif sur cette démarche. On vient de voir qu’elle ne profitera pas aux vignerons ni aux consommateurs, ni à l’AOC qui se voit ainsi décrédibilisée publiquement par ceux-là même qui devraient pourtant la défendre et la mettre en valeur. En prônant cette « marque Valais », l’IVV et Christophe Darbellay laissent en effet entendre que l’AOC, qui existe depuis les années 1990, n’a pas fait ses preuves. Et que dire des Grands Crus ? Eux aussi sont dévalorisés par cette démarche.

Cela dit, il faut bien reconnaître que la « marque Valais » profite à l’IVV et au conseiller d’Etat Christophe Darbellay qui ont pu, le temps d’un article, se pavaner en sauveurs de la viticulture valaisanne dont chacun sait pourtant qu’elle se trouve empêtrée dans l’une de ses plus graves crises depuis longtemps. Les fonctionnaires que l’Etat devra engager pour contrôler les caves sont les autres grands gagnants de la démarche. A propos de fonctionnaires, le consommateur se rend-il compte de la charge administrative qui pèse aujourd’hui déjà sur un vigneron ou un négociant valaisan ?

Il a été signalé à ceux qui ont enquêté pour Lesobservateurs.ch que sur le site  Bafweb.com se trouve une  liste semble-t-il non exhaustive des contrôles et exigences liés à la production du vin :

  • AVS (annonce nouveaux collaborateurs, décompte mensuel et récapitulatif annuel)
  • SUVA
  • LAMAL (pour ouvriers agricoles de courte durée)
  • TVA (décompte trimestriel et révision chaque 5 ans)
  • CSCV (Contrôle Suisse du Commerce des Vins) = contrôle de cave
  • Régie fédérale des alcools (pour les détenteurs d’alcools forts)
  • Police du commerce (licences de débit de boissons et caveaux)
  • Services de l’hygiène (laboratoire cantonal, prise d’échantillons)
  • Office du travail (inspection à la vigne des collaborateurs étrangers, aux effeuilles et vendanges)
  • Grands Crus (contrôle vigne, commercialisation et traçabilité ; dégustation)
  • Contrôle des vignes par IVV
  • Contrôle PI (production intégrée)
  • Contrôle passeport phyto-sanitaire ZP-d4 pour les greffons des vignes transformées, pour la pépinière
  • Contrôle fiduciaire
  • Contrôle organe de révision
  • Contrôle et visite apprenti par la commission d’apprentissage
  • Contrôle des vignes renouvelées par le service de la viticulture
  • Contrôle obligatoire des pulvérisateurs (tous les 4 ans, annuel pour Vitiswiss).
  • Permis poids-lourds, transport personnel D1 (+9 personnes) et véhicules utilitaires pour le personnel
  • Permis d’élévateur-gerbeur clark
  • Contrôle de la sécurité au travail
  • Contrôle norme compresseur
  • Contrôle poids et mesure du poids des vendanges (annuel)
  • Contrôle poids-lourds (expertise annuelle avec camion chargé)
  • RLPL (chaque mois envoi de la carte avec kilomètres parcourus
  • Contrôle des véhicules pour le transport du personnel et amarrage de la marchandise
  • Contrôle des installations électriques par l’OBIT (après chaque modification effectuée par un électricien professionnel)
  • Contrôle de tous les extincteurs ECA du bâtiment par la société agréée et du véhicule poids lourd.
  • OFS : Office fédéral de la statistique (enquête obligatoire pour la mise à jour du registre des entreprises, statistique sur les investissements, etc…)
  • Emolument sur évaluation de la charge maximal d’endettement par le service de l’agriculture sur terre agricole selon le droit foncier rural
  • Réception des acquits par les propriétaires de vignes pour donner droit à livrer la vendange auprès d’une cave
  • Relances répétitives par les vignerons et encaveurs pour recevoir les acquits des propriétaires de vigne louées
  • Enregistrement à la cave des acquits sur le programme valaisan e-vendange
  • Transmission des données e-vendange courant novembre auprès du laboratoire cantonal valaisan
  • Taxe et émolument lors d’un transfert viticole
  • Taxe de la commission suisse du commerce des vins
  • Taxe IVV sur le nombre de m2 en propriété
  • Taxe IVV sur le nombre de kilo encavé
  • Taxe IVVS sur les m2 en propriété
  • Taxe de contrôle de l’AOC par le laboratoire cantonal (par vin prélevé)
  • Taxe de l’association des encaveurs (en général par ville ou village)
  • Taxe sur les vignes commercialisées Grands Crus
  • Taxe sur les bouteilles commercialisées Grands Crus
  • Police du commerce (frais de dossier pour l’obtention de la licence).
  • Taxe pour l’apprentissage des cavistes AISCV
  • Taxe TEA (taxe d’élimination anticipée de 6 cts sur chaque bouteille neuve de 70 cl)
  • Taxe Billag
  • Taxe pour la pose de panneaux publicitaires sur propre bâtiment
  • Taxe autoroutière (vignettes pour tous les véhicules et remorques)
  • Taxe poids-lourds RLPL
  • Taxe véhicules automobiles à moteur
  • Taxe poubelle entreprise + taxe au sac
  • Taxe d’évacuation des déchets (verre, cartons, ferraille, bois, etc.)
  • Taxe eau annuelle
  • Taxe d’irrigation des vignes
  • Taxe d’autorisation de construire lors de surface au-delà de 500 m2 et au-delà de 1,50 m de hauteur
  • Assurance grêle (facultatif)
  • Assurance RC entreprise, vol et effraction
  • Système de sécurité avec alarme (nécessaire pour les assureurs)
  • Cours OACP (ordonnance pour l’admission des chauffeurs poids-lourds) = 250.- par an
  • Cotisation Vitiplus (300.-/année) formation continue
  • Paiement annuel pour l’inscription du nom de domaine Internet
  • Frais de conseils, avocats, juristes (de plus en plus nécessaire)
  • Participation aux différents concours
  • Grand Prix du Vin Suisse pour l’IVV ? (130.- par vin)
  • Etc.

Et Encore :

  • Inventaire détaillé des stocks de vins valaisans au 31 décembre auprès du laboratoire cantonale
  • Inventaire des stocks de vins au 31 décembre à la commission fédérale des vins suisses
  • Inventaire détaillé et chiffré du matériel et stock pour la comptabilité financière au 31 décembre
  • Registre cantonal des vignes, modification au 31 mai + justificatif à transmettre
  • Dossier PI (Production intégrée)
  • Analyses de terre de chaque zone obligatoire tous les 10 ans
  • Décompte mensuel ou trimestriel (selon les cantons) de l’impôt à la source (anc. annuel, puis semestriel)
  • Expertise fiscale si vous avez la chance d’être dans le radar du fisc et de gagner votre vie
  • Expertise des véhicules
  • Obligation du maintien des murs en pierres sèches en général tout à la charge du propriétaire après de beaux discours politique pour la qualité du paysage

La « marque Valais » est une fausse bonne idée qui va compliquer encore davantage la vie des professionnels du vin en Valais sans aucun bénéfice pour les producteurs ou les consommateurs. Carton rouge au Nouvelliste pour avoir servi de tremplin marketing à cette initiative sans prendre une minute le temps de réfléchir au bienfondé de la démarche.

 

Un commentaire

  1. Posté par aldo le

    LE VIN VALAISAN C’EST COMME LA TSR, ON EN BOIT DE MOINS EN MOINS ET IL FAUT LE SOUTENIR DE PLUS EN PLUS.
    Je constate à lecture de ces lignes, qu’il y a de moins en moins de raisin dans le vin et de plus en plus de fonctionnaires planqués comme électeurs à la botte, donc de taxes. Et après on viendra soutenir qu’il faut encore et encore soutenir quoi ? Dernièrement croyant boire une dôle de qualité, j’ai bu une effroyable piquette qui dont la seule vertu devait être d’avoir donné du travail aux chimistes. Je prends un carton de fendant 13 étoiles avec pour cadeau une partie des bouteilles devenues gazeuses. Finalement il est normal que Darbellay préfère l’ombre à la lumière surtout pour les conséquences de sa vie privée. Et quand tout sera bien enterré, et qu’il voudra qu’on parle à nouveau de lui, peut-être aura-t-il une idée géniale pas chère, pour être à nouveau dans la lumière. Par exemple, rajouter quelques étoiles supplémentaires au drapeau du Valais. Après l’électricité gratuite sur youtube, les étoiles pour une lumière sans centrales nucléaires, le tout pour aider la planète et faire plaisir à la petite peste Greta, la nouvelle étoile filante.

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