Le CF demande pardon… et s’apprête à recommencer

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Lors d’une manifestation particulièrement émouvante, la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a demandé pardon aux nom du Conseil fédéral pour les milliers d’enfants placés de force dans des familles d’accueil.

« Au nom du gouvernement suisse, sincèrement et du fond du coeur, je vous demande pardon pour les souffrances qui vous ont été infligées. »

Des pénombres de la fin du XIXe à 1980, des enfants de familles pauvres ou jugées marginales, les enfants de filles-mères, de Romanichels ont été placés de force dans des instituts, comme garçons ou filles de ferme, voire même parfois en prison. Enfants de seconde zone, sans-familles, bêtes de sommes, objets, souffre-douleurs, ils ont souvent subis les pires traitements. La repentance du Conseil fédéral ne pèse pas bien lourd. Arrachés à leur famille, les victimes de cette horreur ne toucheront pas un sou et quitteront Mme Sommaruga riches de ces seuls mots. Mais pour eux, c'est déjà ça, l'argent, c'est sûr, n'aurait pu racheter leur enfance volée.

Passons sur le sort actuel des filles-mères, qui ne semble aujourd'hui guère plus enviable qu'hier, pressions systématiques à l'avortement, même en cas de récidive, incompréhension, déni du désir d'enfants, de la maternité, insultes, dénigrement et, en fin de compte, l'isolement et la précarité. La jeune parentalité est le grand tabou du XXIe siècle.

Dignité humaine

Les témoins de ces placement sont unanimes à dénoncer ce qui les a le plus atteint dans leur dignité, le rejet, le déni arbitraire de cette filiation qui les liait à des êtres, leurs parents, fussent-ils malades, pauvres ou marginaux... La première souffrance fut ce décret de l'Etat les déclarant orphelins alors qu'ils ne l'étaient pas, décidant pour eux qui devraient être leurs parents, substituant à leur autorité des êtres qui ne les voyaient que comme du bétail tout juste bon à être abusé sexuellement. Le souvenir des êtres chers est souvent bien pire que la douleur du cachot. Il faut avoir connu cet exil de l'enfance, la douleur et la violence, la pesanteur des coups, le feu des cuirs sur sa peau pour savoir que ce cauchemar sommeille en toute institution humaine et que, souvent, vigilance et repentance ne suffisent pas. Pour ceux qui ont surmonté cette perte d'humanité, l'assurance que leur souffrance servira de leçon à d'autres serait déjà une bien large récompense. Cependant, cette assurance nous l'avons perdue, ce monde de morale revisitée, avec ses libertés en bandoulière, sa transcendance renouvelée, ce monde s'apprête à sombrer, avec le même entrain, la même bonne conscience, dans les mêmes travers. Hier on vendait les enfants aux enchères comme des animaux sur l'autel d'une société plus saine, aujourd'hui on s'apprête à les livrer comme des objets sur celui d'une société plus "juste".

Le 29 novembre 2002, le Conseil fédéral assurait qu'il  « n’existe aucun droit à l’adoption ». « L’adoption est une institution de l’aide sociale à l’enfance » et non d'aide aux adultes. Il promettait en outre que les règles naturelles de filiation ne seraient point rompues: « La nature veut que chaque enfant ait un père et une mère qui jouent chacun un rôle important dans son développement. C’est pourquoi, sur le plan juridique également, les règles du code civil sur la filiation (art. 252 ss) tentent si possible d’attribuer un père et une mère à chaque enfant et d’assurer ainsi la polarité des sexes. L’adoption conjointe par un couple marié est la règle. Le droit entend ainsi garantir que, comme dans l’ordre naturel des choses, l’enfant ait un père et une mère. L’adoption par une personne seule n’est pas interdite par la loi. Elle revêt cependant un caractère exceptionnel et doit pour cette raison s’appuyer sur des motifs tout à fait particuliers.

Dès lors, si le législateur autorisait les couples homosexuels à adopter un enfant, les principes fondamentaux du droit de la filiation actuel seraient abandonnés. L’enfant aurait, du point de vue juridique, deux mères ou deux pères, ce qui serait contraire à l’ordre des choses. Il serait alors dans une situation exceptionnelle, qui serait difficile à justifier dans la société contemporaine. De plus, il faudrait se demander pourquoi ne pas permettre à d’autres personnes vivant en communauté d’adopter un enfant. Ainsi, deux sœurs qui vivraient ensemble pourraient invoquer d’aussi bonnes raisons qu’un couple homosexuel pour demander l’autorisation d’adopter un enfantA cela s’ajoute le fait qu’en Suisse il y a nettement plus de conjoints qui cherchent à adopter un enfant que d’enfants à adopter et que dans les Etats du Tiers Monde le partenariat enregistré n’existe pas pour le moment. L’accueil d’un enfant étranger dans une famille dans le but de l’adopter n’est pas seulement le fait des autorités suisses, mais nécessite aussi l’approbation des instances compétentes du pays d’origine de l’enfant. On peut douter que celles-ci donnent leur accord à un couple homosexuel, d’autant que les demandes d’adoption par des couples mariés sont déjà en surnombre.

Le projet de loi n’autorise donc pas – non plus que l’avant-projet mis en consultation – l’adoption pour les personnes qui vivent en partenariat enregistré. Cette interdiction a été largement approuvée lors de la consultation.

Une minorité de participants à la procédure de consultation était d’avis qu’il faudrait autoriser au moins l’adoption de l’enfant du partenaire. Mais, pour établir la filiation, c’est-à-dire pour savoir qui sont juridiquement le père et la mère d’un enfant, il ne s’agit pas seulement de déterminer qui l’éduque et prend soin de lui. De toute évidence, ces fonctions peuvent être assumées sans difficulté par différentes personnes. Il s’agit aussi de prendre en considération l’intégration de l’enfant dans la succession des générations au sein de sa famille paternelle et maternelle, ainsi que l’identité qui en résulte. Il est donc décisif de déterminer si, du point de vue du bien de l’enfant, l’adoption par le partenaire de l’enfant biologique de l’autre partenaire du même sexe est défendable et si elle correspond à un besoin.

Pour ce qui est de l’adoption de l’enfant du conjoint, il convient de relever que de toute manière, elle n’est possible qu’avec le consentement du parent biologique qui n’a pas l’autorité parentale sur l’enfant. Il ne peut être fait abstraction de ce consentement qu’à certaines conditions précises, notamment lorsque le parent en question ne s’est pas soucié sérieusement de l’enfant (art. 265c CC). L’adoption de l’enfant du conjoint peut aussi être envisagée lorsque l’autre parent est décédé. Mais il faut prendre en considération, dans ce cas, le fait que l’adoption entraîne la dissolution des liens juridiques également avec les grands-parents, les oncles et les tantes, les cousines et les cousins. »

L'enfant était entre de bonnes mains, l'Etat le protégeait des revendications sans fin dont il est continuellement l'objet. Ces promesses et engagements furent réitérés à maintes reprises par les partisans de la loi sur le partenariat enregistré durant la campagne qui eut lieu en 2005.

Puis survint Evelyne Widmer-Schlumpf, cette même que les médias d'Etat cherchent à créditer du « long travail de mémoire » qui a trouvé son aboutissement hier dans la bouche de Simonetta Sommaruga. C'est précisément Evelyne Widmer-Schlumpf qui brisa la parole du Conseil fédéral et changea, en 2012, cette phrase: « Il n’existe aucun droit à l’adoption » en: « de nombreux enfants [...] ne bénéficient pas des mêmes droits que les enfants nés de couples mariés. Ouvrir cette adoption aux partenaires enregistrés mettra tous les enfants sur un pied d'égalité. » Ce droit à l'adoption qui n'existait pas pour les adultes était réinventé pour les enfants. C'est un peu comme de tenter de prétendre que, dans les années 40, les enfants placés étaient maltraités et parqués dans des orphelinats par respect pour leur droit d'être traités « sur un pied d'égalité » avec de vrais orphelins maltraités. Un trafic ignoble de la réalité.

A l'appui de sa cause, Mme Widmer-Schlumpf tente l'invocation du fait accompli: « de nombreux enfants grandissent dans pareilles familles ». Vous vous souvenez, ces familles qui, à dix ans de distance, étaient impossibles en raison des « principes fondamentaux du droit de la filiation ». De toute évidence, les garanties de protection de l'enfance du Conseil fédéral semblent aussi solides aujourd'hui qu'elles le furent hier et ses promesses valoir autant que les dommages et intérêts qu'ils ne versera pas aux victimes de ses égarements.

 

 

Voir aussi

Temps présent: Enfances brisées

5 commentaires

  1. Nous sommes là une fois de plus devant un galimatia de notions juridiques entre mêlées
    d’obscures déclarations de droits innés qui comme Schengen et autres « droits »des réfugiés
    inspirés de la déclaration fumeuse des droits de l’homme qui sert aujourd’hui de vade mecumpolitico, socio,sentimentalo pleurnichard et soi disant universel,donc bien évidemment inutile et inapplicable,sinon à justifier des dépenses et impôts de l’état.

  2. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Décidément, cet article m’inspire! Un « détail », si j’ose dire, et de taille, manque à l’acte de contrition! Dieu! Je ne dis pas qu’il en faille émailler le discours! Mais en avoir conscience! Car çe ne sont pas des excuses qui ont ressuscité le Christ! J’ai commis des offenses qui, a mes yeux, ne sont rien de moins que des meurtres! J’ai été le sujet d’offenses qui ont rompu la relation. Ce qui équivaut à mort! Jamais on ne peut remettre la confiture dans le pot!
    Pétula Clark chantait: « tout le monde veut aller au ciel mais personne ne veut mourir »!
    Et je dis que personne ne veut être dieu! Pourtant, ne le sommes nous pas pour nos enfants? Ne disposons-nous pas d’un pouvoir discrétionnaire sur eux?

  3. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Encore quelques mots, en poursuivant ma lecture! L’expression de la repentance, venant de quelqu’un qui n’est pas directement impliqué, a quelque chose de fallacieux! Je n’ai pas connaissance du discours de Simonetta. Mais est-elle qualifiée pour demander pardon si elle ne s’associe pas aux coupables? En tant qu’humaine! Donc capable de Ça! Il est vrai, j’en convient, qu’à l’échelle du mal Simonetta est hors de cause en ces occurrences! C’est ici opportun, à mes yeux, de citer cette histoire évangélique. Un péquin lambda est propulsé au pieds du trône, ou à la droite du Prince! Tombant des nues il questionne, pourquoi suis-je là? Parce que tu m’as fait du bien! Le mec, étonné, demande quand! Chaque fois que tu as fait du bien a l’un de ces petits (d’entre mes frères) c’est à moi que tu l’a fait! Wow! Génial! Je vais faire des courbettes aux mendiants! Et bien non! C’est le plus sur moyen d’être hypocrite! De plus, qui vous l’a dit? Le fin du fin de cette histoire est que l’on sait toujours après! Vous n’y couperez pas! Libre a vous de manger le fruit de l’arbre de la connaissance de l’avant et de l’après! Mais alors sachez que c’est au Vieux que vous devrez les vêtements cachant la pitoyable nudité consécutive!

  4. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Poursuivant ma lecture je vois cités les « Romanichels ». Aujourd’hui les « Roms »! Dont on détruit les campements sous prétexte qu’ils ne sont pas conformes à la dignité humaine! Je ne sais pas si ce sont les Roms, les campements ou les deux qui sont indignes. Bref, on ne rase pas gratis, mais au nom des droits de l’Homme! Dont il devient de plus en plus évident qu’ils sont le produit d’une caste d’extraterrestres. Ça rase des bicoques et « ça » prétend faire régner la justice en Syrie et ailleurs? J’ose le dire: « ça » me débecte!

  5. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Je réagi seulement au début de l’article! J’ai vu le film! Glaçant! J’ai vécu enfance et adolescence en pension. Je n’ai pas eu à souffrir ni de viol ni d’esclavage. Mais mes souvenirs donnent crédit au film, « enfance volée »! En fait toute mon expérience de vie accrédite ce film! Ce film montre plus que le viol! Il montre l’union sacrée dans le mensonge! Au nom du Bien!

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