Quand trop de pauvres peuvent encore se déplacer en voiture…

...La solution est toute trouvée: le péage urbain!

Le terme de péage urbain faisant un peu trop agressif - la guerre commence dès le vocabulaire - on utilisera une autre formule: la "tarification de la mobilité", de son nom anglo-saxon mobility pricing.

Qu'est-ce que la tarification de la mobilité? Pour le savoir, il suffit de lire le cri du cœur lancé contre ce projet par Nadja Pieren, Conseillère nationale UDC bernoise et minoritaire dans la commission en rapport, pour comprendre l'arnaque:

La commission des transports du Conseil national a discuté au milieu du mois de mars dernier du rapport sur la "tarification de la mobilité" (mobility pricing). Cette notion trompeuse cache en réalité une nouvelle taxe d'incitation sur les transports. Nous savons tous qu'un aménagement rapide de nos infrastructures de transport est le meilleur moyen de régler cette problématique. L'UDC refuse donc cette "tarification de la mobilité". Nous ne voulons pas que l'utilisation de la route et du rail devienne un privilège de gens aisés.

La suite devrait intervenir en juin, par un projet-pilote validé par le Conseil Fédéral. L'idée est de mettre en place une "expérience-pilote" de tarification différentiée sur un domaine donné - autrement dit, un péage urbain. On fera une étude censée déterminer les "gagnants" et les "perdants" de cette intervention, mais ne nous leurrons pas: l'intérêt est au bout du compte de tordre le cou à ce fameux alinéa trois de l'article 82 de la Constitution helvétique qui empêche l'établissement de péages sur le territoire. Ce n'est pas que la Constitution empêche beaucoup le gouvernement d'agir comme bon lui semble, mais enfin, lorsque c'est possible, autant respecter les formes.

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La notion de péage urbain m'a fait repenser à un texte que j'avais écrit sur le sujet en 2006, dont voici un extrait:

En Angleterre, le central London congestion charging (CCLondon) prélève son obole de 8 £ par jour [11,5 £ en 2017...] sur toute voiture franchissant une certaine zone du centre-ville entre 7h et 18h30 hors week-ends. En bon mécanisme étatique, il existe une foule d'exceptions, d'incitations et de régimes spéciaux ; par exemple, le paiement de la taxe doit être fait avant 22h le jour même (ne me demandez pas pourquoi) faute de quoi le montant est majoré. Sont exemptés les véhicules spéciaux (autobus, minibus, taxis, motos, véhicules à carburant alternatif et... les vélos). Toutefois, certaines de ces exemptions sont un remboursement, et non une exemption réelle: tout le mécanisme de fichage des mouvements des véhicules continue donc à exister. Les heureux résidents du centre-ville ont généreusement droit à une grosse remise s'ils payent à l'avance le montant de leur péage. Le tout est surveillé par quelques centaines de caméras qui lisent les numéros de plaque d'immatriculation. (...)

Londres n'est pas la seule ville à s'être lancée dans le péage urbain. Singapour fut la première, en 1998.

A l'inverse de la capitale britannique et de son impôt routier déguisé sous de belles intentions, les autorités du petit pays asiatique eurent vraiment à cœur de réguler le trafic. Partant du constat simple que le réseau n'est engorgé qu'aux heures de pointe, le système de péage mis en place eut droit à un tarif dégressif selon l'heure: bon marché la nuit, très cher lors des pics traditionnels de circulation, et moyennement cher le reste de la journée. Mais c'est à l'occasion d'un voyage là-bas que j'eus l'opportunité de constater à quel point les bonnes idées sur le papier ne fonctionnent pas toujours en réalité.

A Singapour donc, le visiteur étonné pourra voir de longues files de véhicules stationnés au bord de certains axes, parfois moteur arrêté avec leur conducteur en train de lire le journal ou de prendre l'air dehors. Que font ces gens? Ils attendent l'heure de changement de tarif du péage! Disciplinés, bien sagement alignés en files, à la mode de Singapour, ils laissent passer le temps pour économiser de l'argent. Évidemment, la place qu'ils prennent sur la chaussé force les autres automobilistes - ceux qui sont prêts à payer le prix fort - à s'entasser pour accéder au périphérique, si bien que les embouteillages ont plutôt lieu à l'entrée des autoroutes que sur celles-ci... (...)

Sur le long terme, on peut être optimiste: la voiture non polluante finira bien par arriver. Il sera amusant de voir alors quels trésors d'imagination les écologistes déploieront pour continuer leur guerre contre la mobilité individuelle au nom de la soi-disant défense de l'environnement.

En attendant, il faudra bien supporter toujours plus de péages, de taxes et d'impôts - à l'achat d'un véhicule, pour son entretien, sa possession, son essence, son stationnement, et désormais son déplacement. Et comme d'habitude, ceux dont les moyens sont les plus modestes souffriront le plus.

Et je concluais avec un paragraphe qui n'a hélas pas pris une ride:

La prochaine fois que vous entendrez quelqu'un soutenir l'idée d'un péage autoroutier pour accéder aux villes, centre ou pas, acquiescez d'un air entendu avant de lui confier: "Moi aussi, je suis pour. Il y a encore beaucoup trop de pauvres qui ont les moyens de conduire en ville." Cela devrait stimuler la discussion!

Qu'on se le dise, le train du changement est lancé. Même s'il n'a pas encore atteint sa vitesse de croisière, il a clairement quitté la gare. Tout se met progressivement en place pour que l'automobiliste suisse doive bientôt cracher au bassinet dès qu'il veut aller quelque part en voiture. Il faudra probablement beaucoup lutter pour l'empêcher ; voilà ce qui se passe quand on ne fait pas assez attention aux élus qu'on envoie à Berne pour nous représenter.

Stéphane Montabert - Sur le Web et sur LesObservateurs.ch, le 30 mars 2017

9 commentaires

  1. Posté par LAMBERT le

    Je comptais quitter la France pour m’installer en Suisse mais j’ai dû renoncer vu le coût de la vie prohibitif ! Neuchâtel taxe annuelle de 80 CHF pour détention d’un chien ben voyons et tout à l’avenant … La Suisse je la réserve donc à des séjours d’agrement malgré leur coût. Helvétiquement vôtre !

  2. Posté par pierre frankenhauser le

    Les soi-disant écolos sont comme les pastèques: verts à l’extérieur, rouges à l’intérieur.

    Lorsque des personnes postulent pour un logement, seules celles qui peuvent justifier travailler dans les environs devraient y avoir accès. En plus de cela, une fois le bail signé, elles devraient être directement annoncées au contrôle des habitants par la gérance elle-même, histoire d’éviter des tricheries. En effet, combien de plaques GE (et souvent les mêmes depuis longtemps) vois-je chaque semaine sur la Côte au petit matin qui quittent le leur logement. Ceux que je connais n’ont de véhicules de service ou de fonction. Ils trichent avec le contrôle des habitants, et donc avec les impôts cantonaux et communaux. On paie ses impôts là où on habite, point-barre. Ainsi, chaque canton aurait aussi un peu plus de moyens pour entretenir leurs routes.

    On pourrait également taxer prioritairement les voitures des frontaliers. Ils ont un pouvoir d’achat disproportionné par rapport aux Suisses et ne dépensent quasiment rien chez nous, avec leur « gamelle pour le midi ».

    Quant au péage envisagé pour financer la traversée du lac à Genève, beaucoup d’automobilistes risquent de contourner l’ouvrage juste pour économiser de la thune. Au final, ce sera un gouffre financier.

  3. Posté par Dominique Schwander le

    La circulation et les bouchons augmenteront tant que nos élus islamo-collabos et UEidolâtres feront que la population de Suisse augmente, sans aucune raison valable.
    Les mesures discutées et envisagées sont des emplâtres coûteuses et compliquées sur une jambe de bois.
    Je ne vois qu’une mesure utile et efficace: diminuer le nombres des pendulaires. Que les cantons ouvrent des bourses gratuites d’échange d’appartements et de villas, sans frais de mutations et de notaires, pour permettre aux contribuables actifs et leur famille de se rapprocher de leur lieu de travail.

  4. Posté par Aude le

    Ils sont formidables ces ecolo…mais vraiment formidables!!!!
    Respecter l’environnement…Moins de voitures…trier les déchets…économiser l’électricité, et j’en passe…
    Pourtant et oui..pourtant…ils ouvrent les portes à tout venant…Plus d’étrangers, Plus de libre-circulation, Plus de migrants….Plus de naturalisés…
    Conclusion: Plus d’habitants = Plus de pollution, Plus de déchets, Plus de voitures, Plus de logements, Plus de bétonnage, Plus d’électricité, Plus d’écoles, Plus de centres de soins, Plus de lits hospitaliers…
    Bref…ils sont complètement en opposition avec ce qu’ils préconisent…
    Bof..ils ne sont pas à une contradiction près…
    Vous avez bientôt fini de nous enfumez? On ne peut plus respirer!

  5. Posté par Hexgradior le

    Ou comment vider plus rapidement les poches des Suisses…

  6. Posté par UnOurs le

    Ah, les transports publics, ce plaisir, ce très cher plaisir se se sentir étranger dans son propre pays.

  7. Posté par Bussy le

    Et comme ces péages seront déductibles des impôts, ça ne reviendra finalement pas si cher que ça aux riches, par contre les pauvres et la classe moyenne (qui paie proportionnellement énormément d’impôts et dont la qualité de vie baisse à vue d’œil !) seront encore plus serrés dans les transports publics, déjà bondés par cette immigration massive soutenue également par les écolos !

  8. Posté par rikiki le

    Malheureusement entre les impôts, les taxes, les règlements, les vignettes, les péages et toutes les mises aux normes, la Suisse devient invivable. La faute à des personnes sensées nous représenter et qui n’ont en tête que leurs intérêts. Où se situera la limite avant que quelques uns ne pètent les plombs pour passer à l’acte comme la fameuse histoire de Zoug ?

  9. Posté par Christian Hofer le

    En complément:

    Les rails des CFF mis à rude épreuve

    Les déraillements récents montrent à quel point le matériel s’use en raison de trains toujours plus nombreux et fréquents.

    http://www.20min.ch/ro/news/suisse/story/Les-rails-des-CFF-mis-a-rude-epreuve-31187157

    Qu’est-ce qu’elle nous dit la petite dinde Leuthard à ce propos?

    Nous sommes devenus des esclaves pour ces gens qui prétendent nous représenter: wagons surchargés et puants, routes encombrées au nom de la sacro-sainte libre circulation défendue par le CF, taxes sur l’essence, culpabilisation, vignette toujours présente malgré les promesses, parkings surtaxés…

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