Ne pas confondre Jihâd et Croisades

Michel Garroté
Politologue, blogueur

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Michel Garroté -  Deux "légendes noires" sont encore très répandues dans "l'opinion publique". La première raconte que l'islam serait une "religion de paix". La deuxième prétend mettre sur le même plan le Jihâd et les Croisades.
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A cet égard, dans Les 4 Vérités, Raymond Croella rappelle judicieusement que  l’islam est un système politique totalitaire (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : il régit tous les aspects de la vie privée et de la vie publique, en détail et sans dérogation possible. L’islam est une religion dominatrice : les Chrétiens et les Juifs ne sont tolérés que comme dhimmis, se reconnaissant inférieurs aux musulmans et leur payant tribut. L’islam est une religion con­quérante : son ambition est d’instaurer un califat mondial. Pour un musulman, le monde se divise en : terres d’islam où la loi coranique doit s’appliquer ; terres de conquête, appelées à devenir terres d’islam par le djihad. Cer­taines de nos cités sont déjà terres d’islam.
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Raymond Croella ajoute : la France et l’Europe sont terres de conquête. L’islam est réfractaire à toute évolution. La Bible a été inspirée par Dieu et transcrite par des hommes qui ont pu être faillibles. D’où les nombreuses exégèses, chrétiennes ou juives. Au contraire, le Coran a été dicté par Allah à Mahomet. Son texte est intangible et éternel, à tel point que seule la version en langue arabe fait foi. L’islam est incompatible avec la démocratie : pour les musulmans, les lois d’Allah sont supérieures à toutes les lois édictées par les hommes, conclut Raymond Croella dans Les 4 Vérités (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Dans L'Homme Nouveau, Joël Hautebert, de son côté, écrit notamment, a propos du Jihâd et des Croisades (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : En ces temps d’attentats terroristes un curieux amalgame continue de circuler entre le jihâd islamiste et ladite « guerre sainte » des chrétiens. Cependant les Évangiles n’appellent pas à la guerre sainte à l’opposé du Coran où abondent des sourates ordonnant l’expansion de l’Islam par le meurtre des infidèles et la conquête des territoires non-musulmans.
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Joël Hautebert : Malgré la répétition des attentats islamistes, il devient lassant d’entendre dire que l’islam n’est en rien responsable et qu’en matière de « violence religieuse » (c’est bien flou), l’Église catholique aurait prouvé dans son histoire qu’elle est aussi capable du pire. Le jihâd musulman équivaudrait à la guerre sainte des chrétiens. Cependant, une analyse rationnelle doit comparer ce qui est comparable, en l’occurrence prioritairement ce que disent les textes considérés comme révélés – d’un côté le Coran, de l’autre le Nouveau Testament – ainsi que la position de la doctrine théologique et juridique. Ensuite il convient d’examiner la portée des actes guerriers. Dans quelle mesure sont-ils des moyens de salut, conséquence logique du supposé caractère « saint » du combat mené ?
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Joël Hautebert : De nombreuses sourates du Coran incitent clairement à la lutte armée et au meurtre à l’égard des infidèles, souvent qualifiés d’« associateurs » (c’est-à-dire polythéistes, ce que sont les chrétiens aux yeux des musulmans). « Après que les mois sacrés se seront écoulés, tuez les polythéistes, partout où vous les trouverez ; capturez-les, assiégez-les, dressez-leur des embuscades. Mais s’ils se repentent, s’ils s’acquittent de la prière (la Salat), s’ils font l’aumône (la Zakat), laissez-les libres – Allah est celui qui pardonne, il est miséricordieux » (9, 5) [1]. Par ailleurs, le Coran invite prioritairement les musulmans à conquérir les territoires non-musulmans (Dar al-Harb) et non à convertir les personnes. « Et combattez-les jusqu’à ce qu’il ne subsiste plus d’association et que la religion soit entièrement à Allah » (8, 39). L’islam ne connaît ni la distinction entre le temporel et le spirituel ni la différenciation entre le droit naturel et la Révélation. La guerre est le principal vecteur d’expansion de l’Islam et le Coran comprend quarante et une occurrences du mot jihâd (l’« effort dans la voie d’Allah »), qui revêt le double sens du combat contre le mal intérieur (comme pour les chrétiens) et la lutte pour l’expansion de l’Islam.
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Joël Hautebert : Les Évangiles ne comportent aucun texte de cette nature. Il n’y a rien de tel non plus dans la doctrine catholique, auquel on prête bien facilement l’usage de la locution « guerre sainte », pourtant totalement absente dans la doctrine canonique et théologique à l’époque des croisades, comme l’a bien montré l’historien médiéviste Jacques Paviot. L’expression n’existait pas parce que le concept n’existait pas. L’engagement dans la croisade fit l’objet de débats entre les intellectuels de l’époque (2) et la justification de l’entreprise s’appuya sur un cadre théorique préexistant et non créé pour l’occasion, la théorie romaine (cicéronienne) de la guerre juste, reprise et christianisée par saint Ambroise et saint Augustin dans l’Antiquité tardive.
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Joël Hautebert : Il en découle tout d’abord que cette entreprise fut conçue comme une guerre de défense de la chrétienté contre la pression politique de l’Islam (3) et qu’en conséquence, il s’agissait d’un choix militaire jugé rationnellement opportun, conforme au droit naturel, et non d’une obligation religieuse tirée de la Révélation. Ce mobile constituait la cause juste, à laquelle devaient s’ajouter deux autres conditions, l’autorité du prince (en l’occurrence l’originalité résulte de l’initiative papale) et l’intention droite, cette dernière excluant par exemple la cruauté, la sauvagerie, le désir de domination et la tromperie, ce qui veut dire que tous les moyens n’étaient pas permis (4).
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Joël Hautebert : S’il s’était agi réellement d’une « guerre sainte », elle aurait été une cause de sainteté. Or, si des saints ont prêché la croisade (saint Bernard) ou y ont participé (saint Louis), l’Église ne les a pas canonisés pour cette seule raison. La mort au combat en Terre sainte n’attribuait pas au guerrier la couronne du martyre. Même en criant « Dieu le veult », aucun soldat chrétien ne pouvait nourrir l’espoir d’entrer directement au Paradis sans accusation de ses fautes, en se jetant sauvagement sur les musulmans pour en trucider quelques-uns avant de succomber sous le nombre. Nous suivons Jacques Paviot lorsqu’il analyse la croisade comme une guerre juste, papale et méritoire (5). La réalité diffère radicalement dans l’islam, puisqu’une sourate du Coran dit : « Que ceux qui troquent la vie présente contre la vie future combattent donc dans le sentier d’Allah. Nous accorderons une récompense sans limite à celui qui combat dans le chemin de Dieu, qu’il soit tué ou qu’il soit victorieux » (4, 74).
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Joël Hautebert : Ainsi, les violences injustes commises par des catholiques résultent du péché des hommes malgré la doctrine de l’Église tandis que des sourates du Coran justifient les actes terroristes, ce qui ne veut pas dire pour autant que tous les musulmans jugent bon d’agir de cette manière, bien évidemment. Curieusement, c’est à partir du XVIe siècle qu’en Europe le recours à l’expression « guerre sainte » s’est développé dans le contexte des conflits entre catholiques et protestants, pour différencier ces derniers des croisades. Mais la popularisation de la locution date surtout des siècles suivants, y compris par les hommes des Lumières. Par la suite, son usage s’est répandu dans un contexte de déchristianisation, dans les milieux catholiques comme dans les milieux athées, ces derniers qualifiant parfois la lutte pour les principes révolutionnaires ou républicains de guerre sainte. Victor Basch, le très à gauche vice-président de la Ligue des droits de l’homme, écrivait au début de la guerre de 14 que « cette guerre est la lutte des peuples libres désireux de se libérer contre le militarisme, contre l’impérialisme. C’est ainsi que cette guerre atroce peut devenir une guerre sainte ». En la matière, les catholiques n’ont de leçon à recevoir de personne, conclut Joël Hautebert dans L'Homme Nouveau (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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1. Traduction Denise Masson, La Pléiade, 1967.
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2. Voir l’ouvrage de Martin Aurell, Des chrétiens contre les croisades (XIIe-XIIIe siècles), Fayard, 416 p., 24 €.
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3. À quoi s’ajoute la libération des Lieux saints.
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4. Voir saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, II-IIae, Q. 40, articles 1 et 3.
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5. L’Église accordait des indulgences dans certaines conditions aux croisés qui étaient aussi des pèlerins.
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Introduction, adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://www.les4verites.com/islam/islam-sortir-de-la-langue-de-bois
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http://www.hommenouveau.fr/1743/editorial/jihad-croisades---meme-combat--.htm
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