Dans la série chacun chez soi et touche pas à mon migrant, l’intrusion de cinq douaniers français sur le sol italien a provoqué un couac diplomatique entre la France et l’Italie.

L’affaire remonte au vendredi 30 mars. Ce jour-là, des douaniers français (armés), de la brigade ferroviaire des douanes de Modane, sont entrés dans le local d’une ONG d’aide aux migrants – l’ONG Rainbow for Africa – situé dans la petite ville frontalière alpine de Bardonecchia (station de ski située dans le Piémont), pour contrôler un Nigérian soupçonné de trafic de drogue. Problème : le local en question se trouve du côté italien, où arrive un flux régulier de migrants qui tentent le passage d’un col pour passer du côté français. D’où colère de Rome.

Alors que lesdits migrants continuent d’affluer massivement sur la péninsule italienne et franchissent allégrement et régulièrement les frontières passoires de l’Europe, parfois avec l’aide de collabos locaux, l’Italie – c’est le monde à l’envers – accuse les douaniers français d’avoir « violé les frontières » et parle d’un « acte grave, considéré totalement en dehors du cadre de la collaboration entre Etats frontaliers ». Plus enflée qu’une pizza calzone cuite au feu de bois, l’affaire se transforme en incident diplomatique. Samedi, Christian Masset, ambassadeur de France à Rome, est convoqué au ministère italien des Affaires étrangères où on lui fait part de la « ferme protestation du gouvernement italien pour la conduite des agents des douanes françaises, considérée comme inacceptable ».

L’ONG ayant vécu l’intrusion des douaniers dans ce lieu d’accueil comme une « irruption » brutale (?) et estimant que l’action des douaniers français « viole les principes inviolables d’indépendance, de neutralité, d’impartialité et d’humanité », le parquet de Turin a quant à lui ouvert dimanche une enquête préliminaire portant sur des soupçons graves « d’abus de pouvoir », de « violence privée » et de « violation de domicile ». Le chef « d’acte de perquisition illégal » pourrait également être retenu.

Une indignation italienne qui semble laisser froid comme un marbre de Carrare le ministre français des Comptes publics (chargé des douanes), Gérald Darmanin. Ce dernier, qui doit se rendre prochainement en Italie pour « s’expliquer » avec Rome, a déclaré qu’il n’est pas question de présenter des « excuses » pour la présence de douaniers sur le sol italien. Paris défend ses douaniers « qui n’ont rien fait d’illégal » en pénétrant dans un « local mis à disposition dans le cadre d’un accord franco-italien » datant de 1990, a-t-il ajouté. Toutefois, pour calmer le jeu, Gérald Darmanin a demandé aux douaniers français de « suspendre le fonctionnement » de l’accord de 1990 et de ne plus franchir la frontière sans la permission de Rome. A quand un laissez-passer ?

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