La lente déliquescence du fédéralisme

Frédéric Jollien
Mouvement pour la Liberté, Enseignant

Face à la lente destruction de notre système fédéraliste, une prise de conscience doit être faite au plus vite ! C’est ce que tente de faire le nouveau « Mouvement pour la Liberté » afin d’informer, par la pédagogie et l’activisme politique, les citoyens de ce pays quant aux risques et aux périls du planisme centralisé.

Tout commence par une seule pensée : il faut harmoniser les pratiques ! C’est en effet une belle stratégie que d’utiliser des termes a priori positifs pour, finalement, prôner l’homogénéisation, l’uniformisation ainsi que l’imposition généralisée, et ce en y ajoutant rhétorique fondée sur l’équité.

Les élites politiques de la Berne fédérale tentent chaque année de nous vendre leurs produits et nous garantissent de nouveaux cadeaux qu’ils paieront avec notre argent : « Nous instaurerons de bonnes conditions pour les familles », « Nous planifierons harmonieusement l’utilisation du territoire », « Nous indiquerons aux entreprises ce qui est bon ou non », etc.

A chaque votation, le pouvoir fédéral s’accroît et gagne donc en importance. Que peut-on lui reprocher ? Le système lui demande d’être actif et bien il l’est ; comme le disait Benjamin Constant, « la multiplicité des lois flatte dans les législateurs deux penchants naturels, le besoin d’agir et le plaisir de se croire nécessaires ».

La chute du fédéralisme

L’Etat fédéral central gagne ainsi, peu à peu, du pouvoir au détriment des cantons. Il n’y a plus qu’un constat à poser : la déliquescence généralisée de notre système fédéraliste.

Il est également intéressant de constater que la plupart des actions de l’Etat central amène des conséquences qui réclament encore plus d’intervention de celui-ci, ce qui accroît inévitablement son pouvoir. Observons par exemple ce qui se passe avec la loi sur l’aménagement du territoire.

Suite aux mesures décidées en 1979, chaque canton s’est vu contraint à mettre en application tout un lot de petites restrictions compliquées en ce qui concerne l’utilisation de son territoire. Le zonage immobilier, les règles aberrantes autour des cours d’eau, l’autorisation de pratiquer l’expropriation (certes avec compensation) et d’autres mesures ont offert de belles perspectives constructivistes aux politiciens en manque d’un Sim City grandeur nature.

Toutefois et malgré ces mesures légales, la collectivisation forcée des réseaux d’eau, de gaz et d’électricité dont les coûts en infrastructure sont globalement – et majoritairement – supportés par la collectivité, et non par le futur propriétaire, fait que l’attractivité des terrains, de par leurs caractères bons marchés et excentrés, s’accroît et peut encourager le développement immobilier de manière quelque peu désordonnée.

Pouvoir absolu

Face à cette utilisation grandissante – et « chaotique », selon un pouvoir central intéressé – des différents territoires cantonaux, l’Etat fédéral décide aujourd’hui d’édicter un plan général pour l’entier du pays afin de le « sauver » de la soi-disant incompétence cantonale en la matière. Les fonctionnaires fédéraux se chargent alors de l’élaboration complexe de ce plan et ce dans l’idée de rationner les territoires cantonaux. Ce contrôle provoquerait toutefois une raréfaction des terrains constructibles, ce qui logiquement fera monter les prix. Les loyers augmentant sans cesse, l’Etat fédéral sera alors appelé pour intervenir auprès des bailleurs. Il faudra leur imposer des prix plus bas, ou des contraintes fiscales, pour empêcher une « spéculation immobilière » au détriment des plus démunis. Les gestionnaires immobiliers seront ainsi désintéressés par ces investissements risqués et quitteront le marché en question. Face à la pénurie, l’Etat fédéral sera alors une nouvelle fois appelé à la rescousse afin de construire les immeubles manquants. A terme, et au vu de ce qui a été décrit ci-dessus, l’Etat fédéral pourrait se retrouver à gérer l’entier du secteur de la construction. Le pire étant que les cantons seraient très certainement appelés à financer, du moins à cofinancer ce genre de projets palliatifs.

Ce qui est valable pour l’immobilier est valable pour tant d’autres domaines. A chaque fois qu’un pouvoir est donné à la Confédération, celui-ci tend, année après année, à s’accroître après observation des méfaits qu’elle avait elle-même créé et de par certains mythes largement exploités par les législateurs. La route de la servitude se pave ainsi, loi après loi, dans un mouvement qui paraît inéluctable sans une prise de conscience.

Fatalité ?

Est-ce néanmoins une fatalité ? Non. Peut-on encore l’empêcher ? Oui. Si vous doutez du pouvoir qu’a la philosophie politique de fixer le cours de l’histoire et de façonner ainsi la destinée d’une société, observez que la lente dérive de notre fédéralisme ; elle est le résultat d’une philosophie constructiviste propre à la démocratie de consensus. Dès lors, nous comprenons qu’il est possible de renverser la tendance et ce seulement si nous changeons de paradigmes philosophiques et politiques. Sommes-nous prêts ? Il le faut, car le temps presse.

Face à cette situation, le Mouvement pour la Liberté a décidé de s’engager et donc de défendre l’autonomie cantonale dans une campagne citoyenne et apolitique en lien avec les prochains sujets de votation (Révision de la LAT et l’arrêté fédéral sur la politique familiale). Bien évidemment, nous invitons toute personne attachée au fédéralisme et partageant les mêmes idéaux de liberté à se joindre à nous. Ce n’est qu’en s’exprimant et en s’engageant concrètement que nous pouvons espérer changer les choses.

Frédéric Jollien

 

2 commentaires

  1. Posté par Frédéric Jollien le

    <>

    Au contraire, le libéralisme ne prône absolument pas la centralisation du pouvoir et c’est plutôt le protectionnisme et le corporatisme qui bénéficient d’un pouvoir central fort.

  2. Posté par Martin le

    C’est une bonne initiative, notre fédéralisme à besoin de nous :-).

    Cependant, le « désir d’harmonisation » ne sort pas de nul part. Vous devez trouver qui s’y cache derrière et pourquoi afin de mieux les combattre.

    On pourrait, par exemple, dire que la centralisation profite à 1) la gauche qui, par égalitarisme, considère les différences humaines et sociales comme sources d’inégalités et d’injustices qui doivent donc être « corrigées », et 2) la droite (? — liberalisme économique, libre-échange, mondialistes, etc.) pour qui les frontières d’un pays, l’État et les différences culturelles entre les peuples pèsent sur le bénéfice de leurs entreprises (les consomateurs étant trop hétérogènes).

    Martin

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