Klaus Schwab : marche forcée vers une « identité globale »

Ludovic Malot
International Business Manager
Klaus Schwab, fondateur du World Economic Forum (WEF) dont l’objectif officiel est de "s’engager à améliorer la situation du monde" – beau projet en perspective – même si la formulation est plutôt vague donc en réalité assez inquiétante sur ce qu’elle laisse vraiment entendre (les planistes et autres chantres du corporatisme nous auront habitué à se faire passer pour des philanthropes) est interviewé dans le Blick au sujet de la votation du 9 février dont Bilan fait une traduction ici. Décryptage.

"L’identité, c’est rendre conscient ce qui nous unit et ainsi délimiter notre communauté propre"

Avoir conscience de ce qui nous unit est effectivement la base d’une communauté mais avoir conscience de ce qui nous protège est encore plus essentiel. A ce stade, la Suisse est le seul pays au monde qui permet par son système de démocratie directe d’empêcher une élite politico-économique de jouir d’un monopole décisionnel. En effet, le référendum et l’initiative populaire (pouvoir horizontal) sont un rempart contre un développement abusif des actions menées parl’exécutif ou/et le législatif (pouvoir vertical). Cette particularité helvétique combinée à une insolente performance économique (moins de 3.5% de chômage) dérange et fait très peur aux élites étrangères. On peut d’ailleurs suspecter que c’est l’une des raisons qui explique que, globalement, peu de chefs d’état ou de chefs de gouvernements étrangers viennent en visite officielle en Suisse. (en France c’est en moyenne 50 visites annuelles, seulement 13 en Suisse en moyenne annuelle sur la période 2009-2013)

"Mais la question reste de savoir comment, dans le monde actuel, nous pouvons vivre pacifiquement ensemble à long terme si nous continuons de définir notre identité de façon unidimensionnelle"

Les identités propres et affirmées des nations ne sont pas incompatibles avec un monde pacifique. Au contraire, les nombreuses cultures et identités sont la vraie richesse du monde et c’est le respect mutuel qui doit primer. La Suisse a donné l’exemple depuis fort longtemps: elle s’est maintenue à l’écart des conflits et n’a pas cherché à s’immiscer dans les affaires d’états tiers. En plus de tous les autres conflits au niveau mondial, l’impérialisme des Etats-Unis est devenu totalement hors de contrôle: plus de 1000 bases et installations militaires dans 63 pays. On sait que ces bases et ces installations sont utilisées pour des opérations militaires et clandestines (Black operations). Rien qu’en Irak, une guerre officiellement à 50 milliards de dollars (coût réel estimé à 823 milliards jusqu’à 3.7 billions entre 2003 et 2011) plus d’un million de morts selon l’institut ORB et les démographes du Lancet et une nouvelle ambassade gigantesque à 750 millions.

Depuis 1900, les États-Unis se sont impliqués dans 56 interventions militaires directes (guerres, envoi de forces armées) et indirectes (soutien logistique à des gouvernements ou à des mouvements, activité des services secrets). Dans un article ultérieur nous mentionnions que la dette publique américaine est officiellement de 17 000 milliards, réelle estimée à 205 000 milliards (les principaux engagements du gouvernement américain sont hors bilan).

La réalité est que si ces engagements sont financièrement possibles c’est grâce au système monétaire inflationniste qui a été mis en place au début du XXème siècle, dès la création de la FED (1913) d’une part et par l’absence de tout contrôle citoyen d’autre part (absence de contre pouvoir, de droits populaires, de démocratie directe). La "démocratie" représentative est une porte ouverte à toutes les dérives totalitaires. Soulignons ici que plus de 268 membres du parlement et du sénat américain sont millionnaires, nous sommes loin du système de milice où les parlementaires sont censés gérer au mieux les intérêts et l’argent publics.

Les citoyens contribuables n’accepteraient en aucun cas qu’un "impôt de guerre" soit levé pour financer ces interventions incessantes et ruineuses. Cet impôt non consenti est malgré tout prélevé par une confiscation cachée et anonyme à travers l’inflation du papier-monnaie (sans valeur intrinsèque suite à l’abandon de l’étalon or). A la suite de son adhésion au Fonds Monétaire International (FMI) en 1992, la Suisse s’est vue contrainte elle aussi d’abandonner la couverture or du franc suisse (jusqu’alors de 40%), inscrite dans l’ancienne Constitution. Ce changement n’a pas fait l’objet d’un réel débat avec la population et a été dissimulé dans la nouvelle constitution entrée en vigueur le 1er janvier 2000.

La démonétisation de l’or orchestrée par le FMI et la Banque des Règlements Internationaux (BRI) a conduit au socialisme monétaire mondial. Les banques centrales imposent leur monnaie papier discrétionnaire comme seule monnaie légale (argent dette "fiat currency"). C’est un coup d’état silencieux qui a permis à ses instigateurs de se libérer de la "relique barbare" et ce faisant du contraignant équilibre budgétaire et ainsi de financer sans limite  – jusqu’à un effondrement du système comme en 1929 – déficits publics, conflits armés, agences de renseignements et programmes de surveillance extrêmement couteux comme nous le précisions au sujet de la NSA dans une article ultérieur.

Avec un système monétaire couvert à 100% par l’or métal, Les Etats-Unis ne se seraient pas engagés en Irak et s’ils l’avaient fait, ils auraient été obligés de quitter le pays après trois mois (épuisement progressif de leurs réserves) plutôt qu’après 8 ans et demi.

La seule façon de garantir à nouveau la paix, la liberté et la prospérité au niveau global est de :

1. Revenir à une couverture métallique or à 100% et en sanctionnant sévèrement la création de fausse monnaie (ce qui abolirait de facto les banques centrales et sonnerait le glas de leurs "politiques monétaires" destructrices causant spéculations financières sous toutes les formes, bulles, récessions et dépressions)

2. Interdire les réserves fractionnaires des banques (effet multiplicateur inflationniste du crédit)

3. Mettre fin aux monopoles étatiques de monnaies légales (les utilisateurs choisissent eux-mêmes la monnaie en qui ils ont le plus confiance, l’or étant celle qui a été choisie depuis des millénaires pour ses caractéristiques uniques de rareté, divisibilité et de valeur)

La seule manière autre que – la coercition et la suppression progressive de la souveraineté des états (ce que préconise implicitement le WEF) – pour garantir une paix durable et garantir les libertés est un retour à un système monétaire international sain et honnête indexé à 100% sur l’or métallique. Toute autre tentative d’action est illusoire et nous conduira non seulement à la ruine mais aussi à une perte toujours plus importante de nos libertés jusqu’à la dictature intégrale. L’agressivité et l’intrusion fiscale de certains pays au détriment de l’état de droit sont des signes avant-coureurs.

"..les tragédies humaines indicibles et qui ont vu le jour dans l’histoire et se perpétuent aujourd’hui sont en général liées à la radicalisation des identités"

Nicolas Murray Butler (Président de la Pilgrims Society, membre du CFR (Council on Foreign Relations) a déclaré "le monde se divise en trois catégories de gens: un très petit nombre qui fait se produire les évènements, un groupe un peu plus important qui veille à leur exécution et les regarde s’accomplir, et enfin une vaste majorité qui ne sait jamais ce qui s’est produit en réalité." La radicalisation des identités est une conséquence de l’impérialisme américain et l’ingérence d’états étrangers dans d’autres états pour satisfaire leurs propres intérêts géopolitiques et énergétiques. C’est aussi une réaction populaire au processus de destruction progressif de la souveraineté des états et une subordination toujours plus grande des peuples à des organisations supranationales opaques et sans légitimité.

"J’apprécie l’héritage culturel commun de l’Europe et la nécessité d’une union économique et finalement politique"

Nous mentionnions qu’effectivement le marché commun et l’adoption de l’euro étaient le préalable pour pouvoir imposer dans un deuxième temps une union politique antérieurement irréalisable aux yeux de l’opinion publique. A ceux qui pensent que la construction de l’Europe avait pour objectif de garantir définitivement la paix en Europe nous leur rétorquerons que le planisme était déjà fortement implanté en Allemagne avant l’arrivée du nazisme et vu l’état de dévastation de l’économie ce sont ni plus ni moins les banquiers de l’époque qui ont financé la montée d’Hitler. Le peuple Allemand n’a eu finalement aucune autre alternative à part de valider l’accession du dictateur au pouvoir.

"Nous endossons tous une responsabilité globale et avons besoin, à cet égard d’une identité globale"

Les participants du WEF – hommes politiques, les principaux acteurs dans l’industrie de l’armement, la chimie, l’agroalimentaire, l’automobile, la pharma, les biotechs et l’énergie pour ne citer qu’eux – ont certainement une responsabilité globale puisqu’ils sont en bonne partie les architectes du monde actuel. Déplacer cette responsabilité sur l’ensemble des individus alors qu’ils n’ont pas accès aux leviers des décisions pour justifier une "identité globale" est une absurdité. Mais ce n’est pas fini, il faudrait pondérer "nos diverses identités, en nous mettant sans relâche au service du bien commun supérieur." Tout ceci ressemble à de la rhétorique internationale socialiste.

"..nous ne devons pas méconnaître que, à l’avenir ce n’est plus le capital mais le talent qui fera le succès d’une société (…) leur formation et leur expérience leur on enseigné à réunir en eux aujourd’hui les identités indispensables. De manière générale ces talents ont une forte capacité à s’assimiler rapidement. Mais ils éprouvent aussi une forte aversion contre tout ce qui ressemble à du repli"

Dans une société libérale authentique le capital est un moyen nécessaire pour soutenir des idées, concrétiser des projets il n’a jamais remplacé le talent. Les personnes vraiment talentueuses sont celles qui savent s’adapter en toutes circonstances: elles comprennent les particularités culturelles et reconnaissent le droit fondamental d’auto-détermination.

"C’est pourquoi mon souci concerne moins les probables restrictions futures à l’embauche de talents que, bien plus, le climat d’attractivité d’une Suisse qui sera ressentie comme hostile à l’étranger"

La Suisse est beaucoup admirée et respectée à l’étranger pour sa démocratie participative, justement parce que les citoyens des autres pays n’ont pas la possibilité de s’exprimer et qu’ils sont pris en otage par une "démocratie" représentative qui est déconnectée de la population. Si les citoyens se réappropriaient leurs prérogatives politiques en exigeant des institutions similaires à la Suisse tout en appliquant le principe de subsidiarité, le monde se porterait infiniment mieux. Le monde n’est certainement pas un modèle pour la Suisse mais la Suisse est sans aucun doute un modèle pour le monde.

Ludovic Malot

http://ludovicmalot.wordpress.com/

2 commentaires

  1. Posté par dominique degoumois le

    NON cher Edouard Tr, c’est nos identités qui disparaissent, mais elles sont remplacées par d’autres! « Le grand remplacement » de Renaud Camus, je le vois tous les jours à Genève, dans les rues, dans les trams, partout! Je ne peux pas penser une seconde que c’est un progrès, les désordres sociaux sont déjà présents et ne vont que s’amplifier ces prochaines années! L’Homme n’est pas fait pour vivre dans un monde globalisé!

  2. Posté par Edouard Tr. le

    Ouais… Le discours mondialiste, il va falloir s’y faire car il va monter en puissance au fil des années.

    Sans pour autant être pessimiste, démographie aidant, les identités nationales s’estompent. Que l’idée d' »identité globale » s’impose, c’est un scénario plausible. Petite gouvernance mondiale via l’ONU avec 5 ou 10 blocs. Je ne le souhaite pas.

Et vous, qu'en pensez vous ?

Poster un commentaire

Votre commentaire est susceptible d'être modéré, nous vous prions d'être patients.

* Ces champs sont obligatoires

Avertissement! Seuls les commentaires signés par leurs auteurs sont admis, sauf exceptions demandées auprès des Observateurs.ch pour des raisons personnelles ou professionnelles. Les commentaires sont en principe modérés. Toutefois, étant donné le nombre très considérable et en progression fulgurante des commentaires (259'163 commentaires retenus et 79'280 articles publiés, chiffres au 1 décembre 2020), un travail de modération complet et exhaustif est totalement impensable. Notre site invite, par conséquent, les commentateurs à ne pas transgresser les règles élémentaires en vigueur et à se conformer à la loi afin d’éviter tout recours en justice. Le site n’est pas responsable de propos condamnables par la loi et fournira, en cas de demande et dans la mesure du possible, les éléments nécessaires à l’identification des auteurs faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Les commentaires n’engagent que leurs auteurs. Le site se réserve, par ailleurs, le droit de supprimer tout commentaire qu’il repérerait comme anonyme et invite plus généralement les commentateurs à s’en tenir à des propos acceptables et non condamnables.

Entrez les deux mots ci-dessous (séparés par un espace). Si vous n'arrivez pas à lire les mots vous pouvez afficher une nouvelle image.