« On attend un petit peu plus l’Eglise sur les questions de valeurs »

L’Eglise catholique met un point d’honneur à ne manquer aucun rendez-vous de la gauche mais omet à chaque fois de rejoindre sa base sur les valeurs morales. Dans les bancs éparses de l’assemblée des fidèles, la grogne monte.

Coutumière d'une lecture peu discernée des écritures, la Conférence des Evêques suisses (CES) ne manque aucune occasion de satisfaire aux mânes de la bien-pensance et se jette allègrement dans le panneau d'une vision manichéenne - pour ou contre l'asile - de la prochaine votation sur la révision de la loi fédérale.

Ainsi, sans fournir d'arguments précis, l'Eglise catholique officielle se retrouve à soutenir des propositions comme le maintien du refus d'exécuter son service militaire au titre de motif d'asile ou l'interdiction d'encadrer les requérants récalcitrants. L'Eglise semble se moquer comme d'un guigne des régimes de terreur imposés par d'ex-taulards du printemps arabe à des familles de réfugiés sans défense.

Fatiguée de se voir constamment poignardée dans le dos, la relique d'engagement catholique en politique qu'est le PDC se met à gronder et s'apprête à mordre. Chronique d'une scène de ménage:

Christophe Darbellay, président du PDC, entame les festivités au 19:30 de la RTS:

"Les Eglises font une autre lecture de cette loi. Je crois que ce qui serait le plus inhumain, c'est de ne plus pourvoir venir en aide aux personnes qui ont vraiment besoin de nous, c'est d'attendre 5 ans pour donner une réponse à un personne en lui disant: "Tu dois partir", et puis c'est de ne rien faire contre les problèmes de criminalité qui sont lancinants dans le domaine de l'asile.

J'aimerais aussi que l'Eglise prenne position un peu plus souvent quand il s'agit d'un débat éthique. Par exemple, l'article constitutionnel sur la famille, jamais entendu l'Eglise sur ce sujet. Les étrangers criminels, ils n'ont pris position ni pour l'initiative ni pour le contre-projet. Je crois qu'il y a quand même un bon nombre de sujets où on peut dire qu'on attendrait un peu plus l'Eglise sur ces sujets de société et de valeurs."

En effet, la CES a suscité une forte polémique dans ses propres rangs en refusant de soutenir l'initiative sur le financement de l'avortement, sujet pourtant cher à l'Eglise et à la papauté.

La critique porte et fait réagir le prévôt de la cathédrale de Fribourg, Claude Ducarroz, sur les ondes de la RTS, qui déclare sans ambages:

"L'Eglise catholique n'est pas l'aumônerie du PDC, et le PDC n'est pas le bras armé de l'Eglise catholique. Il y a d'excellents chrétiens partout"

Donc a fortiori même parmi les partisans de la révision de la loi sur l'asile. Tout le monde a raison en somme, c'est tellement plus simple que de devoir s'expliquer sur le fond, mais le chanoine Ducarroz n'en dira pas plus.

Yannick Buttet (PDC/VS), dernier des conseillers nationaux à revendiquer ouvertement sa foi catholique, de répliquer sur-le-champ:

"Il y a aussi une réalité [...] J'aimerais bien que nos évêques sortent aussi de leurs sacristies sur des thèmes qui sont un peu moins populaires et un petit peu plus sensibles. Je pense, typiquement, à l'adoption par les couples homosexuels. On a parlé dernièrement aussi d'un thème très sensible sur l'interruption de grossesse, qui sont des thèmes qui sont très sensibles. Et là, je regrette d'entendre un peu moins les Eglises."

Claude Ducarroz répond:

"Je crois que l'Eglise catholique s'est clairement prononcée là-dessus."

En effet, contre son droit et à l'exact rebours des déclarations du pape Jean-Paul II (1), l'Eglise catholique a clairement refusé de soutenir l'initiative « Financer l’avortement est une affaire privée » au motif que, quoique "positive", cette initiative n'allait pas assez loin dans la défense de la vie. Concernant l'adoption homosexuelle, en revanche, la CES n'a pas pipé mot.

"Nous ne pouvons pas nous taire à certains moments"

continue l'ecclésiastique. Le peuple catholique attend, spe salvi.

 

RTS 19:30

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RTS Forum

 

(1) Evangelium Vitae 73.

 

Voir aussi

Mgr Huonder: « Le fidèle veut une déclaration claire »

 

2 commentaires

  1. Posté par Cain_Marchenoir le

    En ce qui me concerne, il est vrai que la réflexion de l’Eglise sur la fermeture des ambassades me parle. Même si le reste de la révision en question me parait justifié.
    Ceci dit, j’attire votre attention sur une partie de l’argumentaire de l’Eglise: « les devoirs en soi compréhensibles qu’ont les Etats d’endiguer l’immigration. »
    Il faudra s’en souvenir au moment de parler remise en cause de la libre circulation…

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