Feuille de route vers un désastre?

Stéphane Montabert
Suisse naturalisé, Conseiller communal UDC, Renens

Au hasard de leur pérégrinations, certains d’entre vous sont peut-être déjà tombés dans un recoin d’Internet sur la célèbre « carte de la domination islamique », une espèce de plan plus ou moins délirant de conquête du monde…

Par bien des aspects, l'oeuvre prête à sourire. La carte est chargée d'erreurs. Elle ne montre pas l'Espagne comme terre musulmane, ce qu'elle a été pendant quelques temps. Vu d'Arabie Saoudite, définie comme centre du pouvoir, l'Indonésie ne semble pas considérée comme pays sous zone d'influence, alors qu'il s'agit aujourd'hui du pays musulman le plus peuplé du monde. A l'inverse, l'Inde est incluse dans son giron, hypothèse pour le moins audacieuse.

On notera également l'appétit sans borne de notre cartographe: dans le coin en bas à droite, on réalise « qu'après cent ans » le monde sera 100% sous domination islamique, intégralement peint en vert, du Chili au Japon en passant par le Groënland... Beaucoup de travail en perspective!

Islam-will-dominate-the-world.jpgEvidemment, personne n'a jamais entendu parler d'une quelconque « division de la recherche au sein d'une « mission islamique mondiale » tout aussi hypothétique. Pourtant, il se dégage de ce pseudo-plan une forme de sincérité naïve plaidant en faveur de son authenticité.

Le fait est que cette carte ne choquera personne, surtout pas les premiers intéressés. Elle colle à une vision du monde largement répandue au sein des croyants eux-mêmes, qui ne font guère mystère de leur engagement en faveur d'une domination islamique mondiale à l'occasion de telle ou telle manifestation.

La plupart des musulmans n'ont que faire de ces délires et se contentent de vivre paisiblement leur vie, mais cela n'empêche pas une part non négligeable, bruyante et revendicative de leur co-religionnaires d'afficher fièrement sa volonté de conquête à la moindre occasion.

Et c'est tout de suite beaucoup moins drôle.

Niveau d'alerte orange, bonne journée

La combativité des islamistes n'a rien d'un mystère. Depuis les attentats 11 septembre 2001, où le jihad s'est révélé au monde sous une forme aussi incontestable que spectaculaire, la guerre sainte islamique a le vent en poupe, même si la montée en puissance des services de contre-espionnage occidentaux (et les guerres d'Irak et d'Afghanistan) ont considérablement compliqué la donne des terroristes. Mais de nos jours, lorsqu'une bombe explose où que ce soit, la routine revient à de se demander quel groupuscule islamique revendiquera le massacre en premier. Renoncer à procéder ainsi peut carrément entraîner la chute d'un gouvernement.

Où en est votre pays dans le Grand Plan de Domination Mondiale ?

Le facteur principal n'est pas lié à la pauvreté, au sentiment anti-américain ou Dieu sait quelle excuse bidon emportant l'adhésion des intellectuels du moment, mais simplement, semble-t-il, à la proportion de musulmans au sein d'une population totale. Rebondissant sur un ouvrage controversé de Peter Hammond, un article de l'Examiner (traduit ici-même) se propose ainsi de classifier empiriquement des pays selon ce critère. La corrélation entre proportion de musulmans et troubles civils est étonnante:

Une population musulmane autour de 2% ou en-dessous sera perçue dans n'importe quel pays comme une minorité pacifique et aucunement une menace. C'est le cas aux Etats-Unis (0,6%), en Australie (1,5%), en Chine (1,8%), en Italie (1,5%) ou au Canada (1,9%).

Entre 2% et 5%, le prosélytisme commence auprès des autres minorités ethniques et des groupes défavorisés, recrutés principalement en prison et au sein des gangs. C'est le cas au Danemark (2%), en Espagne (4%), en Allemagne (3,7%) ou en Thaïlande (4,6%).

A partir de 5%, ils exercent une influence en proportion de leur pourcentage de la population. Par exemple, l'introduction de nourriture halal, garantissant l'emploi de musulmans dans certains secteurs économiques. Ils augmenteront la pression sur les chaînes de supermarchés pour disposer de nourriture halal sur les étals - ainsi que des menaces pour qui refuse de se soumettre. Ceci survient en France (8%), aux Philippines (5%), en Suède (5%), en Suisse (4,3%), aux Pays-Bas (5,5%). A ce stade, ils travailleront à ce que le gouvernement les laisse se gouverner eux-mêmes (au sein de leurs ghettos) sous la loi de la Sharia. (...)

Lorsque les musulmans atteignent 10% de la population, ils provoquent l'anarchie pour mieux se plaindre de leur condition. A Paris, les voitures brûlent. N'importe quelle action d'un non-musulman offensant l'islam provoque des soulèvements et des menaces, comme à Amsterdam lors de l'affaire des caricatures ou du film anti-islamique. Ces tensions sont quotidiennes, en particulier dans les quartiers musulmans, dans des pays comme la Guyane (10%), l'Inde (13,4%), Israël (16%), la Russie (15%) ou le Kenya (10%).

Après avoir atteint 20%, les nations peuvent s'attendre à des émeutes au moindre prétexte, des tueries sporadiques, et la destruction par le feu d'églises et de synagogues comme en Ethiopie (32,8%).

A 40%, les pays subissent des massacres à grande échelle, des attentats terroristes chroniques et une guerre civile de basse intensité comme en Bosnie (40%), au Tchad (53,1%), au Liban (59,7%).

A partir de 60%, les nations éprouvent une persécution sans entrave des infidèles de toutes religions (ainsi que des musulmans non pratiquants), des nettoyages ethniques sporadiques, l'utilisation de la Sharia comme arme et la Djizîa, la taxe sur les infidèles, comme en Albanie (70%), en Malaisie (60,4%) ou au Soudan (70%).

Après 80%, attendez-vous à une intimidation quotidienne et un jihad violent, une épuration ethnique à l'échelle du pays et même quelques génocides, alors que les nations en question expulsent les infidèles dans leur marche vers la pureté des 100%, comme certains pays l'ont expérimenté ou l'expérimentent aujourd'hui au Bengladesh (83%), en Egypte (90%), à Gaza (98,7%), en Indonésie (86,1%), en Iran (98%), en Irak (97%), au Maroc (98,7%), au Pakistan (97%) et bien d'autres encore...

Les 100% amènent enfin la paix du Dar-al-Islam, la Maison de la Paix. Ici on s'attend à ce que ce soit la paix parce que tout le monde est musulman, les madrasas sont les seules écoles et le Coran le seul livre, comme en Afghanistan (100%), en Arabie Saoudite (100%), en Somalie (100%) ou au Yémen (100%). Malheureusement, la paix n'est jamais atteinte, car dans ces pays 100% musulmans les islamistes continuent à intimider et prêcher la haine, et épanchent leur soif de sang en tuant des musulmans moins radicaux pour tout un tas de raisons.

Le chemin vers l'islamisation du monde n'est pas un long fleuve tranquille.

La bombe à mèche lente

A lire le paragraphe précédent, on serait tenté de vouloir se calfeutrer chez soi en fermant les frontières à double-tour. Le réflexe n'est pas dénué de sens mais inadapté pour deux raisons. La première d'entre elle a trait à la démographie.

En publiant son ouvrage La Bombe P en 1968, Paul R. Ehrlich prédisait une famine massive à l'échelle mondiale lors des années 1970 et 1980 à cause de la surpopulation, et demandait, tant qu'à faire, des actions politiques immédiatement pour limiter la croissance démographique. Les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu'elles concernent l'avenir, disait Pierre Dac...

Ce malheureux contre-exemple nous rappelant l'incertitude liée à toute prospective, la démographie mérite néanmoins d'être étudiée. La dynamique humaine est extrêmement lente: il faut vingt ans pour qu'émerge une nouvelle génération. En d'autres termes, la population des années 2030 est déjà en train de se construire, dans des maternités ici ou là.

Certaines tendances lourdes sont à l'oeuvre sur le futur démographique du continent européen...

... la proportion de musulmans est difficile à définir au sein de chaque pays, parce que les statistiques religieuses n'ont souvent pas de réalité officielle ; parce que la natalité de 2010 est sans doute très différente de celle de 2020 ou de 2030 ; ou simplement parce que d'autres facteurs (crise économique, guerre, révolutions, épidémies...) modifieront probablement les proportions d'ici-là. Pourtant, la dynamique semble bien présente, comme en témoignent les populations des écoles.

Quelle proportion des enfants et des adolescents en perdition actuels finiront embringués dans des gangs à cheval entre l'islamisme et le grand banditisme, devenant petit à petit des apprentis terroristes? La question se pose chaque jour avec plus d'acuité, nous amenant à la troisième facette du problème, la violence.

Du musulman à l'islamiste

Bien qu'ils soient des millions en Europe, les musulmans sont dans leur écrasante majorité parfaitement paisibles. S'ils ne l'étaient pas, le continent serait déjà à feu et à sang. Le problème vient d'une proportion d'individus en leur sein - ceux que le langage populaire désigne sous le vocable "islamiste" - prête à la violence et au jihad.

Évidemment, le nombre d'islamistes est rapport au nombre de musulmans: si seulement un musulman sur dix mille meurt d'envie de se faire exploser avec une ceinture piégée, cela fait cent bombes humaines potentielles pour une population musulmane d'un million, mille bombes pour une population de dix millions.

Ce n'est pourtant pas si simple, car la proportion d'islamistes au sein d'une population musulmane peut grandement varier selon ce que nous appellerons son "taux de radicalisation", un taux largement lié aux conditions de vie de la communauté musulmane, à son intégration avec le reste de la société, à son logement dans des enclaves, à la résistance des institutions en place, à la sympathie que les modérés éprouvent envers les radicaux, à l'influence exercée par les imams et autres prédicateurs sur sa spiritualité, pour ne citer que quelques facteurs... Un champ de recherche sociologique passionnant, mais politiquement incorrect!

Le raccourci musulman = islamiste = terroriste est d'autant plus erroné qu'on oublie que tout non-musulman est susceptible de se convertir, si bien que finalement, quitte à se complaire dans le simplisme, toute population devient suspecte, y compris les non-musulmans. Ce n'est pas qu'une formule réthorique: les convertis à l'islam sont les plus dangereux, selon le juge antiterroriste français Jean-Louis Bruguière, dont on peut raisonnablement espérer qu'il sache de quoi il parle.

Non seulement les convertis passent aisément au travers des mécanismes de surveillance traditionnels (et sont donc des recrues de choix pour les cellules terroristes) mais ils sont aussi, souvent, les plus ardents défenseurs de la foi. A l'inverse d'un musulman de naissance devant son affiliation à son héritage et à l'interdit de l'apostasie, un converti aura délibérément choisi sa religion. Si la conversion est dûe à des motifs sincères, on supposera que sa ferveur est au sommet.

Les services antiterroristes d'Europe tournent à plein régime, mais se font régulièrement dépasser (comme l'attestent les attentats de Madrid ou de Londres) ou arrêtent les terroristes in extremis. Vu d'Europe, le Grand Plan de Domination islamique du début n'a plus l'air tout à fait délirant, et certainement pas à l'horizon 2100...

Nos enfants risquent de vieillir dans une Europe très différente de celle dans laquelle nous avons vécu. Mais cette « différence » viendra moins du pourcentage éventuel de population musulmane au sein de chaque pays que du niveau de violence associé à sa présence.

Infléchir la trajectoire

Il serait un peu trop déprimant de finir ce tour d'horizon sans quelques notes d'espoir, car tout n'est pas encore perdu. Même si le plus puissant des facteurs est en marche, la démographie, il reste encore quelques années pour se préparer.

Voici quelques pistes qui pourraient selon moi infléchir la tendance, même si prise séparément aucune mesure ne saurait être suffisante.

  • Une politique d'immigration révisée. Un Yéménite musulman et un Australien protestant ne sont pas interchangeables en termes d'intégration. Ce n'est pas une question de distance, mais de culture. Si les pouvoirs politiques gardent les yeux plus ou moins ouverts vis-à-vis des nationalités d'origine des nouveaux venus, poser le moindre critère en fonction du background culturel et religieux d'un immigré reste tabou, ce qui est de la plus profonde absurdité.
  • Le renvoi effectif des étrangers indésirables. La France découvre tardivement que la prison est le creuset de l'islamisme radical mais d'autres pays n'en sont même pas encore là. Pour empêcher que les détenus ne s'embrigadent dans des structures associant allègrement banditisme et terrorisme, pour que la prison retrouve son rôle de réinsertion, il est indispensable d'isoler les détenus les plus dangereux lors de leur incarcération et, s'ils sont étrangers, de protéger la société de leur présence à l'issue de leur peine par des procédures de renvoi effectives.
  • Le rappel formel et constant de la liberté de changer de religion, et de la primauté des lois civiles sur les lois religieuses. Dans nos sociétés occidentales, la religion appartient à la sphère privée individuelle. Tel n'est pas le cas dans le monde musulman où coran et Sharia définissent absolument tous les aspects de l'existence. Cette différence est source de revendications sans fin de la part des islamistes. On pourrait imaginer que l'école insiste sur cet aspect de notre système juridique, et que les immigrés demandant un permis de séjour s'engagent à la respecter, à travers une charte des devoirs par exemple, qui leur serait rappelée à chaque renouvellement du permis. La santé n'est pas en reste.
  • L'apprentissage de la langue. Le langage est un fantastique outil d'intégration - ou de ségrégation. La maîtrise de la langue locale est un atout pour l'émancipation, pour limiter la formation de ghettos, et pour l'éducation. N'importe quel immigré installé depuis un certain temps devrait démontrer sa maîtrise d'une langue nationale, de même que les membres d'une famille venus au travers du regroupement familial. L'échec entraînerait l'expulsion.
  • La formation d'imams locaux. La radicalisation des musulmans est directement liée aux discours tenus dans les mosquées, aux prédicateurs des prisons et à la mainmise d'un clergé poussant les fidèles à la revendication. Il est urgent que les orateurs extrémistes laissent la place à des modérés, et que la filière de formation d'imams locaux soit elle-même mise à l'abri de toute tentative de radicalisation par des agents infiltrés. Le devoir de surveillance des autorités est essentiel.
  • L'interdiction du voile intégral. Le voile islamique est le symbole de soumission de la femme à l'homme (qui peut être volontaire, soit) mais avant tout un moyen de pression que les radicaux exercent sur les modérés, et d'intimidation à l'égard des non-musulmans. Il n'est pas étonnant que tous les pays en proie à des violences islamiques interdisent le port du voile intégral.
  • Une révision des politiques natalistes. L'encouragement des naissances est perçu comme une bonne chose, mais le modèle de famille pourrait être revu. Peut-être que les allocations familiales mériteraient d'être réévaluées dès le premier enfant, mais plafonnées à trois ou quatre, de façon à encourager au maximum un grand nombre de familles avec quelques enfants plutôt que quelques familles pléthoriques au milieu d'autres sans descendance.

Finalement, les sociologues devraient se pencher avec bien plus d'attention sur le processus psychologique et sectaire transformant un individu en terroriste suicidaire, et ajuster les mesures sociales en conséquences. Tous les indices laissent à penser que le continent ne manquera pas d'exemple malheureux pour étayer telle ou telle thèse.

Bien entendu, il n'y a à peu près aucune chance que ces mesures soient prises, à court ou moyen terme. Elles deviendront donc d'autant plus nécessaires que la situation se sera dégradée, rendant encore plus délicate leur mise en oeuvre...

Le continent européen s'apprête à passer un siècle difficile.

 

1ère diffusion sur le blog de Stéphane Montabert. Ici version raccourcie, Ndlr.

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