le 15/11/2018
FIGAROVOX/TRIBUNE - Hier, Emmanuel Macron se livrait à un entretien télévisé depuis le porte-avion Charles de Gaulle. Pour Arnaud Benedetti la communication du Président a raté sa cible.
Arnaud Benedetti est professeur associé à l'Université Paris-Sorbonne. Il vient de publier Le coup de com' permanent (éd. du Cerf, 2017) dans lequel il détaille les stratégies de communication d'Emmanuel Macron.
Drôle d'endroit que celui d'un porte-avion pour communiquer à la veille de la mobilisation des «gilets jaunes». La symbolique, inévitablement, oppose la martialité du pouvoir à la colère de la France des automobilistes. C'est sur terre que se développe un mouvement indéchiffrable et c'est de la mer que le Président parle. Pas tout à fait avec nous, en choisissant une forme de grand large, pas tout à fait comme nous, en endossant les habits du chef des armées: l'inconscient parle peut-être ; ou s'il ne parle pas, d'aucuns le feront parler. Tout se passe comme si le recours à la scénarisation militaire visait à illustrer le contrôle d'une situation.
Bien malgré lui, à son corps défendant, l'usage du décorum suscite une absence de sérénité, comme s'il fallait investir avec force ostentation dans l'hyper-régalien pour convaincre et se convaincre de la solidité d'un sol politique... pourtant incertain.
L'exercice télévisé du Président avait tout du Blitzkrieg communicant.
Quelques heures après Edouard Philippe «droit dans ses bottes» pour cause d'écologie, le Président, sur TF1, est venu entre autres faire le SAV d'un Premier ministre qui se dit déterminé, d'une part à ne rien céder sur les taxes, et réparateur d'autre part en annonçant une augmentation de la prime à la conversion. Sur le plan des institutions, comprenne qui pourra, mais ce «front renversé» ne manquera pas de surprendre ceux qui par orthodoxie constitutionnelle voient dans le chef du gouvernement un décrypteur de la parole présidentielle , un garde-fou de la statue du commandeur, un écuyer du monarque! La séquence communicante traduit à tout le moins une étonnante dialectique, pour ne pas dire brinquebalante des pouvoirs ...
Sur le fond, l'exercice télévisé du Président avait tout du Blitzkrieg communicant. Dans un format resserré, le chef de l'État a répété, martelé, redit avec insistance son discours de la méthode. Il a compacté, comme jamais, son corpus au gré d'un abstract rhétorique qui voulait se déployer de haut, avec pédagogie et avec une intention proclamée d'écoute. La flèche était acérée, l'arc tendu, mais in fine se dessinait au fur et à mesure de l'entretien comme un déjà-vu et un trop-plein. Formellement, l'oral parlait au jury d'un concours - rien a dire de ce point de vue là ; mais il n'accrochait pas au vécu, au ressenti, au quotidien existentiel de ceux qui aujourd'hui ne se retrouvent pas dans l'offre du pouvoir et de sa majorité. À l'image des avions de chasse qui l'entouraient, sa trajectoire était si haute, si furtive, si bruyante (Gilles Bouleau, non sans mal, s'essaya parfois en vain au rôle de «sparing partner») qu'elle n'imprimait dans les cieux de l'opinion qu'une pellicule de blancheur effilochée ...
La «com'» n'abolit pas le réel.
Même les fondamentaux du macronisme semblaient perdre de leur tranchant tant la redondance communicante en venait à les dévitaliser. Bien sûr, le Président offrit à la médiasphère l'ultime produit dérivé de sa ligne de com': la sur-saturation se facture au prix de l'innovation comportementale. À plusieurs reprises, Emmanuel Macron reconnut la nécessité d'être plus en écoute, à l'écoute, concédant en creux que la macronie, ne renonçant à rien sur le fond, accepte que l'on tirât un trait sur la forme. Ce besoin de considération proféré dans la bouche présidentielle intériorisait le constat que l'on avait sans doute manqué à tant d'humilité depuis tous ces longs mois de pouvoir . On consentit à un aveu, nourriture frugale pour des commentateurs en mal de sensations: le chef de l'État avait pour l'instant échoué à retisser le lien entre les dirigeants et leurs peuples. Emmanuel Macron rappela que ce syndrome était général, traversant l'ensemble des démocraties, “trappant” au passage que les gouvernements populistes qu'il entend combattre disposent à ce jour d'une épaisse adhésion de leurs opinions ... La com' n'abolit pas le réel, et à la surexploiter le risque est grand de la rendre inefficace si jamais le «gros temps» en venait à s'installer. Les mots et les images n'y suffiront alors plus. Il faudra des gestes. [...]
C’est de mon modeste point de vue …. une évidence validée, E. Macron ne pourra pas convaincre les veaux ,( comme disait le Général de Gaulle ) , avec de la poudre de perlimpinpin et de la vaseline retard…. car les français ,commencent peut-être de comprendre ,qu’ils vivent bien sous le joug d’ une Dictature Fiscale organisée …!