Sans idées libérales, la droite est condamnée à l’échec

Les Républicains se sont enfermés dans un discours étroit essayant de concurrencer celui du Rassemblement national : les Français ont préféré l’original à son canada dry.

Par Jean-Philippe Delsol.
Un article de l’Iref-Europe

Toutes les listes qui se présentaient aux élections européennes de ce 26 mai n’avaient qu’un seul leitmotiv, celui de protéger les Européens. Les nombreux Français qui se sont abstenus (50 %) ne comptent pas que des pêcheurs à la ligne et des indifférents, mais peut-être des mécontents à l’égard de ce morne conformisme. Ceux qui en ont fait le plus les frais sont Les Républicains qui ont pris le risque de confier leur tête de liste européenne à François-Xavier Bellamy dont le dernier ouvrage, Demeure (Grasset, 2018), atteste une philosophie politique si conservatrice et si peu libérale que le résultat obtenu de 8,5 % des voix n’est guère surprenant ; il s’est lui-même ainsi refusé aux électeurs conservateurs-libéraux qui formaient une bonne partie de la droite française jusqu’à présent ainsi qu’en a témoigné le vote Fillon.

Dans cet ouvrage, M. Bellamy affirme qu’ « en réalité le progrès technique n’existe pas » (p.99) et dénonce « une économie absolument dominée par le marché » (p.203) alors qu’elle nous semble avoir perdu de sa vigueur pour s’être coupée du marché ! Il regrette que « La seule maxime qui reste à la politique est l’injonction de tout faire pour libérer le mouvement, pour défaire les immobilismes, pour déconstruire les barrières, pour laisser faire et laisser passer » (p.217). Si seulement il pouvait avoir raison. Mais d’épaisses œillères l’empêchent de voir que l’État, français en particulier, ne sait pas libérer sans soumettre plus encore à des règlementations infinies et des fonctionnaires omnipotents.

Le marché améliore la condition humaine

Bien sûr, le marché n’est qu’un moyen et F.X. Bellamy avait raison de rappeler que tout ne peut pas s’acheter et que l’Homme n’est pas un produit comme un autre. Mais son constat légitime de la perte de sens des sociétés contemporaines ne saurait se réduire à sa condamnation du marché qui reste le moyen le moins mauvais pour améliorer la condition humaine et répondre aux aspirations légitimes des individus.

Le résultat est qu’il n’a pas présenté de programme cohérent sinon en prenant un bout de philosophie en guise d’affirmations catégoriques et qu’il a déçu tout son monde. Car si la politique a « vocation à sauver » comme il le dit, c’est en libérant les Hommes plutôt qu’en voulant les protéger sans cesse avec des barrières écologiques, économiques, douanières, sociales ou autres et en augmentant les dépenses publiques pour un « 1 % » culturel européen ; c’est en soutenant notre agriculture ou en formant notre jeunesse, qui a besoin de plus de rigueur plutôt que de plus d’argent.

Certes, les autres listes n’avaient pas de meilleur programme. LREM a su résister en présentant un projet plus dangereux encore, cherchant à instaurer une souveraineté européenne qui signerait à terme une Europe-providence se surajoutant aux États-providence ! Mais M. Macron n’a jamais caché qu’il était au fond social-démocrate à la française alors que Les Républicains se sont enfermés dans un discours étroit essayant de concurrencer celui du Rassemblement national : les Français ont préféré l’original à son canada dry.

Il reste à espérer que des leçons sauront en être tirées en permettant que se reconstruise en France l’armature d’une pensée politique ouverte et d’un discours libéral respectueux des vertus du marché autant que de l’humanisme chrétien où s’est ancré l’esprit européen.

En Europe, les partis conservateurs resteront dominants au sein du nouveau parlement, mais affaiblis et sans majorité. Sans doute sera-t-il souhaitable que s’allient les conservateurs (PPE) aux libéraux en espérant qu’au sein de ces derniers les représentants du libéralisme anglo-saxon supplanteront ceux du libéralisme étatiste (!) à la française que théorise et légalise M. Macron depuis deux ans.

Nous continuons de croire que l’Homme n’est pas fait pour être assisté, mais pour être responsable de lui-même et de son environnement matériel et humain. Le rôle, et le devoir de l’État sont de permettre que les individus et les communautés qu’ils constituent naturellement se développent librement dans leur respect mutuel, tout en palliant subsidiairement les insuffisances des systèmes de secours pour des besoins justifiés. Nous ne désespérons pas que cette approche de principe susceptible de recouvrir des réalités diverses selon les pays et les époques puisse être portée par des partis politiques moins sensibles que d’autres au conformisme et à la démagogie.

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