France: le bras de fer fatal

Stéphane Montabert
Suisse naturalisé, Conseiller communal UDC, Renens

Difficile semaine pour nos voisins français. Aux jours de manifestations et d'émeutes saccageant les centres-villes succédèrent les blocages stratégiques de l'approvisionnement et les queues à la pompe. Tout cela parce qu'il ne serait pas assez "républicain", n'est-ce-pas, de simplement demander un référendum au bas peuple...

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Au cœur du débat, la Loi El Khomri, une tentative tardive, maladroite et rapidement dévoyée de réformer le droit du travail français et sa complexité kafkaïenne. L'épopée de ce texte de loi aura eu le mérite de briser les dernières illusions quant à la viabilité du socialisme de gouvernement.

François Hollande décida de mener une ultime réforme pour finir son quinquennat raté sur une note positive. Il souhaitait passer pour un réformateur responsable non seulement auprès de ses supérieurs de l'Union Européenne, mais aussi aux yeux des électeurs centristes, gages de son accession au second tour des présidentielles de 2017. Dans son style inimitable, il se prit magistralement les pieds dans le tapis, réussissant le tour de force de force de se mettre un pays entier à dos à un an du vote pour sa réélection.

Les Français purent à l'occasion découvrir le dirigisme éhonté de leur exécutif: droit dans ses bottes de la Ve République, il lança un projet de loi que l'Assemblée nationale n'avait plus qu'à valider, musela sa propre majorité avec le fameux article 49-3 de la Constitution et tenta d'interdire les manifestations. Les frondeurs socialistes firent autant de bruit que possible mais, pas fous, échouèrent comme par hasard à deux voix près à lancer une motion de censure pour renverser le gouvernement.

Le texte poursuit donc son petit bonhomme de chemin. Les règles sont parfaitement respectées dans la forme, mais sur le fond, on est aussi éloigné que possible d'un processus démocratique sain: absence de concertation préalable des acteurs dans l'avant-projet, court-circuit des instances législatives établies, coups de menton et menaces alors que le pays vire à l'émeute puis au blocage complet - le tout alors que la France est sous état d'urgence depuis les attentats terroristes de fin 2015, ce qui en dit long sur l'état de délitement de l'autorité.

L'opposition syndicale s'arc-boute ; elle estime qu'il en va de son avenir. Malgré les divers affaiblissements du texte, l'article 2 subsiste, ouvrant le champ à des accords d'entreprise prioritaires vis-à-vis des accords de branche âprement négociés par les centrales. Même si la CFDT, FO et la CGT divergent sur la portée de cet article, il reste largement dans la gorge des organisations syndicales. La CGT est d'autant plus en fer de lance sur la Loi El Khomri qu'elle joue gros, craignant de perdre sa place de premier syndicat français lors des élections syndicales de 2017.

france,syndicats,françois hollande,droit du travail,réformeLes deux camps rivalisent de jusqu'au-boutisme. François Hollande et Manuel Valls, emportés par le Verbe, annoncent désormais que "tout retour en arrière est impossible". Ils ont pour eux la gendarmerie, les CRS, les médias, ce qu'il reste des leviers du pouvoir... Mais aussi des couacs en interne et la peur de la rue. L'union sacrée se lézarde. En face, la CGT, entraînée depuis ses origines communistes à saboter le pays pour le faire tomber comme un fruit mûr entre les mains de l'Armée Rouge, paralyse les centres névralgiques de la France comme elle sait si bien le faire: dépôts pétroliers, énergie, transports, tout y passe, au risque de perdre le soutien des Français opposés à la Loi travail. Quelle ironie de voir la CGT réduite à agiter le spectre du Grand Soir contre une réforme portée par un gouvernement socialiste!

En temps normal, le gouvernement aurait parié sur un vote rapide du texte et un pourrissement des mouvements d'opposition avec le retour des beaux jours et les vacances d'été - le seul calendrier permettant à François Hollande de se ménager un bref répit avant son unique objectif, la campagne des présidentielles de 2017. Malheureusement, le timing s'avère désastreux. Non seulement l'opposition est plus déterminée que prévu, mais l'Euro 2016 débute en juin et mettra encore davantage la France sous le feu des projecteurs internationaux. De quoi marquer durablement l'image du pays à l'étranger.

Le cauchemar risque d'être total: un Euro 2016 gâché par des grèves et des manifestations, des actions de guérilla de la CGT pour paralyser les transports en commun, les retransmissions ou l'approvisionnement en électricité des rencontres sportives... Le tout dans une France en plein état d'urgence et sous plan Vigipirate alors que la menace terroriste plane.

L'image de la France souffre et promet de souffrir encore. La gauche n'a pas l'habitude de négocier ; elle préfère manier l'anathème et la violence. Les approches binaires du ça passe ou ça casse ont malheureusement leurs limites. Lorsque le dialogue laisse sa place à la confrontation, lorsque chaque camp passe en revue ses troupes plutôt que ses arguments, lorsque tout se ramène à un simple bras de fer, à la fin de la journée, il reste un perdant sur le carreau.

François Hollande et Manuel Valls jouent leur destin politique ; la CGT joue sa survie. Avec ces enchères stratosphériques, la sanction devient insurmontable. Il n'est plus possible de reculer. On peut donc s'attendre à ce que les troubles débordent sur l'Euro, et à ce que l'arrivée des mois d'été ne suffise pas à éteindre l'incendie.

La lutte contre la Loi El Khomri sera un combat de longue haleine qui pourrait perdurer, comme une douleur lancinante qu'aucun remède ne parvient à calmer, jusqu'aux élections présidentielles de 2017, emportant pour de bon les dernières chances de M. Hollande d'accéder au second tour.

Stéphane Montabert - Sur le Web et sur Lesobservateurs.ch, le 28 mai 2016

12 commentaires

  1. Posté par Myrisa Jones le

    @ Jean-François Dupond
     » Il y a peut-être, derrière ces évènements français, aussi les conséquences de l’application de certaines doctrines en provenance de l’UE et une menace sur la souveraineté nationale des pays membres ».
    Comme l’immigration arabo-musulmane par exemple…

    Video très parlante de casseurs à Barbès: 26 mn

    Paris, ville lumière ?
    Publié le 31 mai 2016

    A mon avis, Paris, n’est ni ville de l’Euro et ne sera pas olympique devant de telles images. Hidalgo et sa clique immigrationniste sont au-dessous de tout et l’on se demande bien ce que fait l’opposition sur les bancs de l’Hôtel de Ville ? Ils dorment et se font payer pour dormir. C’est tout-à-fait scandaleux.

    Je vous présente le haut lieu parisien islamisé qui s’entraine à la guérilla urbaine. Le quartir de Barbès ! A n’en pas douter, quelques idiots utiles antifascistes sont de la partie.

    C’est la chienlit et nous avons un non gouvernement, dont le peuple hébété, endormi ne fait pas dégager ! Dans quel pays vit-on ? Simplement un non pays. Devant ces scènes d’émeutes éthniques, soit on fait le « white flying », soit on se bat. Pour l’instant, personne ne se bat, tout le monde reste couché. La houellebecquisation est à l’oeuvre !

    Hildegard von Hessen am Rhein

    http://hildegardvonhessenamrhein.over-blog.com/2016/05/paris-ville-de-l-euro-paris-ville-olympique-paris-ville-lumiere.html

  2. Posté par claire le

    @ Aline , Oui vous avez raison , les français détestent les patrons et les français sont très jaloux aussi . Je suis française mais je vis aux US et j’ai compris la différence quand je suis arrivée ici où tout le monde est vénéré en faite . Ce qu’il y a aussi en France , c’est que vous êtes foutu d’avance puisque le système n’encourage pas a réussir . Les taxes sont beaucoup trop lourdes et les gens vous décourageront immédiatement si vous voulez tenter quoi que ce soit . Très dur la mentalité française ,impossible de faire quoique ce soit là-bas ! Maintenant c’est bien pire . Mais le gouvernement empoisonne , en plus , le peuple afin qu’il ne réagisse plus et reste amorphe comme on peu le constater . Ils sont des zombies ces Français , pour la plupart . J’ai appris que des gouvernements , en plus d’autres poisons , mettent du Lithium dans l’eau . C’est foutu en France ET la CGT n’y est pour rien .

  3. Posté par Mat le

    Allez… Une prophétie…. Oui tristement il va y avoir des centaines mort durant l euro…. Juste l introduction…. Mais tout le monde le sait……..Mais on peut rien faire on vous dit…. Certainement pas assez d impôt :)….. Pour ne pas pleurer….

  4. Posté par Jean-François Dupont le

    M. Montabert a raison de relever que, même si la démocratie directe n’est pas parfaite, elle nous permet en Suisse de voter au lieu de jouer les grèves et la violence dans la rue.
    Ce qui n’empêche pas que la Suisse connaisse aussi des situations de blocage dans des domaines essentiels, p. ex. l’agriculture, l’énergie et la LAT. Mais sans violence, ou disons sans violence physique, parce que pour la violence verbale, on n’entend pas que des enfants de cœur.
    Enfin, ce n’est peut-être pas qu’une affaire française. Il y a peut-être, derrière ces évènements français, aussi les conséquences de l’application de certaines doctrines en provenance de l’UE et une menace sur la souveraineté nationale des pays membres. La France serait la continuation des évènements liés à la dette grecque. Lire l’analyse de J. Sapir: http://russeurope.hypotheses.org/4988

  5. Posté par Vautrin le

    @ Heraklius : vous écrivez : « NB : Les manoeuvres stabilo due etaient offensante et les invoqués a posteriori l’est aussi ! »
    Pas du tout, et c’est un Français nationaliste qui vous le dit. Il n’est absolument pas absurde, étant donné l’état de déliquescence des institutions françaises, que l’explosion intervienne et que se fabriquent en France plusieurs « états » subversifs (menés par des minorités religieuses, et je ne nomme personne !) prêts à se jeter sur des terres plus prospères comme la Suisse.Il est parfaitement normal que l’État-Major des forces armées Suisses ait envisagé cette hypothèse. Preuve que cet État-Major ne fait pas la guerre d’hier, mais celle qui peut intervenir demain !

  6. Posté par Heraklius le

    D’habitude les français relativisent les vues pessimistes de l’extérieur sur « l’homme malade de l’Europe » mais aujourd’hui ce n’est plus le cas. Le papier de M. Montabert n’est pas faux, mais il est très marqués d’un esprit partisan envers le gouvernement français !
    Car en la matière il faut se souvenir que la France ne fait qu’appliquer, avec une complexité toute administrative, les « recommandations » de Bruxelles.
    En d’autre terme si cette réforme, malgré ses défauts, n’est en soit pas mauvaise elle intervient au plus mauvais moment. Alors même que le gouvernement à déjà fait preuve d’une clémence hors du commun envers les violences des extrémistes de gauche ! Alors même que cette réforme à été en partie dictée par la CFDT, contre la CGT à l’horizon des futures échéances syndicales.
    Bref, aucuns des deux acteurs qui se retrouvent face à face ne peux plus reculer à moins de vouloir se saborder.
    Mais en la matière, force doit rester à la loi, même si on est pas toujours d’accord avec elle !
    NB : Les manoeuvres stabilo due etaient offensante et les invoqués a posteriori l’est aussi !

  7. Posté par Gabriel le

    Pendant les élections grecques, l’attention était focalisée sur Tsipras, pendant que la marine grecque laissait les portes grandes ouvertes à l’immigration clandestine. Aujourd’hui, en France, même méthode.

  8. Posté par Vautrin le

    Oui… Ce qui m’inquiète : l’apathie du peuple. Il est de bon ton de prétendre que les syndicats marxistes « prennent en otage » la population. C’est vrai : j’ai constaté les troubles dans la production et les échanges occasionnés par l’attitude nocive des syndicats. J’ai harangué les pénuristes se précipitant à la pompe à essence avec des bidons (là, ils l’ont mal pris, j’ai dû battre en retraite 🙂 ). De plus, les villes subissent l’assaut des casseurs et des pillards. En son temps le Général appelait cela « la chienlit ». On peut garder le nom, ou appeler cet état « le chaos » ou « le boxon » suivant l’humeur du moment.
    C’est vrai… Mais en y regardant de près, on voit bien que la réaction populaire à ce chaos est tristement minoritaire, voire absente ! Il y a deux décennies, des manifestations sommaient les trublions de se mettre au travail. Là, rien. Pire : les médias de propagande sélectionnent dans les radio-trottoirs les gentils bisounours avouant « comprendre » les grévistes et autres fauteurs de troubles. Jadis, on rencontrait de la virilité, et grévistes et « jaunes » s’empoignaient sans hésiter.
    Le peuple est avachi, il ne résiste pas plus aux marxistes qu’il ne résiste aux nazislamistes. Quant au gouvernement, il est réduit « au triste choix ou de trahir (sa) flamme /ou de vivre en infâme » : la double contrainte, quoi, entre la nécessité entrevue de faire un petit geste pour l’économie et l’étiquette de gauche à laquelle il tient.
    Voilà qui augure très mal de l’avenir !

  9. Posté par coocool le

    Puissions-nous en Suisse tirer les leçons de la descente aux enfers de ce beau pays qu’était la France et éviter de faire les mêmes erreurs…

  10. Posté par aline le

    Le problème fondamentale des français c’est qu’ils détestent profondément les patrons. En France un patron c’est quelqu’un qui exploite l’employé tandis que dans d’autres pays le patron c’est quelqu’un qui donne du travail et l’employé est d’accord de faire un effort. J’ai vu une affiche dans un cortège avec le texte: « je travaille, tu travailles, il travaille, nous travaillons, vous travaillez, ils profitent ». Tout est dit sur la mentalité de la pluspart des Français. S’ils continuent ainsi, ils n’auront plus besoin d’une loi de travail, parce que il n’y aura tout simplement plus de travail. Je rentre du sud de la France où il n’y avait plus une goutte d’essence de Marseille à Avignon. Des propriétaires de chambre d’hôtes et des patrons de restaurants ont déjà subi des annulations.

  11. Posté par Peyhem Veys le

    Un gouvernement de pompiers pyromanes à qui, pourrait-on croire, a été donné la mission de détruire le pays ou du moins de l’amener à une guerre civile. La France et ses joyaux pourrait bien, après un quinquennat de ce crétin de Hollande, prendre le même chemin que la Grèce et vendre ses plus beaux atours. Il y a tout un nid de rapaces qui rêvent d’acquérir pour une bouchée de pain, les témoins de l’histoire. Ils se sont fait les dents en Grèce. Au tour des autres maintenant…

  12. Posté par Anne Lauwaert le

    c’est pas pour rien que l’armée suisse a tenu les manoeuvres Stabilo Due en 2012 avec l’hypothèse de troubles graves dans les pays voisins…

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