Moins de migrants au départ de la Libye

Logiquement, les ONG dites « humanitaires » qui opéraient au large de la Libye avant d’être chassées de la zone par la garde côtière libyenne à partir du 12-13 août devraient se réjouir. Après leur départ, le nombre de noyades recensées par l’OIM est en chute libre : cinq seulement entre le 8 août et le 13 septembre. En tout, il y a eu 18 noyades de clandestins en Méditerranée en août, alors qu’en mai et juin on en avait recensé respectivement 610 et 537. La raison de ce succès est simple : grâce à l’action des garde-côtes libyens, soutenue par l’Italie, le mois de juillet avait déjà connu une baisse de 50 % du nombre d’immigrants illégaux au départ de la Libye. Avec le départ des ONG européennes qui approchaient des côtes transpondeur éteint (pour masquer leur position aux autorités) et projecteurs allumés (pour signaler leur position aux immigrants et aux passeurs sur la côte), ce nombre s’est encore réduit de 87 % en août, avec « seulement » 3 235 immigrants débarqués en Italie (contre 21 295 en août 2016). Si moins de candidats à l’immigration illégale tentent leur chance, c’est aussi parce que, au contraire des ONG européennes, les garde-côtes libyens les ramènent en Libye.

Accord avec les milices, négociation avec les trafiquants

Une autre cause de cette baisse très significative des départs en mer est néanmoins avancée par les ONG et dans les médias qui dénoncent par ailleurs le sort réservé aux migrants ramenés ou bloqués en Libye. Le gouvernement italien est en effet accusé d’avoir donné de l’argent aux milices qui faisaient office de passeurs pour qu’elles cessent d’embarquer les migrants. Rome nie bien entendu avoir négocié avec les trafiquants, mais il se dit aussi que c’est le gouvernement de Fayez el-Sarraj à Tripoli, avec lequel l’Italie coopère étroitement pour stopper l’afflux d’immigrants illégaux, qui aurait passé des accords avec ces milices, en s’aidant des millions de dollars reçus de l’Italie et de l’ONU. « Je ne pense pas que quelqu’un soit venu d’Europe avec une mallette pleine d’argent et l’ait donnée aux chefs de guerre libyens, c’est plus compliqué que cela », a indiqué Mattia Toaldo, spécialiste du Conseil européen des relations internationales pour la Libye et les questions migratoires, cité cette semaine par l’hebdomadaire anglais The Economist.

Un renversement de la situation en Libye pourrait donc faire repartir à la hausse le nombre de clandestins qui prennent la mer. Il y a la question des milices avec lequel le gouvernement el-Sarraj se serait provisoirement entendu, mais il y a aussi le conflit avec l’autre gouvernement libyen, dirigé par le général Haftar depuis Tobrouk et maître de toute la côte orientale, qui menaçait début août de bombarder les navires de la Marine italienne envoyés pour soutenir la garde côtière d’el-Sarraj. A la mi-août, le général Haftar, en visite à Moscou, qualifiait au contraire d’invités les navires de la marine italienne amarrés au port de Tripoli, ce qui permet de supposer que le gouvernement de Paolo Gentiloni s’est aussi entendu avec lui, ou au moins avec l’Egypte qui est le principal soutien du gouvernement de Tobrouk.

C’est sûr que c’était plus simple pour l’Italie avant que Sarkozy et Cameron, soutenus par Obama, ne renversent et ne fassent assassiner Khadafi.

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Bateau de sauvetage en Méditerranée.
Japatino-Getty Images

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