Le test PISA devient un dangereux instrument de promotion de l’illettrisme et de propagande mondialiste

Stevan Miljevic
Enseignant

J’ai toujours apprécié le test PISA. L’idée de comparer les différents systèmes scolaires m’a toujours semblé un excellent moyen de se situer et de se remettre en question. Certes, il n’est pas parfait, les enseignements qui sont les siens sont somme toute restreints en comparaison de ceux des mega-analyses sérieuses existantes dans le monde éducatif (mais qu’on ne prend malheureusement pas en compte…) mais, dans l’ensemble, l’outil est intéressant. Ou plutôt devrai-je dire était, tant l’imparfait d’un passé définitivement révolu semble se profiler au regard des dernières orientations prises par le test éducatif de l’OCDE.

En 2012 déjà, outre les traditionnels tests portant sur les maths, la langue maternelle et les sciences, PISA commençait à fournir des impulsions farfelues avec un nouveau module portant sur la résolution de problèmes. Pour bien comprendre ce que les grands pontes de l’OCDE entendent par résolution de problème, voici un exemple de question qu’on trouvait alors :

Il s’agissait donc pour l’élève de tâtonner jusqu’à trouver un trajet de 15 minutes. Toute connaissance a complètement disparu de la chose (sauf évidemment la lecture de l’énoncé). Même les plus élémentaires calculs étaient évacués puisque le programme se chargeait d’additionner les durées des différents tronçons. Autant dire qu’une telle question n’analyse en fait que la capacité qu’a un élève à tâtonner et éventuellement à persévérer un peu devant l’échec. Si on peut estimer que l’école peut, accessoirement, se livrer occasionnellement à ce genre de performances, il ne faudrait pas oublier que son rôle est totalement à l’opposé : elle transmet des connaissances, ce qui est justement la meilleure manière de résoudre des problèmes sans avoir à recourir au tâtonnement et donc au hasard.

En poussant un peu la réflexion, il faut bien admettre que l’apprentissage de la résolution de problème par des heuristiques hasardeuses est le propre des sauvages, des personnes vivant à l’état de nature hors civilisation. Et encore est-ce là tout relatif, puisque toutes les sociétés, même les plus primitives essaient d’organiser un minimum de transmission des savoirs…Ce que Schleicher et consort estiment donc comme important est…la capacité que peut avoir un illettré à se mouvoir dans un environnement technologique ! Autant dire l’inverse de tout ce que le progrès peut apporter !

Mais ce n’est pas tout. Encouragé par ce ballon d’essai, l’aréopage OCDE a franchi un pas supplémentaire puisque le PISA 2015 fut l’occasion de tester la collaboration entre élèves pour résoudre des problèmes ! Il ne leur suffit donc plus de tester le vide, il faut le faire en collaboration avec d’autres ! Et de mettre sur pied des situations en ligne bidon simulant l’interaction avec d’autres élèves par le biais d’un tchat à choix multiples. Penser à la nécessité de former un élève à communiquer via la technologie à l’ère de whatsapp et des réseaux sociaux, il fallait le faire ! De plus, à voir les propositions possibles, je pense honnêtement que si j’avais été élève j’aurai cliqué à quelques reprises sur des réponses farfelues rien que pour le plaisir ! Voici quelques étapes d'une situation problème à résoudre collectivement pour vous faire une idée.

Les grands penseurs de l’OCDE ne semblent pas être au fait que la résolution de problème par le biais d’heuristiques hasardeuses comme la collaboration sont des éléments que l’évolution humaine semble avoir préprogrammés en nous. Ce qui a pour conséquence que ce sont des objectifs que nous atteignons extrêmement rapidement et sans faire de grands efforts. Autant dire des éléments dont on peut laisser l'apprentissage à la vie de tous les jours. L’école devrait plutôt avoir pour ambition d’atteindre le lointain, le difficile, ce que la vie ne nous apprendra pas d'elle-même.

Le big boss du PISA justifie ces choix par la nécessité au 21ème siècle de travailler de nouvelles compétences, de cesser de transmettre des connaissances. Pour lui, l’école doit dorénavant « donner une boussole à chacun, pour le rendre capable de construire son propre savoir, apte à distinguer le vrai du faux quand il navigue sur Google » démontrant par là une totale incompétence en matière de fonctionnement du cerveau. En effet, pour pouvoir raisonner ou distinguer ce qui est vrai du faux, il est impératif d’avoir des connaissances. On ne raisonne pas à partir de rien.

Mais la cerise sur le gâteau réside vraisemblablement dans le mépris de la démocratie qu’exprime le grand patron du PISA. Lorsqu’on est démocrate et à la tête d’un institut de recherche international sur l’éducation, on s’abstient de politiser son discours. Surtout ce qui touche aux contenus éducatifs. L’école n’est pas là pour former des militants, mais pour donner des éléments permettant à tout un chacun de se faire son opinion de la manière la plus neutre possible. Or, ça, Schleicher et consort semblent s'en moquer comme de leur dernière chaussette puisqu’ils préconisent d’une part de former les gens à « accepter de perdre leur boulot » en leur donnant « confiance en leur capacité d’en trouver un ou d’en créer un autre », ce qui fait, vous l’imaginez bien, le grand bonheur de tous ceux qui se battent pour la protection des travailleurs. D’autre part, ils annoncent la couleur pour le PISA 2018 qui testera… suspense, roulements de tambour… le niveau d’«acceptation entre les peuples, les cultures » autrement dit la dose de cosmopolitisme ingurgitée par les élèves. Je vois d’ici se réjouir les islamo-sceptiques ou simplement ceux qui pensent que l’assimilation est une meilleure option que le multiculturalisme.

En bref, ce qui était à la base une bonne idée est en train de dégénérer en un fatras d’inepties pédagogiquement et idéologiquement orientées. En conséquence, il ne me reste qu’à demander à monsieur Schleicher de montrer l’exemple en acceptant de céder son travail à une autre personne plus compétente et démocrate avec toute la confiance en sa propre capacité à en retrouver un qu’il souhaite que notre jeunesse développe…

Stevan Miljevic, le 1er juillet 2016 pour les Observateurs.ch et contrereforme.wordpress.com

4 commentaires

  1. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    La présentation du problème de circulation sur un support informatique en dit long sur la sottise des concepteurs. Et sur l’idée qu’ils se font de ce qu’il faut bien nommer leurs victimes! Le problème en lui-même est déjà débile. Résolu en moins de 30 secondes.

  2. Posté par aldo le

    La méthode PISA comme toute entreprise est soumise aux pressions financières. Sur le papier c’était un joli instrument possible, mais dès qu’on prend les enseignants leurs matières et leur personnalités très diverses, on se rend compte qu’elle n’est qu’une fumisterie inapplicable. C’est là le pourquoi des choix opérés dans son développement, puis dans sa dérive mondialiste qui permet encore de drainer des fonds. Le but final étant de formater les enseignants et les élèves pour qu’enfin la méthode PISA puisse être applicable et qu’elle continue à faire vivre ses serviteurs à bout course.

    Il s’agit là d’un phénomène qui touche tout ce qui a la prétention sur des bases statistiques très aléatoires, de normaliser, d’analyser, de quantifier puis de qualifier par un cotation qui relève finalement d’un arbitraire totalitaire. La paresse intellectuelle prenant alors le dessus, cette méthode est élevée comme une perfection est déifiée afin de la rendre intouchable. En matières financières, on a les mêmes réflexes, comme pour la cotation de la dette souveraine. Ces A AA AA+ etc ne sont que des barrières artificielles et arbitraires visant à remplacer toute analyse personnelle. Elle sont là pour rassurer le spéculateur qui délègue son libre arbitre à des fantaisistes et des manipulateurs.

    Dans toutes ces démarches pseudo analytiques, mais finalement purement commerciales, il y a un sérieux danger qui consiste bannir toute créativité, à cultiver l’idée que tout est inventé, que le progrès est à son apogée et qu’il n’y a qu’à se reposer sur les conquêtes du passé. Et les simplets adorent ce type de raisonnement. Il y a environ 200 ans avant J.C. un certain Archimède avait fait faire des bonds prodigieux aux connaissances de l’humanité. Il était seul face à des problèmes qu’il n’aurait pas pu résoudre en étant entourés d’une cour de bavards prompts à débiter n’importe quelle ânerie pour se mettre en valeur. Ce sont pourtant là, les tendances suicidaires de l’enseignement, succombant aux tendances très collectivistes dans un négationniste forcené de l’individualisme. Dès lors ne nous demandons pas pourquoi les chemins de l’égalité mènent à la médiocrité pour tous ? Dès la petite enfance ces tendances s’imposent. On propose aux rayons jouets des commerces que des mises en scène propres à encourager des réflexes de consommateurs passifs. Les potentiels révélateurs d’interrogation et de raisonnement y sont malheureusement presque totalement absents. On peut voir le moteurs de toutes ces dérives en comparant le Lego et le Mécano. N’est-il pas absurde d’imposer des cubes de plastiques pour créer une objet qui peut être fait directement avec les composants qu’on utilise dans la réalité?

    Pour résumer l’inanité de la méthode PISA, de son grand patron et de orientations telles ces polygamies multiculturelles visant à uniformiser l’ensemble de la planète, il faut se référer à cette citation attribuée à Churchill mais qu’Archimède aurait pu faire sienne: « Le chameau est un cheval dessiné par un comité ». Aujourd’hui on pourrait préciser: « Ce machin dont on ne reconnaît ni l’espèce ni l’origine est un cheval dessiné par un comité multiculturel. »

  3. Posté par Loulou le

    Cela me rappelle le programme common core qui va gentiment s’imposer partout pour former de bons abrutis dociles.

  4. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Délirant! Problème de circulation résolu en trente secondes! Ces gens sombrent dans l’imbécilité. La remarque mentionnant les éléments préprogrammés en nous est particulièrement pertinente. Elle met, je crois, le doigt sur la clé du problème. Retour au jardin! D’Eden, pas d’enfants. Dieu dit: « faisons l’homme à nôtre image, à notre ressemblance »! Le serpent dit:  » mangez, vous serez comme Dieu »! Donc il vont en quelque sorte ramer pour être ce qu’ils sont déjà! Notez qu’il fallait en quelque sorte ramer, puisqu Dieu le fit seulement à son image. Mais ramer en partant de l’image vaut mieux que se fourvoyer en partant de rien du tout.

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