L’idéologie de la haine

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Depuis les Lumières françaises, s’affrontent deux visions antagonistes des sociétés européennes : celle de l’« émancipation » et celle de l’« enracinement », comme le dépeint avec grand talent Chantal Delsol dans l’un de ses derniers ouvrages La haine du monde.

Les Lumières étaient porteuses de l’émancipation des hommes et des peuples, contre l’enracinement, idéologie de l’Ancien Régime et des traditions. L’une et l’autre ont donné naissance aux deux grandes idéologies totalitaires du XXe siècle, le national-socialisme, au nom de l’« enracinement », et le communisme soviétique, en celui de l’« émancipation », du moins théorique.

Or, si la haine pour le national-socialisme est évidente, aucune haine pour les crimes, tout aussi odieux, du communisme soviétique pendant 70 ans. C’est que l’indulgence et la compréhension pour celui-ci repose sur son idéologie de l’« émancipation » qui sous-tendait ce totalitarisme. Or, l’émancipation – comprendre l’individualisme, le mythe intouchable du « progrès », est également le moteur unique de l’idéologie démocratique moderne qui s’est fait l’adversaire farouche de l’« enracinement » méprisable et même haïssable.

D’ailleurs, l’épouvante du national-socialisme est moins fondée sur son caractère totalitaire que sur ses racines identitaires destructrices aux yeux des élites dominantes démocratiques. Les démocraties acceptent de nombreux régimes totalitaires à condition qu’ils affichent un fondement émancipateur.

En revanche, la lutte contre Daech ou Al Qaida prend en compte le caractère identitaire de ces mouvements fondés sur une idéologie d’« enracinement ». C’est impardonnable… et donc assimilable au totalitarisme nazi comme cela est souvent d’ailleurs invoqué.

En réalité, le fossé censé séparer émancipation et enracinement a peu à peu donné lieu au développement d’une haine qui repose sur une nouvelle dichotomie du Bien et du Mal. Le Bien c’est l’idéologie de l’émancipation, de l’individualisme, de l’homme déifié, des droits de l’homme. Le Mal est personnifié dans les idéologies de l’enracinement, sous toutes ses formes : défense des identités, retour aux anciennes religions, primauté des communautés sur l’individu.

Les mouvements écologistes eux-mêmes sont divisés et ambigus sur ces positionnements entre enracinement et émancipation. C’est aussi ce qui fait leur échec en demi-teinte, sauf lorsqu’ils axent leurs actions sur le progrès et l’émancipation des hommes, comme le fait l’écologie politique.

Le Bien démocratique est devenu ainsi une sorte de religion nouvelle du progrès, de toutes les mixités et les émancipations systématiques, du rejet du passé symbole d’enracinement, sauf celui qui en alimente la haine : le national-socialisme.

Or la problématique de l’Europe repose bien à nouveau sur cette dichotomie profonde en prenant la forme superficielle et perverse des « populismes » ou des oppositions « mondialistes/patriotes ».

L’émancipation c’est la toute-puissance de l’individu, un monde ouvert sans frontières, un regard qui méprise le passé en tant qu’enseignement du futur, une anticulture assumée, un rejet de l’holisme et des lois de la nature.

Le vieil équilibre entre progrès et racines est détruit depuis deux siècles en développant les haines des vainqueurs de l’émancipation sur les partisans des valeurs de l’enracinement.

Pour autant, enracinement ne signifie absolument pas le rejet du progrès, d’un progrès respectant les racines et qui n’est pas une idéologie systématique synonyme de Bien et de Vérité uniques.

Le progrès n’est pas non plus un meilleur automatique pour les hommes, pas plus que l’évolution des esprits n’est le signe d’une intelligence supérieure par rapport aux Anciens. Le progrès des sociétés et des techniques peut aussi être une régression pour les valeurs humaines.

« Le Bien, c’est le juste milieu » proclamait l’Antiquité, et non une idéologie de religion laïque destructrice de toute opposition.

Jose Antonio Primo de Rivera écrivait : « Je ne suis pas conservateur car les conservateurs veulent tout garder, même ce qui est mauvais ; je ne suis pas progressiste car les progressistes veulent tout détruire même ce qui est bon. »

Voilà des réflexions que nos élites dictatoriales européennes pourraient méditer.

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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

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