Des migrants contre la migration

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Deux migrants gambiens, rapatriés après des années de souffrances d’un périple cauchemardesque, ont créé une association pour dissuader les jeunes candidats à la migration de s’embarquer dans cette expédition et réclamer des emplois dans leur propre pays.

De retour dans sa ville de Banjul depuis quelques mois, rapporte Le Monde, Karamo Keïta, 27 ans, a fondé, avec d’autres migrants, victimes comme lui d’abus ignobles pendant leur périple, une association : « Les Jeunes contre la migration illégale ». Ils réclament aux nouvelles autorités la création d’emplois en Gambie. Après avoir été volé, agressé, frappé et finalement réduit en esclavage avant d’être renvoyé en Gambie, Karamo Keïta veut éviter aux jeunes le même enfer. Et au passage il casse le mythe de l’El Dorado, d’une vie meilleure en Europe, à portée de main pour tous.

Keïta raconte avoir payé des pots-de-vin exorbitants au Burkina Faso, puis avoir été escroqué par un passeur à Agadez, au Niger, avant d’arriver en Libye, où « le cauchemar a vraiment commencé » : « En Libye, les Noirs n’ont pas de droit, n’ont pas leur mot à dire », raconte-t-il en se souvenant avoir travaillé des jours entiers, sans être payé, pour des intermédiaires devant le conduire jusqu’au nord du pays, vivant dans la crainte des kidnappeurs et de la police. « On nous faisait passer de ferme en ferme, où des Libyens nous vendaient comme esclaves. On travaillait constamment. Certains étaient tués s’ils travaillaient trop lentement. Tout ce qu’on pouvait faire, c’était prier pour en sortir vivant… » En janvier, arrivé à Tripoli, il a été arrêté par la police. « On a pris mon argent et mon téléphone. Des soldats nous ont entièrement déshabillés et battus jusqu’à l’aube. »

La Gambie, le plus petit pays d’Afrique continentale, a le plus haut taux de migrants traversant la Méditerranée par habitant. 5 500 Gambiens ont atteint cette année l’Italie après une traversée à hauts risques depuis la Libye, selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). La gardienne de but de l’équipe nationale féminine de football, Fatim Jawara, est morte noyée en octobre 2016 à l’âge de 19 ans.

Le président Adama Barrow, de son côté, ne tient pas le même discours dissuasif : « Les jeunes prennent le risque d’entreprendre ce voyage. Vous ne pouvez pas les en blâmer. Ils ont atteint un tel niveau de frustration. »

Précisément, l’association de Karamo Keïta déplore l’absence de réponse à ses initiatives de la part des nouveaux responsables du pays enclavé dans le Sénégal et dirigé pendant vingt-deux ans par l’ancien président Yahya Jammeh, aujourd’hui en exil.

Après être intervenus dans les médias, les deux Gambiens vont bientôt débuter une tournée de prévention à travers leur pays. Et d’abord dans ces campagnes très pauvres de l’arrière-pays qui sont les cibles privilégiées des passeurs. L’association réclame l’aide des autorités pour relancer l’agriculture et la pêche, dans l’objectif d’empêcher ces départs suicidaires. « Nous aimerions qu’on nous attribue des terrains inexploités », réclame Karamo Keïta. Pour le prix de quelques bateaux, le gouvernement pourrait donner des emplois et « décourager de nombreux pêcheurs de s’embarquer pour le périlleux voyage vers l’Italie ».

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