Genève, Education: Une proposition pleine de bon sens

André Duval
Enseignant,  Ex- président de l'ARLE

Le 20 août 2012, quelques députés de l’UDC ont déposé une proposition de motion (M2100) demandant que les directeurs d’établissement scolaire primaire consacrent une partie de leur temps de travail à l’enseignement.
En effet, le nombre de directeurs d’établissement, assistés de maîtres adjoints (MA), est complètement surestimé par rapport à la charge de travail qui leur incombe.

 

 

Une proposition fort intéressante d'autant plus que toutes les conditions pour l'appliquer sont réunies...

Aujourd'hui, ils sont 79 directeurs qui n'enseignent pas, dont certains à temps partiel, soit environ l'équivalent de 70 postes à plein temps pour 32400 élèves, soit une moyenne de 450/460 élèves par directeur!!!

 

Toutes les conditions sont réunies pour que ces directeurs aient une charge d'enseignement en plus de leur fonction directoriale:

1. Ils ont du temps à disposition pour une charge d'enseignement, ce qui sera démontré dans ce billet.

2. TOUS ,sauf trois, sont des enseignants qui sont donc déjà au bénéfice d'une formation pédagogique sérieuse.

3. Ils ont été nommés en classe 24. Par comparaison, un enseignant du secondaire est en classe 20 ! On peut donc exiger d’eux de combler une charge de travail, disons...un peu légère.

4. Bénéfice financier puisque cette proposition éviterait évidemment de devoir engager beaucoup d’enseignants supplémentaires. (environ 120 selon la Motion)

 

Selon le DIP, sous la tutelle de son Président Charles Beer,

"depuis 1990 l’école primaire genevoise a vu ses effectifs croître fortement (+26%). Les structures d’encadrement n’ont pas changé depuis des décennies pour faire face à cette forte croissance des effectifs alors que le contexte socio-économique de Genève s’est profondément modifié".

C'est une évidence, il fallait donc augmenter le nombre d'inspecteurs (directeurs) mais....dans quelle mesure, telle est la réelle question?

Admettons cette augmentation d'effectif de 26%, allons même jusqu'à 30%

Logiquement, il aurait donc fallu augmenter le nombre de directeurs dans la même proportion et passer de 30 inspecteurs à 40 directeurs (30% de 30 = 10 postes de plus).

Or, aujourd'hui, il a été mis en place l'équivalent de 70 postes directeurs à plein temps, soit 40 postes de plus, une augmentation de l'ordre de 140% !!!

Et voilà qu'en plus de cette augmentation massive, le DIP a encore mis en place, pratiquement dans chaque établissement, selon leur grandeur, des maîtres adjoints pour seconder les directeurs!

Un nombre complètement surestimé en fonction de la charge de travail qui leur incombe, ce d'autant plus qu'ils peuvent déléguer de nombreuses tâches à leur maître adjoint.

 

Ainsi, ce sont ces MA qui, selon leur mandat, sont chargés, entre autres, de

 

- Personne de contact pour les parents, la commune, les remplaçants et autres intervenants

- Organisation de séances collectives, définition des ordres du jour

- Accueil des enseignants en période probatoire et aide à leur intégration au sein de l'équipe

- Planification des horaires

- Organisation des inscriptions

- Organisations et compositions des classes

- Tenue des comptes

- Suivi organisationnel de situations d'élèves

- Etc.

 

Autant de tâches qui relèvent pourtant du cahier des charges du directeur!

 

Vous l'aurez compris, on demande au MA de faire toute une part du travail directorial, tout en enseignant (ce qui est possible)...mais on ne pourrait pas l'exiger de la part des directeurs d'établissement.

 

On croit rêver!

 

Tout un mode de fonctionnement qui a été mis en place par le conseiller d'Etat en place sous prétexte de

- proximité accrue avec tous les acteurs de l'école, enseignants, parents, autorités communales, etc.

- contact direct et immédiat, lien avec les parents

- et accessoirement, décharger les enseignants des contraintes administratives alors que force est de constater qu'aujourd'hui, jamais les enseignants n'ont autant croulés sous la paperasse administrative...

 

Autant d'arguments qui ne tiennent pas la route:

1. les directeurs sont en charge de plusieurs bâtiments écoles ce qui rend la proximité et le contact direct immédiat impossible à moins de pouvoir se dédoubler.

2. Les MA sont, selon leur mandat (point 1), les personnes de contact pour les parents ... les substituts du directeur qui perd donc son statut de contact proche!

3. Certains directeurs travaillent à temps partiel. Une proximité et un contact limités donc à ce temps partiel aussi.

D'ailleurs, n'y a-t-il pas là incompatibilité entre un poste de directeur et un temps partiel...?

4. Des regroupements de bâtiments ont eu lieu (par exemple dans le Mandement et à Meyrin)..., le directeur est donc en charge d'un plus grand nombre d'écoles encore, ce qui rend d'autant plus illusoire sa proximité à moins d'un don de dédoublement! Pourrait-il être au four et au moulin?

 

Et voilà que pour justifier une aberration évidente, Monsieur Beer ose encore proclamer dans la TdG du 12 décembre 2012 :

 

"En Suisse, l'écrasante majorité des cantons est organisée ainsi. Les pays qui nous entourent aussi".

 

Des propos pour le moins étranges pour ne pas dire fallacieux.

 

D'une part, M. Beer évite soigneusement de préciser qu'il parle sans doute de l'enseignement secondaire et d'autre part, il nie qu'au primaire, dans plusieurs cantons romands, les directeurs ont une charge d'enseignement en plus de leur fonction directoriale.

 

En effet, renseignements pris, il se trouve que dans les cantons de

- Vaud, les directeurs sont responsables du primaire ET du secondaire en même temps. Dès lors ils ont une charge de travail beaucoup plus importante qu'à Genève puisque ils gèrent des milliers d'élèves. Ces directeurs n'enseignent donc en principe pas.

-Valais, deux situations en fonction de la grandeur des établissements. Ainsi, à Sion par exemple, la situation est semblable à celle du canton de Vaud. Il y a un seul directeur (+ 2 adjoints) pour quelques milliers d'élèves, point de charge d'enseignement pour eux.

Mais, dans les plus petites communes, la plupart des directeurs, en plus de leur charge directoriale, enseignent partiellement, en fonction du nombre d'élèves. Ainsi, à Grimisuat par ex, à 50%

Ce qui est également les cas dans

- le Jura et Fribourg, où les directeurs peuvent enseigner jusqu'à 50%

 

Ce qui est certain c'est que, en ce qui concerne le primaire uniquement, il n'y a qu'à Genève où les directeurs n' ont pas de charge d'enseignement.

Tout le contraire de ce que prétend Charles Beer!

C'est une évidence, ces directeurs ont donc du temps "libre" en suffisance pour le consacrer à l’enseignement!

Ce serait tout bénéfice pour l’institution qui aura besoin, dès la rentrée 2014, d’effectifs supplémentaires dus à l’application d’Harmos et au mercredi matin de travail : 120 postes d’après la motion.

Ceux-ci gagneraient en crédibilité en faisant partie intégrante du corps enseignant. En effet, pour bien diriger une école, il est important d’avoir un pied dans le terrain. Ce d'autant plus que si l'on doit juger du travail de ses collaborateurs, il faut être dans la pratique.

Pour ce faire, pourquoi ne pas leur attribuer l’enseignement des langues, allemand ou anglais? Ou mieux encore, la prise en charge des cours d’appui pour les enfants en difficulté.

 André Duval, 12 septembre 2013

2 commentaires

  1. Posté par Cain_Marchenoir le

    Pas d’accord avec vous Mr Romain, il y en a un très simple: se mettre les directeurs dans la poche. Ce sont eux qui font tampon entre les enseignants et le département….

  2. Posté par Jean Romain le

    On nous enfume avec des sottises parce que, dans le fond, ces dirlos ne sont pas nécessaires. Ils n’existe pas d’arguments, à part des positions idéologiques prises a priori, pour ne pas faire enseigner ces dirlos.

Et vous, qu'en pensez vous ?

Poster un commentaire

Votre commentaire est susceptible d'être modéré, nous vous prions d'être patients.

* Ces champs sont obligatoires

Avertissement! Seuls les commentaires signés par leurs auteurs sont admis, sauf exceptions demandées auprès des Observateurs.ch pour des raisons personnelles ou professionnelles. Les commentaires sont en principe modérés. Toutefois, étant donné le nombre très considérable et en progression fulgurante des commentaires (259'163 commentaires retenus et 79'280 articles publiés, chiffres au 1 décembre 2020), un travail de modération complet et exhaustif est totalement impensable. Notre site invite, par conséquent, les commentateurs à ne pas transgresser les règles élémentaires en vigueur et à se conformer à la loi afin d’éviter tout recours en justice. Le site n’est pas responsable de propos condamnables par la loi et fournira, en cas de demande et dans la mesure du possible, les éléments nécessaires à l’identification des auteurs faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Les commentaires n’engagent que leurs auteurs. Le site se réserve, par ailleurs, le droit de supprimer tout commentaire qu’il repérerait comme anonyme et invite plus généralement les commentateurs à s’en tenir à des propos acceptables et non condamnables.

Entrez les deux mots ci-dessous (séparés par un espace). Si vous n'arrivez pas à lire les mots vous pouvez afficher une nouvelle image.