Ainsi parle la démocratie : notes à l’école et Burqa

Jacques-André Haury
Médecin, ancien député Vert'libéral, Grand Conseil, Vaud
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Le débat qui entoure l’interdiction de la Burqa (on devrait parler de « niqab », mais nous préférons le terme « burqa », parce qu’il est le plus généralement utilisé dans ce débat) nous rappelle – mutatis mutandis – celui que, il y a quelques années, suscita chez nous la question des notes à l’école. Rappelons-nous.

En 2001, nous lancions dans le Canton de Vaud une initiative populaire demandant le retour des notes dans l’école publique. Peu de temps après, une démarche analogue était entreprise à Genève. A cette époque, le Canton de Vaud venait d’adopter une réforme scolaire intitulée EVM (Ecole vaudoise en mutation). Il s’agissait, sous prétexte de « mettre l’élève au centre », d’imposer à l’école publique une idéologie pédagogique totalitaire : le socioconstructivisme. Dans cette idéologie, il convenait notamment d’évaluer la progression de l’élève par rapport à lui-même, en supprimant toute référence, qu’il s’agisse de référence à des connaissances importées de manuels scolaires ou de référence à la progression des autres élèves. La destruction des manuels scolaires antérieurs (aussi violente que dans la révolution chinoise maoïste !) et la suppression de la note constituaient des signes symboliques de cette révolution pédagogique.

Il était impossible de combattre cette idéologie en tant que telle. Vous imaginez mal une initiative populaire qui aurait demandé l’abandon du socioconstructivisme dans l’école publique ! Il fallait l’attaquer par l’un de ses symboles : la note, symbole accessible à chaque citoyen.

Sitôt cette initiative lancée, nous nous sommes trouvés confrontés à divers arguments. Le premier, c’était que « la note, ce n’est pas le problème ». C’était l’argument avancé par quelques beaux esprits, souvent très engagés dans la politique scolaire, qui considéraient que la pédagogie était un sujet bien trop sérieux pour être livré au débat public. Parmi eux, Mme Martine Brunschwig Graf, alors à la tête de l’Instruction publique genevoise. D’autres nous ont accusés d’être les ennemis de l’école publique : pour eux, ceux qui demandaient le retour aux notes avaient trouvé un moyen populiste de discréditer l’instruction publique et de lui nuire. D’autres nous ont reproché un conservatisme borné, incapables d’ouverture à des pratiques pédagogiques nouvelles.

Nous avons rencontré beaucoup d’enseignants qui partageaient notre point de vue et nous encourageaient ; mais presqu’aucun n’osait apparaître en public, tant les prêtres de l’idéologie socioconstructiviste étaient devenus puissants dans toute la hiérarchie de l’école vaudoise.

Le résultat est que les notes – avec ou sans votation populaire – ont été rétablies et que le socioconstructivisme, qui en avait fait l’un de ses combats symboliques, a reculé. Aujourd’hui, il demeure enseigné comme une approche pédagogique parmi d’autres. Une forme de « paix confessionnelle » s’est établie autour de l’école publique.

Pour faire barrage à une idéologie dominatrice, la démocratie ne peut s’attaquer qu’à ses symboles.

Les analogies avec l’interdiction de la burqa sont nombreuses et évidentes. La burqa constitue l’un des éléments les plus symboliques du salafisme que l’Arabie saoudite et le Qatar tentent d’imposer dans tout le monde musulman à coup de pétrodollars, de littérature et d’Imams importés. Il s’agit d’une secte de l’Islam, archaïque, violente, hostile à l’Occident judéo-chrétien et très opposée à l’égalité des femmes. En s’opposant à la burqa, une très grande majorité des Suisses veut très exactement démontrer qu’elle ne veut pas du salafisme dans notre société.

Et voilà que les beaux esprits reprennent le même type d’arguments qu’au moment du combat autour des notes. « La burqa, ce n’est pas le problème », déclarent quelques femmes socialistes et quelques pasteurs. « Derrière la burqa, c’est l’Islam qu’on attaque » affirment d’une même voix Madame Martine Brunschwig Graf (à la tête de la commission fédérale contre le racisme) et les porte-parole des communautés musulmanes (M. Pascal Gemperli, président de l’Union vaudoise des associations musulmanes), et d’autres. Et plusieurs considèrent que ces questions sont beaucoup trop complexes pour être livrées en pâture au débat public par des populistes en mal d’électeurs.

Dans l’ombre, de nombreux musulmans détestent cette image archaïque d’un Islam qui n’est pas le leur, mais il n’osent pas le dire, tant la pression exercée sur eux par les tenants du salafisme les effraie.

L’interdiction de la burqa n’est pas un débat contre l’Islam, pas plus que la réintroduction des notes n’a été un débat contre l’école. Il est l’expression d’une volonté populaire qui entend résister à l’influence salafiste sur la communauté musulmane de chez nous. La burqa est un symbole fort, comme l’a été la note. Affirmer que « la burqa n’est pas un problème chez nous » manifeste une inquiétante ignorance de l’Islam dans sa diversité. On rappellera à ce sujet que le Sénégal et d’autres Etats africains interdisent cette dissimulation des visages au motif qu’il exprime un Islam qui n’est pas le leur. Ceux qui refusent l’interdiction de la burqa entretiennent – volontairement ? – le fameux amalgame qu’ils prétendent dénoncer.

La démocratie est légitimée a empoigner les questions qui mettent en jeu l’avenir même de notre civilisation. Mais le langage de la démocratie se prête mal à des subtilités idéologiques. Il s’attaque à des symboles forts, qui sont précisément ceux que mettent en exergue les courants idéologiques contestés. Ainsi parle la démocratie. N’en déplaise aux politiciens qui, au fond d’eux mêmes, n’aiment pas la démocratie et répètent en boucle que « ce n’est pas le problème » !

Jacques-André Haury, 8.9.2016

 

9 commentaires

  1. Posté par Martin Leu le

    Merci à M. Haury d’avoir rappelé que l’avis de MBG sur la burka n’était pas le premier méfait commis par celle qui est devenue – pour notre malheur – la présidente de la fumeuse et malfaisante commission fédérale contre le racisme ! En ce qui concerne le commentaire de M. Tissot concernant Joëlle Kunz, sait-il que cette dernière, alors journaliste débutante, était l’égérie et la propagandiste des gauchistes genevois ? Aujourd’hui journaliste au Temps, elle est la preuve vivante que le gauchisme a infiltré toutes les rédactions romandes, par la volonté faiblesse d’éditeurs eux-mêmes contaminés par cette idéologie, laquelle contribue – ce n’est plus qu’une question de temps – à la disparition des journaux traditionnels.

  2. Posté par Dominique Schwander le

    Bravo cher camarade Jacques-André de t’attaquer avec clairvoyance à ces symbols et ces étendards de la colonisation islamique que sont burka, burkini…

  3. Posté par Maurice le

    Enfin quelqu’un qui ne fait pas d’amalgame !
    En effet, la note n’est pas l’école ni les méthodes d’enseignement, mais bien un repère sur les connaissances acquises par les élèves. Quant au niqab-burkha-burkini, il est bel et bien un symbole mahométan, car à moins d’indécence, aller se baigner en costume musulman sous les gerbes mortuaires des victimes de Nice après l’attentat au nom d’Allah, c’est déjà tout un programme et montre bien la façon qu’ont les mahométans de s’imposer.
    Et que Madame Brunschwig-Graf soit effectivement la défenderesse autant de la dégénérescence de l’école que du comportement conquérant des occupants a été brillamment relevé par Monsieur Jacques-André Haury.

  4. Posté par Stevan Miljevic le

    Pour rappel à propos du PER (rappel non exhaustif qui devrait être approfondi notamment au sujet des pseudos compétences transversales, un must en matière de n’importe quoi ou presque) http://lesobservateurs.ch/2014/03/22/plan-detude-romand-il-machine-fabriquer-incultes-analphabetes/

    Sinon, pour le reste, je vous invite à jeter un oeil sur les divers articles que j’ai mis ici ou sur mon blog (contrereforme.wordpress.com) dont la finalité, peut être un peu indigeste pour le commun des mortels, est de fournir des éléments scientifiques pour démonter toute cette mascarade

  5. Posté par Stevan Miljevic le

    Monsieur Haury, je loue votre engagement à combattre ces idéologies mortifères qui déglinguent les esprits. Pour l’école, je vous fais cependant remarquer que les approches prônées par le plan d’étude romand sont très influencées par le « socioconstructivisme » et toutes les gogoleries de ce genre. Le cancer est bien plus profond que vous ne semblez le comprendre et il est urgent d’arrêter ou tout du moins au minimum réorienter ce processus d’harmonisation qui nous mène droit dans le mur….

  6. Posté par Helvète le

    On ne parle que de burqa alors que l’initiative s’appelle : «Oui à l’interdiction de se dissimuler le visage». Elle demande concrètement ce qui suit:
    « Nul ne peut se dissimuler le visage dans l’espace public, ni dans les lieux accessibles au public ou dans lesquels sont fournies des prestations ordinairement accessibles par tout un chacun ; l’interdiction n’est pas applicable dans les lieux de culte. »
    Ceci signifie que l’interdiction est aussi applicable aux Black Blocks qui dénaturent les manifestations pacifiques, aux hooligans qui perturbent les matches de foot et aux personnes qui cachent leur visage, dans le but de commettre un délit. C’est un élément non-négligeable que l’on réduit à un simple problème vestimentaire religieux et c’est bien dommage. Dans ce domaine, la presse, en ne parlant que d’initiative anti-burqa déforme le fondement même de l’initiative. Encore une fois, on se trouve face à de la désinformation journalistique.

  7. Posté par Alain le

    Merci M. Haury.
    Il faudrait amener également un vrai débat sur l’islam et la burqa dans les églises officielles qui n’ont rien compris sur cette religion.

  8. Posté par S. Dumont le

    Tout à fait! Ne pas interdire, c’est consentir! En autorisant le port de la burqa, comme c’est le cas actuellement, c’est être dans la continuité d’une totale soumission face à leurs longues listes de revendications. En même temps, je me dis que si l’UDC n’avait pas lancé cette initiative, les fervents défenseurs des exceptions musulmanes n’auraient même pas ouverts le débat!

  9. Posté par Pierre-Alain Tissot le

    Félicitations, M. Haury, pour votre article sur le symbole des notes pour contrer le socioconstructivisme à l’école et maintenant, celui de la burka, dernière avancée de l’islamisme salafiste.
    Parmi ces beaux esprits défendant la burka, Mme Joëlle Kunz, chroniqueuse dans Le Temps du 31 août dernier : rubrique « débat » ( ? ) intitulée « Le burkini en liberté ».
    Manquant gravement de clairvoyance, Mme Kunz y fait assaut d’arguments pour justifier la dhimmitude de la bien-pensance aux commandes.
    Heureusement, les citoyens éveillés ainsi que bon sens populaire refusent ce burkini, nouveau marqueur de la conquête islamique de notre Europe judéo-chrétienne.

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